Il
avait déjà été souligné que les ouvertures
consenties par le gouvernement allemand étaient conditionnelles et
renvoyaient de fait à la Saint-Glinglin. Elles supposent une union
politique préalablement achevée tout en étant
promise pour plus tard. D’autres informations sortent qui confirment
que le dernier sommet était en trompe-l’œil et que les
marchés ne s’y sont pas trompés.
Ils
sont en train de perdre patience à propos du renflouement qui
s’éternise des banques espagnoles et exercent une pression
maximale : le taux espagnol à 10 ans a dépassé lundi
matin le seuil de 7 %. Et il va pourtant falloir attendre la prochaine
réunion de l’Eurogroupe du 20 juillet
pour connaître les conditions qui vont accompagner le versement des
fonds européens.
L’une
des deux grandes décisions du dernier sommet a été de
renflouer les banques sans passer par les États, afin de ne pas lier
davantage leurs endettements. Une résolution présentée
comme allant dénouer leurs dettes, mais se contentant en fait de ne
pas les nouer davantage. D’après un haut fonctionnaire
européen non identifié, cité par Reuters, les choses ne
seraient pas si simples : le MES pourrait injecter directement de
l’argent dans les banques, mais l’État concerné
devrait apporter sa garantie…
Ce
processus est par ailleurs devenu une course d’obstacle,
puisqu’il suppose réalisé le
nouveau dispositif de supervision des banques, première étape
de l’union bancaire. Mais la bataille fait rage pour savoir
quelles banques seront dans le périmètre de surveillance de la
BCE. À l’exception du gouvernement français, qui voudrait
l’élargir à toutes, les gouvernements cherchent à
continuer de couver leurs banques malades pour les protéger.
L’opération vérité n’est pas pour demain,
alors que la BCE voudrait en précipiter une, à sa
manière. Elle cherche à accélérer la mise en
route de cette nouvelle mission – qui ne va pas être
exercée dans le sens de la transparence – et claque par ailleurs
la porte aux gouvernements en confirmant que les achats d’obligations
sur le marché, c’est fini !
Cela
ne fait pas l’affaire de Mario Monti, qui rend coupables les pays du
Nord qui réclament des garanties en contrepartie de leur aide ou la Confindustria (l’organisation patronale italienne)
qui agite en interne le chiffon rouge de l’austérité : il
voudrait qu’un mécanisme, quel qu’il soit, contribue au
plus vite à détendre le marché obligataire. Car le
programme d’émission obligataire de l’année est
loin d’être réalisé et le coût du service de
la dette est en train de grimper. Sa quête est vaine. Son pays est pris
en tenailles entre une croissance qui n’exerce pas sa magie et le
coût d’une énorme dette qui continue d’augmenter.
La
seconde grande décision du sommet, l’activation des achats
obligataires par les fonds de soutien, reste elle aussi bloquée et
repoussée à plus tard, son financement n’étant pas
assuré.
L’attentisme
qui prévaut a ses conséquences dans toute la zone euro. Le
nouveau gouvernement grec voudrait brader tout ce qu’il possède
afin de faire rentrer de l’argent. Tous va y
passer, du moins s’il y a des preneurs. Il est reconnu que le
deuxième plan de sauvetage a déraillé et
qu’il va se révéler impossible de le remettre sur ses
rails. La phase de liquidation a commencé, car il va falloir trouver
une solution pour alimenter la trésorerie de l’État, si
le blocage des versements des prêts se poursuit. Prochaine
échéance : le 20 août, et c’est la BCE qui s’y
colle car il s’agit du remboursement d’une tranche d’obligations
qu’elle détient.
Mariano
Rajoy va annoncer mercredi racler
jusqu’à l’os les finances centrales et des régions,
afin de montrer sa bonne volonté et d’anticiper sur les
conditionnalités au soutien des banques espagnoles qui sont en cours
de négociation à Bruxelles. Il préfère endosser
de nouvelles mesures d’austérité plutôt que
d’apparaître devoir s’y plier, n’ayant comme seul
registre que d’agiter l’orgueil national. C’est à un
autre jeu de la même famille que joue Passos
Coelho, le premier ministre portugais. Il se refuse d’entamer la
négociation d’une rallonge du calendrier afin de repousser
à plus tard un impossible atterrissage prévu en 2013, tout en
sachant qu’il n’y coupera pas. Les Grecs sont pris entre les
mâchoires de tenailles, les Portugais entre les lames de ciseaux :
leurs recettes fiscales diminuent, leurs dépenses sociales
destinées à amortir le choc augmentent. Il n’y a pas de
salut.
Tout
à leurs jeux et à leurs préséances, les
dirigeants européens sont pris à leur propre piège et
tentent de s’en sortir à l’esbroufe. Incapables
d’enrayer la dynamique à laquelle ils ont contribué, eux
ou leurs prédécesseurs. La seule logique qu’ils
poursuivent, ou dont ils tentent d’arrondir les angles,
s’alimente de recettes néo-libérales auxquelles ils se
raccrochent. Elles ne font qu’aggraver le mal : pauvres d’eux et
pauvres de nous !
Billet
rédigé par François Leclerc
Son livre, Les
CHRONIQUES DE LA GRANDE PERDITION vient de
paraître
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