En Avril
2001, le prix en dollars US de
l'once d’or était de 264 US dollars. Il a considérablement
augmenté depuis.
Il est
également possible de présenter les choses de manière
moins positive : la valeur d'échange du dollar, - la monnaie de réserve du
monde - a chuté de plus de 70% durant la période que nous
venons de considérer.
Masse monétaire M2 américaine, le
crédit bancaire,
l'index S&P 500 et le cours de l’or en
dollars US
Source : calculs
réalisés par Thomson Financials,
Bloomberg, Banque fédérale régionale de Saint Louis.
–
Les séries ont été indexées selon la
formule 1960 – Q1 = 100. Les parties ombragées
représentent
les périodes de récessions telles qu'elles ont
été définies par le Bureau national de la recherche
économique.
Pourquoi,
après avoir été ignoré pendant toutes ces
années par le marché, le prix de l’or exprimé en
monnaie papier augmente-t-il ? Pourrait on
légitimement inférer que cette hausse reflète
l'inquiétude croissante des acteurs du marché concernant
l'arrivée prochaine d'un puissant phénomène d'inflation
de la monnaie papier contrôlée par le gouvernement ?
Les tensions
sur le marché des crédits peuvent en effet contribuer à
répandre la crainte que les banques centrales, afin d'abaisser les
taux d'intérêt et de les maintenir bas, ne se mettent à
injecter toujours davantage de crédit et de monnaie dans
l'économie tentant par ce moyen d'enrayer la crise du crédit et
les pertes potentielles en termes de production et d'emploi.
Les tenants
de la théorie dominante, les économistes “mainstream” ne s'inquiéteront pas de la mise
en place d'une telle politique à condition que
l'“inflation” – qu’ils définissent comme un
changement dans l'indice des prix de consommation – demeure
“faible”.
Les tenants
de l’économie autrichienne, au contraire, considèrent non
seulement qu'une augmentation de la production de crédit et de monnaie
est inflationniste mais également que cette augmentation du
crédit financé par l'Etat et du nombre de billets en
circulation constitue le meilleur moyen d'aboutir à la catastrophe :
un tel processus ne peut que conduire qu’à la destruction de la
monnaie en question.
L'inflation
: les tenants de la théorie dominante contre les économistes
autrichiens
Tout part de
la façon dont vous définissez l'inflation. De nos jours,
l'inflation est communément définie comme une augmentation
constante et progressive du niveau des prix. Une telle définition
repose sur le “régime des indices” mis en place par Irving
Fisher (1867-1947). Selon cette définition, la stabilité du
niveau des prix est entendue comme une augmentation du niveau des prix
– généralement représentée par un index des
prix de consommation – inférieure ou approchant les 2% par an.
Si l'inflation demeure à un tel niveau, on considère que les
gens bénéficient d'une stabilité du niveau des prix.
Les
économistes proches de l'école autrichienne considèrent
qu'une telle définition est erronée et voient en elle une
manière délibérée de plonger le public dans la
confusion en ce qui concerne les forces en action dans l'érosion de la
valeur d'échange de la monnaie.
Les
économistes autrichiens insistent sur le fait que la monnaie est
essentiellement un moyen d'échange : dès lors, toute
augmentation ou toute diminution de la quantité de monnaie modifie la
valeur d'échange de la monnaie par rapport aux autres biens et
services.
Prenez, par
exemple, une économie au sein de laquelle le stock de monnaie demeure
constant. Afin de posséder davantage de monnaie, les acteurs du
marché doivent échanger des biens et des services contre cette
monnaie. Une augmentation de la quantité de produits susceptibles
d'être échangés contre de la monnaie va tendre à
réduire le prix de ces produits dans la mesure où le stock de
monnaie demeure constant.
Prenons
maintenant le cas d'une économie dont le stock de monnaie peut
être augmenté au moyen d'une expansion du crédit bancaire
– soit la caractéristique du fonctionnement des monopoles
gouvernementaux d'émission de monnaie qui dominent de nos jours. Dans
ce système, les acteurs du marché peuvent augmenter leur compte
bancaire au moyen de prêts accordés par des banques qui créent de la
monnaie. Cette demande supplémentaire financée par
l'augmentation du stock de monnaie conduit à diminuer la valeur
d'échange de la monnaie par rapport aux autres biens
échangeables.
C'est face
à une telle situation que Ludwig von Mises
définit l'inflation comme une augmentation de la quantité de
monnaie (et, par conséquent, la déflation comme la diminution
de la quantité de monnaie) et qu'il comprit que cette confusion
portant sur la nature même de l'inflation servirait l'inflationnisme :
Je cite Ludwig von
Mises :
« L'inflation [...] signifie
l'augmentation de la quantité de monnaie et des billets de banque en
circulation ainsi que l'augmentation des dépôts bancaires
garantis par des chèques.
Mais de nos jours, on parle
d'“inflation” en renvoyant au phénomène qui est la
conséquence inévitable de l'inflation : à savoir, la
tendance à l'augmentation de tous les prix et de tous les taux de salaire.
Le résultat de cette confusion déplorable est qu'il ne reste
aucun terme disponible pour désigner la cause de cette augmentation
des prix et des salaires. Il n'existe plus de mot susceptible de
désigner le phénomène que nous appelions jusqu'à
maintenant “inflation”. La conséquence de tout cela c'est
que plus personne ne se préoccupe de l'inflation au sens traditionnel
du terme. [1] »
[1] Mises,
L. v., "Inflation — An Unworkable
Fiscal Policy."
(…
à suivre)
Thorsten Polleit
Thorsten
Polleit est professeur honoraire à l’Ecole de Finance et de
Management de Frankfort
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