Alors que les
négociations autour de la restructuration de la dette en Grèce
occupent le devant de la scène, la situation d’autres pays
continue de se détériorer. C’est le cas du Portugal qui
après la Grèce et l’Irlande – a bénéficié
en mai 2011 d’un plan de sauvetage de 78 milliards d’euros.
Pas encore
sous le feu des projecteurs, la situation du Portugal est pourtant
préoccupante. En effet, en dépit des plans de rigueur et
mesures d’austérité, la situation de ses finances
publiques continuent de se détériorer.
Le taux
d’intérêt des obligations à 3 ans atteint des niveaux
quasi-prohibitifs, à plus de 24,5% (30 janvier 2012). Le coût de
la dette à 10 ans a grimpé à plus de 17% (voir Figure 1)
et le prix pour s’assurer contre la faillite du Portugal (les fameux
CDS ou credit default swaps – Figure 2)
touchent des niveaux record. Il coûterait dans ces conditions plus de
1,4 millions de dollars pour assurer 10 millions de dette portugaise pour une
période de 5 ans.
Figure 1 : Coût de
l’obligation portugaise à 10 ans en % (GSPT10YR)
Source :
Bloomberg.
Figure 2 :
Evolution du prix du CDS souverain portugais
Source :
Bloomberg.
Tout cela
indique que les investisseurs se méfient de plus en plus de la
situation du Portugal. Et ils ont raison.
Car selon les
dernières prévisions
de la Commission européenne, le PIB portugais devrait continuer
à se contracter cette année (-3%), le taux de chômage
pourrait monter à 13,6%, soit largement au-dessus des 12% relevés
en 2010. Sa dette devrait continuer à croître et atteindre 111%
du PIB en 2012 et 112,1% en 2013. Elle dépassera ainsi largement le
niveau de 90%, identifié comme critique par les économistes
Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff.
Du
côté du déficit, on ne peut malheureusement pas se
réjouir. En effet, si le niveau annoncé
se révèle inférieur à ce qui était
initialement prévu pour 2011 (4,5% du PIB contre 5,9%), c’est du fait de la
nationalisation des régimes de retraites privés de quatre
banques. Des actifs d’environ 5,6
milliards d’euros, soit environ de 3,3% du PIB, ont ainsi
été « saisis » et
« versés » sur les comptes de
l’État. Sans cette opération unique visant à
« habiller » les comptes publics – en pillant au
passage l’épargne des futurs retraités portugais –
le déficit aurait été largement supérieur aux
5,9% prévus.
Le
déficit de 2010 avait d’ailleurs aussi été
réduit de cette façon artificielle par la nationalisation de 3
régimes de retraites de Portugal Telecom. Le versement de ces
retraites est maintenant à la charge de l’État portugais
et cela ne manquera pas de peser sur ses finances publiques dans
l’avenir.
Soulignons que
Bruxelles n’a pas réagi face à ce type
d’opérations « trompe l’œil »,
alors qu’elle n’a pas manqué de le faire récemment dans
le cas de la Hongrie.
Dans un tel
contexte, il apparaît de plus en plus plausible que le pays soit
obligé de renégocier les conditions de son premier plan de
sauvetage, ou qu’il soit nécessaire de lui octroyer un
deuxième plan de sauvetage ou encore qu’une restructuration de
sa dette devienne incontournable. Cela signifierait de nouvelles pertes pour
les créditeurs de dette souveraine.
|