Monnaie, Banque Centrale et Inflation

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From the Archives : Originally published May 21st, 2008
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Category : History of Gold




Un humoriste, qui ne manquait pas d’esprit d’observation, a dit un jour : « vivre en couple, c’est passer son temps à résoudre des problèmes que l’on n’aurait jamais eu tout seul… ». Cette phrase m’a inspiré une pensée sur la Banque Centrale par des chemins de traverse dont le cerveau détient seul le secret.

La fonction principale de la Banque Centrale est d’émettre de la monnaie parce que les agents de l’économie ont besoin de monnaie pour divers usages, notamment pour liquider leurs transactions. Généralement, quand des agents expriment des besoins, d’autres agents donnent spontanément naissance à une offre et leur survie est conditionnée à leur capacité à fournir un bien ou un service correspondant bien aux attentes des utilisateurs. C’est pourquoi il a existé un marché des monnaies privées. Et c’est aussi pourquoi la monnaie existe depuis que le commerce entre les hommes existent, et notamment bien avant l’invention des Banques Centrales qui s’en sont attribuées le monopole de l’émission. Avec l’apparition du concept de banque centrale au XIX° siècle, le système bancaire s’est trouvé hiérarchisé dans le cadre d’une offre monétaire monopolisée et centralisée. Plus précisément, la banque centrale a le monopole de l’émission des « billets de banques » (la liquidité qui représente 10 % de M1) sur la base de laquelle le système bancaire et financier va générer sa propre masse de moyens de paiements (M2 et M3).


Parce qu’elle a la responsabilité en dernière instance de contrôler la masse monétaire, la banque centrale doit tout mettre en œuvre pour ne pas mettre en circulation une monnaie dépréciée par l’inflation. Elle se retrouve donc à lutter contre un problème majeur. Pourtant ce même problème n’a pas de sens en l’absence de Banque Centrale. En effet, si l’on veut que les acteurs aient confiance en la monnaie, celui qui offre la monnaie doit mettre en circulation des unités monétaires de qualité. Or cette qualité est en relation avec la quantité de monnaie dans le sens où tout dérapage de la masse monétaire dégénère en dérapage du niveau général des prix.


Nous avons vu que la création des Banques centrales s’est traduite par une centralisation et une monopolisation de l’offre de monnaie. Or les économistes savent bien que les monopoles ont tendance à s’écarter de la quantité (et de la qualité) demandée par des agents économiques rationnels. Ceci s’explique essentiellement par le fait que les situations de monopole détruisent l’information qui permet à la rationalité des acteurs économiques d’opérer. En monopolisant l’offre de monnaie, la Banque centrale a généré un problème qui n’existait pas avant elle et qui peut se résumer ainsi : quelle est la quantité optimale de monnaie qu’il faut injecter dans l’économie ? C’est la question centrale de la politique monétaire mais qui ne se pose pas dès lors que n’existe pas de Banque Centrale.

D’une manière générale, c’est le problème que doit affronter toute économie administrée mais qui disparaît dès qu’on laisse jouer les marchés, c’est-à-dire que l’on sort du cadre imposé par l’économie administrée. Imaginez qu’il existe un ministère de l’automobile centralisant et monopolisant la production des automobiles. Le ministre se trouve alors devant au moins trois questions cruciales : quelle quantité d’automobiles faut-il produire ? Et quelles gammes ? A quel prix faut-il les vendre ? Ce n’est pas une mince affaire. Faut-il considérer que les familles doivent avoir une ou plusieurs automobiles ? En fait, le problème est insoluble s’il est posé directement au niveau macroéconomique et ceux qui sont chargés de fixer les prix agricoles dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) en savent quelque chose. Le mieux est de ne pas avoir de ministère de l’automobile et de laisser chaque entreprise du secteur automobile résoudre ce problème à son niveau. Croyez-vous que le secteur automobile souffre ou que les automobilistes soient pénalisés du fait de l’absence d’un ministère de l’automobile ? La question d’une quantité globale d’automobile ne se pose pas puisque personne ne peut déterminer cette quantité à ce niveau. Il appartient à chaque entreprise de gérer à cette question au niveau microéconomique. Si une entreprise produit trop, elle accumulera des stocks invendus qui pèseront sur sa rentabilité ; si elle ne produit pas assez, elle perdra des clients au profit de ses concurrents. Ces problèmes de stocks, d’excédents ou de pénuries, de non-adéquation entre l’offre et la demande se posent de manière chronique dans l’agriculture, le logement, la santé ou sur le marché du travail, précisément dans ces secteurs où la main visible de l’Etat a voulu se substituer à la main invisible du marché sous le prétexte que la première voulait réguler la seconde.

De la même manière que l’on demande une automobile pour les services qu’elle rend, les acteurs de l’économie demandent de la monnaie pour les services qu’elle nous rend (transaction, précaution et spéculation). Si l’offre de monnaie est concurrentielle (ce qu’elle fut jusqu’avant l’arrivée des Banques Centrales), il appartient à chaque émetteur de monnaie (les banques) de régler sa masse de billet en circulation en fonction des contreparties dont il dispose dans ses coffres (et qui lui sont confiées par ses clients) et qui garantiront la qualité des billets émis. Si elle émet trop de billets, les agents économiques se détourneront de ses billets qui auront tendance à se déprécier pour se tourner vers les billets dont la valeur sera plus stable. Des agents rationnels se détourneront des billets dont la qualité est moindre pour demander plus de billets dont la qualité est supérieure. Dans ce contexte, la bonne monnaie chasse la mauvaise.


