Des rats déformés par des tumeurs, du sang d’orang outan sur les mains ou des bébés le
biberon dans la bouche, autant d’images qui doivent nous faire renoncer
ici et maintenant aux OGM, à l’huile de palme ou au
Bisphénol A. Alors que le
Sénat a décidé d’en suspendre la fabrication,
l’importation et l’exportation dans les plastiques et contenants
alimentaires, et propose d’élargir la loi aux matériaux
médicaux, il est temps de réaliser que le risque du principe de
précaution est en train de se réaliser. Son application devient
déraisonnable et plutôt que de surmonter notre peur, on nous
invite à y succomber.
La peur est saine et permet d’adopter des comportements prudents
et responsables. Les peurs alimentaires sont ainsi le pendant d’un
souci bien français de manger sainement et équilibré.
N’est-il pas raisonnable de s’intéresser à ce
qu’on a dans son assiette et de s’informer sur la fabrication des
produits qu’on mange ? Le problème dans notre
société n’est pas que les gens aient des peurs mais
plutôt que tout est fait pour les alimenter et qu’elles
deviennent dès lors la boussole des politiques publiques.
Or, la peur peut-être mauvaise conseillère et si on
refuse de la vaincre, on devient vite l’objet des manipulations des uns
et des autres, aussi bien intentionnés soient-ils. Ainsi, en
France où la culture des Organismes génétiquement
modifiés (OGM) reste interdite, il a suffi d’une étude
portant spécifiquement sur le maïs NK603 de Monsanto pour que les
ministres de la santé (Marisol Touraine), de
l’environnement (Delphine Batho) et de
l’agriculture (Stéphane le Fol) demandent un contrôle plus
strict des OGM dans leur ensemble.
De même, les campagnes sensationnalistes de Greenpeace ou des Amis
de la Terre sur l’huile de palme ont jeté l’opprobre sur
une huile qu’il y a encore quelques années, on ne trouvait que
dans les magasins bio.
Quant au bisphénol A, la peur d’un nouveau scandale a
sans doute poussé les instances politiques françaises à
accélérer l’adoption d’une loi en interdisant
l’usage alors que le processus de réévaluation des
études commence à peine.
Sous la pression de peurs poussées à leur
paroxysme, le processus politique
s’emballe et multiplie les interdictions qui n’offrent
qu’une solution simpliste à des problèmes complexes, pas
prêts de disparaître.
Les OGM, par exemple, ont des applications dans des domaines aussi
divers que la médecine, l’alimentation, l’industrie.
L’insuline génétiquement modifiée sauve et
améliore la vie de milliers de diabétiques. Amflora
(pomme de terre GM) permet de faire des colles et des bétons de
meilleure qualité tout en économisant les ressources
nécessaires à la cultiver. Les gains de productivité
réalisés par la culture de variétés GM offrent
des solutions à la faim dans le monde et permettent
d’économiser des terres arables.
Que dire de l’huile de palme ? On lui reproche
d’entraîner la déforestation et la biodiversité qui
l’accompagne mais on oublie aussi que les rendements du palmier
à huile sont plus élevés que ceux du colza ou du soja.
Il produit ainsi en moyenne 3,72 tonnes/hectare d’huile, à
rapporter aux 0,40 tonnes du soja et 0,72 tonnes de colza. On obtient donc
près de 10 fois plus de matière grasse par hectare d’un
palmier à huile que du soja, et plus de 5 fois plus que du colza.
C’est une autre façon de comprendre qu’en le cultivant, on
économise des terres arables.
Et le bisphénol A ? N’est-il pas devenu
évident qu’il faut l’interdire ? Oui, si on se laisse
aller à la peur de ses possibles effets nocifs pour la santé.
Pas sûr si on prend en compte l’ensemble du problème posé,
à savoir qu’il faut un produit chimique pour assurer la
conservation de nos aliments sans quoi on se retrouve face au risque
d’être contaminé par toutes sortes de bactéries ou
de devoir accepter des substituts au sujet desquels on n’a pour le coup
mois de recul.
Ainsi, de la même façon qu’il est
déraisonnable de penser que ces produits sont sans danger, il est tout
aussi dangereux de croire qu’ils sont nocifs quand les preuves manquent
pour le faire et qu’on oublie les bienfaits de leur utilisation. Si on
continue dans cette direction, on se retrouvera forcément
démunis face aux problèmes complexes que sont l’alimentation,
la santé et l’environnement en général.
Nos modes de vie dépendent d’innovations que plus
personne n’aura intérêt à développer si
plutôt que de tenir les producteurs responsables des innovations
qu’ils inventent, on leur interdit simplement de les exploiter et in
fine de les développer.
Alors plutôt que de continuer à
répondre aux sirènes des alarmistes, il est grand temps de
soigner nos peurs par une autre médecine que celle du principe de
précaution et refuser
cette solution simpliste.
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