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Notre
pauvre vieux Karl Marx, harcelé par ses furoncles et ses démons paranoïaques,
avait raison sur une chose : l’Histoire se répète deux fois, la première
comme une tragédie, la deuxième comme une farce. Nous avons eu l’Empire
romain, et nous avons aujourd’hui l’Empire des Etats-Unis d’Amérique. Rome
s’est rendue face au temps et à l’entropie. Les Etats-Unis ont opté pour
conduire une voiture de clown droit vers le précipice.
Êtes-vous
intéressé par votre Salut ? J’ai une petite idée à faire part au parti
politique déchu, celui des Démocrates, qui ont sombré dans un véritable
marais Okefenokee d’identité politique et de paranoïa russe : légiférer pour
que Citizens United puisse enfin cesser d’exister. Qui sait, une
poignée de Républicains pourraient même se joindre à eux. Pour ceux d’entre
vous qui seraient partis en vacances sur Mars avec Elon Musk, Citizens
United est une décision qui a été prise par la Cour suprême à l’issue de
l’affaire Citizens United v. Federal Election Commission 558 U.S. 310
(2010), qui stipule que les corporations ont le droit, en tant que personnes
fictives, de donner autant d’argent qu’elles le souhaitent à des candidats
politiques.
Ce «
droit » découle du premier amendement de la Constitution. Selon l’opinion
majoritaire, donner de l’argent à des candidats et à des causes politiques
est synonyme de « liberté d’expression ». La décision Citizens United
a ouvert la porte à des dépenses électorales illimitées de la part des corporations,
et à de lourdes calamités pour notre vie nationale. Le président Obama, qui
était alors au pouvoir – et était professeur de droit constitutionnel avant
de se lancer en politique – s’est plaint de la décision de la cour quelques
jours plus tard dans son discours sur l’Etat de l’Union, et expliqué qu’elle
infléchissait un siècle de lois en permettant aux corporations, étrangères
comme domestiques, à dépenser sans limites dans le cadre des élections.
Mais
au cours des sept années qui ont suivi, il n’a rien fait pour y remédier, et
la majorité démocrate du Congrès a suivi son exemple. Tous se sont contentés
de tirer autant d’argent des entreprises que possible des Comités d’action
politique d’un océan à l’autre, notamment lors de la campagne électorale de
2016 avec, dans le rôle vedette, Hillary C’est-Mon-Tour Clinton. Son tour lui
est pourtant passé sous le nez, en grande partie parce que les électeurs se
sont aperçus de l’odeur de corruption qui émanait de ces flux toxiques
d’argent des corporations, qu’Hillary utilisait à tour de bras pour dépenser
plus que son opposant milliardaire, troll qu’il était.
Bien
évidemment, les corporations n’ont pas toujours été ce qu’elles sont
aujourd’hui. Elles ont évolué au travers des activités de plus en plus
complexes nécessaires aux économies industrielles. Elles ont un jour été
autorisées – d’abord en Grande-Bretagne – à exister en tant que personnes
légales, afin que les responsabilités de ces sociétés soient séparées et
distinctes de celles de leurs propriétaires. Aux Etats-Unis, établir une
corporation nécessitait généralement un acte du pouvoir législatif jusqu’à la
fin du XIXe siècle. Après ça, il ne fallait plus que s’enregistrer auprès
d’un Etat. Le Congrès a ensuite eu à s’occuper des problèmes additionnels des
gros trusts et sociétés de portefeuilles (d’où les lois anti-trust,
aujourd’hui largement ignorées).
Ainsi,
la définition de ce qu’est une corporation et de ce qu’elle est autorisée à
faire change constamment à mesure qu’évoluent les économies. Et dans la
mesure où l’économie coule aujourd’hui plus vite que le Titanic – emportant
avec elle notre république – le temps est désormais venu de redéfinir le rôle
légal et la nature existentielle des corporations. Ce devoir à la maison
devrait être rendu par les membres du parti démocrate, qui ne se préoccupent
autrement que de chasser des Gremlins russes et de découvrir de nouvelles
anomalies sexuelles à protéger et à défendre.
Le
point essentiel de cet argument est que les corporations ne devraient pas
représenter l’équivalent de personnes dans n’importe quel cadre légal. Selon
la loi, les corporations ont des devoirs, des obligations et des
responsabilités envers leurs actionnaires, ainsi qu’envers l’intérêt public
et le bien commun. Il pourrait cependant transparaître que les intérêts des
corporations et de leurs actionnaires soient en opposition à, et en conflit
avec, l’intérêt public. Dans la mesure où les élections sont d’une importance
fondamentale pour l’intérêt public, les corporations ne devraient pas avoir
le droit d’en influencer le résultat.
Voilà le devoir à la maison que je
souhaite donner à Chuck Schumer, Nancy Pelosi, et au reste des démocrates.
Qu’ils fassent preuve d’un minimum d’initiative. Qu’ils rédigent des projets
de loi. Qu’ils défendent enfin quelque chose qui soit susceptible de faire
une différence dans ce pays en décrépitude. Ou qu’ils s’en aillent et
laissent un nouveau parti faire le travail.
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