J’ai
d’abord été surpris de voir le prix de l’or stagner à mesure que la
possibilité de voir la Grèce quitter la zone euro devenait de plus en plus palpable,
suite à l’échec des négociations et à la publication du résultat du
référendum grec. Après tout, nous aurions pu nous attendre à ce que les
« actifs à risque » en souffrent, et à ce que les actifs dits de
préservation de capital soient plus recherchés, du moins temporairement.
Mais
après avoir réfléchi à la question, j’en suis arrivé à la conclusion que
l’absence de réaction de la part de l’or (qui a en fait vu son prix baisser,
et a en conséquence réagi à la nouvelle) pouvait être facilement expliquée.
Tout d’abord, les spéculateurs ont augmenté leur position nette à la vente
sur les contrats à terme de l’ordre de plus de 20.000 contrats au cours de la
semaine qui a précédé la fin des négociations, semble-t-il en prévision de
leur résultat. Malgré leurs achats, le prix de l’or a à peine bougé. Dans un
sens, nous pourrions parler de gaspillage d’énergie.
Puisque
rien ne s’est passé sur le marché de l’or dans la journée du lundi qui a
suivi l’annonce des résultats du référendum, ces nouvelles positions ont été
liquidées. La baisse des prix qui en a découlé a poussé les spéculateurs à
ajouter à leurs positions à découvert, ce qui a davantage forcé les prix à la
baisse.
D’autres
raisons peuvent expliquer cette réaction. Malgré les fluctuations survenues
sur le marché boursier, les rumeurs selon lesquelles « tout va pour le
mieux » n’ont pas encore déraillé. Les dangers présentés par le Grexit
sont probablement sous-estimés, et jusqu’il y a très récemment, personne ne
pensait que la Grèce déciderait un jour de quitter la zone euro (très peu de
gens l’en croient aujourd’hui capable, bien que cette possibilité soit perçue
comme plus probable qu’il y a quelques mois).
De plus,
le récent effondrement du marché boursier chinois a fait subir de lourdes
pressions aux prix des marchandises industrielles, et les participants aux
marchés semblent s’être soudainement rappelés que l’économie chinoise était
en phase de ralentissement. L’or s’échange encore à un niveau très élevé en
comparaison aux autres ressources industrielles, et nous pourrions nous
attendre à ce que le récent plongeon des prix du pétrole et du cuivre ait
généré un tsunami d’appels de marges qui ont frappé un grand nombre de
spéculateurs. Dans une telle situation, l’or agit généralement en tant que source
de liquidité. Le marché de l’or est l’un des marchés les plus liquides du
monde, ce qui signifie que de grosses quantités de métal peuvent être
achetées ou vendues sans que les prix s’en trouvent lourdement influencés. Un
scénario similaire a pu être observé pendant la crise de 2008 : malgré
son statut de valeur refuge, l’or a été vendu aux côtés des autres actifs à
risques, puisqu’il servait de source de liquidité.
Voilà
qui explique aussi pourquoi de nombreux baissiers pensent que « si la
crise grecque ne peut pas faire grimper le prix de l’or, rien d’autre ne le
pourra ». Beaucoup pensaient la même chose en 2008 – avant que le prix
de l’or ne soit multiplié par trois en trois ans.
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