En
janvier, Doug Casey m’a avoué que la seule chose qu’il
craignait était que les banques centrales achètent beaucoup
d’or, puisqu’elles sont généralement des contre-indicateurs.
En effet, quand il en vient à acheter de l’or, les banques
centrales sont généralement tant aptes à choisir le
mauvais moment, c’est pourquoi l’on se moque souvent
d’elles en les qualifiant de ‘contre-indicateurs’.
[Je
n’apprécie pas de faire référence à
l’or en termes de tonnes plutôt qu’en termes d’onces.
Le prix de l’or est indiqué par once. Mais certains acteurs de
marchés, particulièrement les banques centrales,
déclarent leurs transactions en or en tonnes. Une tonne est
l’équivalent de 32.150,7 onces d’or.]
Et
récemment, les banques centrales ont littéralement
acheté des tonnes d’or. Je vous prierai de bien vouloir
considérer les points suivants :
- Les
achats nets des banques centrales excédaient 455 tonnes en 2011.
Il ne s’agissait là que de la seconde hausse de leurs achats
d’or depuis 1988 (la première ayant été
enregistrée en 2010) et la plus importante depuis 1964.
- La
Turquie a ajouté plus de 123 tonnes d’or à ses
réserves depuis le mois d’octobre dernier, et a
acheté 29,7 tonnes d’or au cours du seul mois
d’avril.
- Le
Mexique a acheté plus de 100 tonnes d’or depuis
février 2011.
- Les
Philippines ont ajouté 32 tonnes d’or à leurs
réserves en mars, leur deuxième plus important achat
d’or en un seul mois. En plus de ça, chose que nous ne
savons que très peu, le pays achète une partie de sa
production d’or domestique.
- La
Russie ne cesse d’acheter, et ajoutait 15,5 tonnes à ses
réserves d’or en mai. Ses réserves totales
s’élèvent désormais à 911,3 tonnes,
leur niveau le plus important depuis 1993.
- La
Thaïlande a augmenté ses réserves d’or de plus
de 80% depuis mi-2010.
- La
Corée du Sud a acheté 40 tonnes d’or depuis mai
2009, ce qui représente une hausse de 180% de ses réserves
totales.
- Selon
le Conseil Mondial de l’Or, les achats d’or des banques
centrales s’élevaient à un total de 80,8 tonnes pour
le premier quart de 2012, soit 7% de la demande globale.
- Au
cours de ces 12 derniers mois, leurs achats nets se sont
élevés à près de 20% de la production
annuelle totale.
Voici
un graphique qui présente à quoi ressemble cette situation
depuis le début de la crise financière en 2008 :
Les
banques centrales ont ajouté 1290 tonnes d’or à leurs
réserves depuis le quatrième quart de 2008. Ce total ne
comprend pas les achats de la Chine et des nations qui ne reportent pas
régulièrement leur activité, ainsi que des nations qui
achètent leur propre production domestique.
Cela
fait beaucoup d’or. Je me demande si tous ces achats ne peuvent pas en
fait représenter un plafond pour le prix de l’or. Après
tout, de nombreux analystes ont dit que l’or est dans une bulle, et que
son prix commencerait à baisser à partir de maintenant.
Pas si vite.
Comme c’est souvent le cas pour les rapports grand public, observer un
évènement sur le court terme mène souvent à des
conclusions erronées. Replaçons les achats d’or des
banques centrales dans leur contexte historique.
Malgré
les récents achats des banques centrales, leurs réserves
d’or sont bien inférieures à ce qu’elles
étaient en 1980. Il est clair que quelques années
d’achats nets ne sont pas suffisantes au développement
d’une bulle.
La
différence est plus grande encore que ce que vous pourriez vous
imaginer. Sachez que depuis 1980…
- La
population mondiale a augmenté de 55%.
- Les
réserves d’or mondiales ont augmenté de 120%.
- Les
réserves de devises étrangères ont augmenté
de 650% depuis 1995 et s’élèvent aujourd’hui
à 10,4 trillions de dollars.
Il
est donc évident que bien d’autres vagues d’achats seront
nécessaires avant que nous atteignons le ‘plafond’ du prix
de l’or.
Selon
moi, la tendance que suivent aujourd’hui les banques centrales devrait
se poursuivre, et il n’est pas difficile de comprendre pourquoi :
les banquiers centraux savent ce que signifient les vagues d’impression
monétaires telles que celles qu’entreprennent maintenant
Etats-Unis depuis 2008, même si l’inflation des prix n’est
pas visible immédiatement. Il n’est donc pas une surprise
qu’elles veuillent protéger leurs paris en ajoutant à
leurs réserves quelque chose qui a une valeur réelle. Le dollar
a été la devise internationale de référence
depuis la seconde guerre mondiale, mais les choses sont sur le point de
changer – et le fait que les banques centrales se tournent vers
l’or n’est qu’une facette de ce changement.
Le
monde entier commence à comprendre ce qui arrive aux devises
fiduciaires soutenues par rien. La crise de la dette s’intensifie en
Europe, et quelques pays parviennent désormais à gonfler leurs
devises plus que la Fed ne gonfle le dollar. Pas besoin d’être
Nostradamus pour comprendre cela… Bien que les banquiers centraux
puissent mentir au public, ils savent eux-mêmes à quel point
rien ne va plus.
Le
Conseil Mondial de l’Or est persuadé que les banques centrales
continueront d’acheter de l’or, et a récemment
transformé la structure de ses rapports : il a ajouté
‘achats du secteur officiel’ parmi les éléments de
la demande, et a éliminé la sous-partie ‘ventes du
secteur officiel’.
Bien
entendu, le prix de l’or finira un jour par atteindre son niveau
maximum. Doug Casey lui-même est persuadé qu’une bulle sur
l’or et les ressources qui y sont liées finira par
apparaître, courtoisie des trillions d’unités de devises
que les gouvernements auront créés dans une tentative
désespérée de mettre fin à la grande
Dépression.
Mais
nous n’en sommes pas encore là. Beaucoup d’eau coulera
sous les ponts avant que nous puissions légitimement parler de bulles
et de vente.
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