Il appartient donc à chaque banque de respecter un rapport rigoureux entre la masse monétaire particulière qu’elle met en circulation et ses contreparties. Dans ce contexte concurrentiel, il n’y a pas vraiment une masse monétaire globale homogène, la quantité totale de monnaie en circulation étant la somme des masses monétaires particulières des différentes banques émettrices de monnaie. Il ne peut donc y avoir de dérapage de la masse monétaire globale puisque personne ne contrôle cette masse directement à ce niveau



Dans le cadre d’un monopole, la rationalité des agents économiques est totalement neutralisée dans le sens où ils ne peuvent plus exercer leur pouvoir de choix (qui est un élément crucial du pouvoir d’achat). Si la Banque centrale émet trop de billets, l’inflation détériore la qualité de chaque unité monétaire de sorte que pour réaliser un même volume de transaction, les acteurs économiques sont obligés d’utiliser (et donc de demander) plus de monnaie. Comme la monnaie émise par la Banque Centrale a un cours forcé, les agents sont obligés de l’utiliser quelque soit sa qualité (ils n’ont pas le choix). On aboutit au paradoxe qu’ils demandent plus de monnaie dépréciée parce qu’ils ne peuvent faire marcher la concurrence en vue d’utiliser d’autres unités monétaires non dépréciées.


Dans la pratique, les acteurs économiques soucieux de protéger leurs actifs trouveront des actifs non monétaires plus ou moins substituables à la monnaie, l’or jouant traditionnellement ce rôle de valeur refuge.


C’est pourquoi une des missions centrales de toute Banque centrale est de lutter contre l’inflation (au sens d’un gonflement artificielle de la masse monétaire). Mais il n’y aurait pas d’inflation monétaire s’il n’y avait pas eu au préalable monopolisation et centralisation de l’offre de monnaie via l’institution des banques centrales.



Jean Louis Caccomo

Chroniques en Liberté





 


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Docteur en sciences économiques de l'université de la Méditerranée et Maître de conférences – HDR - à l'IAE de l'université de Perpignan. Médaille du Bibliographical Institute of Cambridge (London, 2012), il est spécialiste de croissance économique ainsi que chercheur en tourisme international et consultant pour l’Organisation Mondiale du Tourisme (Nations-Unies). Il signe des chroniques économiques dans la presse nationale (Les Echos, Le Monde, le Figaro, Economie-Matin) et internationale (l’AGEFI le quotidien suisse des finances, le Boston de Providence aux USA, le Québécois Libre à Montréal). Il anime enfin, depuis plus de 15 ans, un blog à vocation pédagogique, Chroniques en liberté, à l'attention de ses étudiants et du grand public. Ouvrages [1] Les défis économiques de l'information, la numérisation, L'Harmattan, Paris 1996. [2] L’innovation dans l’industrie du tourisme - Enjeux et stratégies. En co-écriture avec B. Solonandrasana, L’Harmattan, Paris, 2001 [3] L’épopée de l’innovation – Innovation technologique et évolution économique, L’Harmattan, Paris, 2005. [4] L’innovation dans l’industrie du tourisme. Enjeux et stratégie, avec B. Solonandrasana, L’Harmattan, Paris 2006. [5] Fondements d’économie du tourisme. Acteurs, marchés, stratégies. De Boeck Université, Bruxelles 2007. [6] Le modèle français dans l’impasse, Tatamis Editions, Paris 2013. [7] Histoire thématique et contemporaine des faits économiques, Ellipses, Paris 2015. [8] Analyse de la finance internationale : le grand naufrage, en co-écriture avec Faouzzi Souissi (Trader),The Book Edition, Paris 2019.
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"Ces problèmes de stocks, d’excédents ou de pénuries, de non-adéquation entre l’offre et la demande se posent de manière chronique [...] dans ces secteurs où la main visible de l’Etat a voulu se substituer à la main invisible du marché sous le prétexte que la première voulait réguler la seconde. [...] Dans le cadre d’un monopole, la rationalité des agents économiques est totalement neutralisée dans le sens où ils ne peuvent plus exercer leur pouvoir de choix (qui est un élément crucial du pouvoir d’achat).[...] Mais il n’y aurait pas d’inflation monétaire s’il n’y avait pas eu au préalable monopolisation et centralisation de l’offre de monnaie via l’institution des banques centrales."

En résumé, la Banque centrale est à la monnaie, ce qu'un Etat planificateur (Chine, ex-URSS, USA, et bien d'autres) est au peuple. Tous deux planifient arbitrairement les besoins "au petit bonheur la chance", se plantent magistralement car bien trop éloignés de la réalité et finissent par appauvrir ou rendre nul leur "administré".

Quand l'administré n'est que du papier, on peut toujours le brûler pour se chauffer. Quand l'administré est un être humain... on le presse comme un citron et on le brûle quand il n'a plus de jus.

Tout le monde se porterait donc bien mieux sans l'existence de ces institutions.

Ca promet pour le futur nouveau système monétaire que le NWO va nous concocter ! Comme il sera encore plus grand que le plus grand des Etats, la marge d'erreur sera également bien plus importante et ce sera la voie royale vers l'esclavagisme mondial. CQFD

Dormez bien, braves gens...

Merci pour cet article très éclairant. ;-)

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Lolo27 - 5/31/2012 at 1:01 AM GMT
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