Les
députés de l’Assemblée nationale ont adopté
la semaine dernière la mesure sur les plus-values immobilières,
première du « plan de rigueur » visant à
réduire le déficit public à un moment où les
nuages s’amoncellent sur la Zone euro. La majorité a
réussi à obtenir du gouvernement qu'il lâche un peu de
lest sur ce nouveau point sensible. Le principe retenu était celui du
« 1/11 » : pour un milliards d’euros de
baisse de dépenses publiques, onze milliards d’euros
d’augmentation d’impôts, avec notamment une taxe sur les
boissons sucrées.
Jusqu'à présent, les
plus-values issues de la vente d’une résidence secondaire ou
d'un investissement locatif bénéficiaient d'un abattement de
10 % par an qui s'appliquait après cinq ans de détention,
soit une exonération totale au bout de quinze ans.
Cette mesure permettait à
l'État de bénéficier d'une rentrée d'argent
assurée et il semblerait que celui-ci ait voulu prolonger les
réjouissances : dans le cadre du plan d'austérité
présenté le 24 août, le gouvernement avait
décidé de supprimer tout abattement, et ce dès le
lendemain du vote.
Nul besoin d'être
médisant pour constater qu'il peut donc agir très rapidement
quand il s'agit de « réformer » une mesure
fiscale qui lui rapporte beaucoup : la plus-value, inflation déduite,
aurait alors été taxée à 32,5 %, quelle que
soit la durée de détention. Le rapporteur UMP du Budget Gilles
Carrez (auteur de la loi éponyme relative à la surface
privative) ainsi que de nombreux députés ont tout de suite réagi en qualifiant le projet
d'« inacceptable ».
Le gouvernement a
préféré trouver un compromis qui a été
adopté à l'Assemblée mardi 6 septembre. Les abattements
sont rétablis, avec une grille moins généreuse qu'auparavant :
2 % entre la sixième et quinzième année de
détention, 3 % entre la seizième et la
vingt-cinquième, 10 % au-delà de la
vingt-cinquième. Cela aboutira à un abattement de moitié
au bout de vingt-cinq ans et à une exonération totale au bout
de trente ans, soit une taxation deux fois plus importante qu'auparavant. Les
Français pourront encore « profiter » pendant
quelques mois des abattements de 10 %, le nouveau système ne
s'appliquant qu'aux actes de vente définitifs signés à
partir du 1er février 2012.
Valérie Pécresse,
ministre du Budget, estime que
cet arrangement devrait faire « perdre » à l’État 180
millions d'euros en 2011 et 195 millions en 2012 (sans expliquer pourquoi
le montant du seul mois de janvier 2012 excède celui des quatre
derniers mois de 2011 ensemble), ce qui revient à oublier que
l'absence de recettes n'est pas une perte. Afin de pallier ce que Bercy
considère comme un « manque à gagner »,
donc, les députés ont adopté la semaine dernière la
proposition de mettre fin au régime du bénéfice mondial
consolidé, qui permet de déduire des bénéfices
les pertes enregistrées par les filiales étrangères,
une niche fiscale dont bénéficient des entreprises comme Total
ou Vivendi.
Autre source de financement : la
mesure sur la quote-part sur les plus-values de cession de filiale
(aboutissant à une exonération de la plus-value à
90 % au lieu de 95 %) est avancée au 1er janvier 2012.
Enfin, tel qu’annoncé par François Fillon, un des
articles du projet de loi limite les reports en arrière et en avant de
déficit. Dès 2011, le report sur les bénéfices
antérieurs ne pourra se faire que sur un an (au lieu de trois). Le
report du déficit sur les bénéfices des années
suivantes sera plafonné (à 60 % du bénéfice
au-delà de 1 million d'euros).
Le
gouvernement a dû renoncer à relever la TVA sur les parcs
à thème. Pour compenser le « manque à gagner »
de 90 millions par an, Bercy et les députés ont
proposé de taxer à 2 % les chambres des hôtels
quatre et cinq étoiles. Une mesure sans aucun doute un peu
démagogique dans une optique de plan de communication axé sur
la taxation des « riches ». Un moyen aussi de faire
passer la pilule et d'éclipser un peu le débat sur le plan
d'aide à la Grèce, qui revient à faire contribuer de
force tous les Français, qu'ils aillent ou pas
dormir au Ritz après leur journée à Disneyland.
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