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Comme nous
l’expliquions dans un précédent
article, l’Institut de l’Entreprise consacre sa dernière note
de benchmark à l’Italie. Après avoir décrit la
situation, voyons comment le gouvernement italien a réagi.
Tout d’abord,
insistons sur le fait qu’il a réagi tardivement. « L’essentiel des
efforts a ainsi été consenti à partir de l’été 2011 et au cours de l’année
2012, à la suite des fortes pressions exercées par les marchés sur la dette
italienne – pressions liées notamment aux craintes engendrées par l’absence
de réformes dans le pays. »
Mais ces
efforts semblent encore insuffisants « pour permettre une diminution
rapide et durable de la dette publique. » Il faut dire que la
consolidation a d’abord porté sur la hausse des recettes. Celles-ci ont
augmenté de 1,8 point entre 2009 et 2013, tandis que les dépenses ne
diminuaient que de 0,6 point de PIB sur la même période.
Pour augmenter
les recettes budgétaires, le gouvernement italien a augmenté la fiscalité
(TVA, droits d’accise sur les produits énergétiques, taxe sur l’immobilier,
impôt sur le revenu, taxe spéciale sur les sociétés pétrolières et gazières,
taxe sur les revenus du capital, droit de timbre sur les comptes courants,
taxe sur les transactions financières). Parallèlement, « la taxation
pesant sur le travail a été allégée. » Ajoutons que la lutte contre la
fraude fiscale a été renforcée, et que des privatisations ont été lancées à
partir de 2013.
Du côté des
dépenses, l’action gouvernementale a été, pour l’instant, plus modeste.
Celle-ci a porté sur la diminution de la masse salariale de la fonction
publique italienne (9 milliards d’euros tout de même entre 2010 et 2014), sur
une restriction des dépenses de santé, et sur la diminution des transferts de
l’État aux collectivités locales. Par ailleurs, un processus de revue
générale des dépenses (spending review) a été initié et prévoit des
économies à hauteur de 4,5 milliards d’euros en 2014, 17 milliards en 2015 et
32 milliards en 2016.
Malgré tout,
la dépense publique italienne a augmenté en valeur de 0,8 % entre 2010
et 2013, alors qu’elle a diminué en Espagne et en Irlande. Il faut dire que
la hausse de la fiscalité n’a pas provoqué la hausse des recettes attendues
en raison de la dégradation de l’activité économique.
N’oublions pas
cependant les réformes structurelles. Celle des retraites tout d’abord :
un régime notionnel à cotisations définies a été mis en place à compter de
2012, les possibilités de préretraites ont été réduites, l’âge de départ en
retraite a été repoussé et la durée de cotisation étendue. « En outre, à
compter de 2013, toutes les conditions d’âge et de durée de cotisations
seront indexées sur l’évolution de l’espérance de vie. »
Deuxième
réforme structurelle, celle du marché du travail. Plusieurs mesures ont été
prises : simplification et réduction du nombre de contrats de travail
atypiques ; réduction de l’insécurité juridique liée au licenciement (plus
de réintégration systématique dans le poste après un licenciement
injustifié) ; soutien à l’apprentissage ; signature d’accords
nationaux interprofessionnels afin de décentraliser les négociations
collectives sur les salaires et de « permettre une meilleure adéquation
des salaires à la productivité. »
Ces réformes
du marché du travail ont eu jusqu’à présent peu d’effet sur la courbe du
chômage. Le gouvernement Renzi a alors élaboré un nouveau projet de réforme,
couramment appelé Jobs Act. Il prévoit notamment l’allongement de la
durée possible des CDD (jusqu’à 36 mois), la simplification des contrats
d’apprentissage, l’instauration d’un CDI « à protection
croissante » (licenciement facilité durant les trois premières années, puis
coût de plus en plus élevé avec l’ancienneté), l’instauration d’un nouveau
dispositif d’indemnisation du chômage (avec possibilité de sanction en cas de
refus d’offres d’emploi).
Troisième
réforme structurelle, celle touchant au marché et au climat des affaires.
Nous pouvons citer, sans être exhaustif, la liberté des horaires d’ouverture
pour les commerces, la suppression des distances minimales entre commerces,
la suppression des tarifs réglementés pour certains services (avocats,
notaires, etc.), l’autorisation de vente de médicaments sans ordonnance en
dehors des pharmacies, la mise en place d’une série de mesures de
simplification administrative en faveur des PME, la fixation du délai de
paiement des administrations publiques à 30 jours, etc.
Enfin,
soulignons les réformes institutionnelles adoptées ou en cours qui visent à
apporter davantage de stabilité à la vie politique italienne et ainsi
« favoriser la continuité des réformes et permettre des économies de
structure » (réforme du mode de scrutin des députés, fin du
bicaméralisme strict, abolition des provinces, suppression du Conseil
économique et social…).
Pour Charles
Trottman, l’auteur de l’étude, « l’Italie semble loin d’être tirée
d’affaire. Le problème principal du pays réside en effet dans sa faible
croissance économique et dans son défaut de compétitivité. De ce point de
vue, si les réformes structurelles qui ont été engagées en 2012 sur le marché
du travail, le marché des biens et la simplification administrative vont
toutes dans la bonne direction, le chemin à accomplir est encore long. »
En attendant,
il convient, je crois, de regarder de près l’évolution du pays. En effet, par
biens des aspects, l’Italie d’avant la crise et la France se
ressemblent : importance de la dépense publique, des dépenses sociales,
de la réglementation et des interventions de l’État, défiance vis-à-vis de
l’économie de marché. Or, l’une semble suivre le chemin difficile des
réformes, tandis que l’autre semble toujours hésiter et ne procéder que par
petites touches et demi-mesures. Malgré cela, l’Italie n’est pas au bout de
ses peines, d’autres efforts devront être consentis. Alors, que dire de la
France ?
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