Mes chères contrariées, mes chers contrariens,
Lorsque je regarde mon Europe, notre Europe, je contemple un
rêve brisé.
Nos « pères » fondateurs ont
souhaité un rapprochement entre nos peuples afin d'éloigner la
barbarie et le spectre des guerres sanglantes qui dévastent notre
continent depuis plus de 2 000 ans.
Alors, après le traumatisme de la Seconde Guerre mondiale, nous
avons commencé, ensemble, nous les peuples d'Europe, la construction
d'un nouveau type de système politique.
L'Europe, pour ma génération, l'idée est belle,
pour les plus anciennes aussi d'ailleurs, surtout ceux qui ont connu les
affres de la guerre.
Au tout début, nous avons commencé petit à petit.
Modestement même. C'était juste une communauté autour du
charbon et de l'acier. Le charbon, nous n’en exploitons plus depuis
longtemps ; quant à l'acier, il n'y en a plus pour longtemps...
un peu comme pour l'Europe.
Le rêve européen, l'idéal de paix et d'harmonie se
fracassent depuis plusieurs années sur l'idée même de
représentativité et de démocratie.
Nous avons voté au référendum. Quand je dis nous, c'est la France collectivement. Le peuple peut
se tromper. Mais pour que la démocratie existe, il est
nécessaire que les « élites » acceptent
les choix des peuples souverains.
Dans les petits pays, l'Europe a fait revoter les peuples
jusqu'à ce qu'ils changent d'avis. En France, nous n'avons même
pas tenté « l'illusion » de la
démocratie, non. Nous avons fait plus simple :
nos gouvernants ont fait signer le Traité de Lisbonne qui reprenait
globalement les points précisément rejetés par les
peuples dont le nôtre. C'était en 2005.
Hélas, pour nous, peuple d'Europe, dès 2007 une crise
financière sans précédent dans l'histoire humaine a
frappé le monde et nous avec.
Nos États ont décidé de sauver les banques. Elles
n'ont pas été nationalisées avec perte sèche pour
les actionnaires, rassurez-vous. Nos gouvernants ont fait le choix de couvrir
les pertes des banques avec le budget des nations. Au final, nous, les
peuples d'Europe, nous devons payer pour sauver un système financier.
Ce n'est que cela la réalité des choses. Rien de plus,
rien de moins.
Dès lors, le système financier que nous avons
sauvé avec l'argent du « peuple d'Europe »
– mais c'est la même chose aux États-Unis – n'a plus
voulu nous prêter... puisque nous avions désormais trop de
dettes.
Alors, il a fallu que nos gouvernants coupent dans les dépenses
des États. Ces dépenses qui pour chacun de nous allaient de
soi.
Réveil difficile.
La Grèce s'enflamme, puis le Portugal, puis désormais
l'Espagne. Les peuples sont en colère contre l'Europe.
L'Europe ne les protège pas.
L'Europe ne les aide pas.
L'Europe ne les aime pas.
Le rêve européen, c'était le financement des
nouveaux entrants pour la mise à niveau. Le rêve
européen, c'était la liberté et la libre circulation des
hommes, c'était aussi la démocratie.
Or, que voyons-nous?
Hier, en Espagne, la Police s'est comportée comme dans une
dictature. Pas comme dans une démocratie. Il ne faut pas trop vous
montrer la réalité de la répression. Mais quelques
recherches sur Internet vous permettront de voir la vérité.
Il n'est pas utile de frapper les passagers d'un train. Il n'est pas
utile de poursuivre et de matraquer des gosses sur des quais de métro.
Il n'est pas utile de tabasser des femmes. Il n'est pas utile de
déchaîner autant de violence contre son propre peuple.
Voilà l'Europe que je vois désormais.
Je ne veux pas de cette Europe-là. Je ne veux pas de la
dictature des marchés, de la finance et de la Commission de Bruxelles.
L'Europe n'a aucune légitimité démocratique. Elle
ne peut pas et ne doit pas être notre Europe.
Il ne s'agit même plus de savoir si les pays riches doivent
payer pour les pays pauvres.
Il ne s'agit plus de savoir si nous devons créer une Union
bancaire ou pas.
Il ne s'agit plus de savoir si nous devons accroître ou pas le
MES, ou le FESF ou quel que soit le futur machin qui sera créé.
Le véritable enjeu est celui de la liberté et de la
démocratie.
Si l'Europe n'est pas la garante de ces deux idées, si l'Europe
n'est plus la liberté, si l'Europe n'est plus la démocratie, si
l'Europe frappe les peuples et les soumet au lieu de les aider, alors le
rêve européen est brisé.
J'aime l'Europe. Pas celle de l'austérité et de la
souffrance.
Cette Europe-là, je ne la veux pas.
Le libéralisme, c'est la responsabilité. Une banque qui
fait faillite... doit faire faillite. Cela s'appelle l’aléa
moral. Nous avons privatisé les bénéfices et les
profits. Nous avons socialisé les pertes.
C'est une honte démocratique. C'est une honte
économique.
On peut sauver les dépôts bancaires, sans sauver les
banquiers ou les actionnaires.
Combien de banquiers en prison ?
Combien de banques démantelées ?
Combien de pays ont-ils séparé 5 ans après la
crise – 5 ans !! – les banques d'affaires des banques de
dépôts ou de détail ?
Combien de pays ont-ils légiféré sur le trading haute fréquence, où au moment
où nous parlons plus de 60 % des transactions sur les marchés
sont effectuées par des ordinateurs, sans intervention humaine ?
Combien de bonus et de parachutes dorés ont été
supprimés ?
Où est la « moralisation » du
système ?
Où est la mise au pas de la finance qui doit être un
outil au service de l'économie et pas l'inverse ?
Après cinq ans de crise, qu'est-ce qui a changé ?
Une chose. Les polices d'Europe frappent les peuples d'Europe qui
refusent de se soumettre au diktat d'une Europe qui ne les représente
pas.
Dans l'histoire humaine, lorsqu'une structure politique en arrive
à ce genre d'extrémité, c'en est fini. Cela peut mettre
du temps, mais toutes les dictatures finissent pas s'effondrer. Même
l'URSS!
Le rêve européen s'est brisé. C'est triste pour la
belle idée de nos pères fondateurs.
Mais la fin de cette Europe sera une bonne nouvelle pour les peuples.
Charles SANNAT
Note : vous
pouvez visionner cette vidéo accessible à l'adresse suivante :
http://www.youtube.com/watch?v=UDCRgqspmyU&feature=plcp
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