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Les tests de
résistance des banques sont devenus un outil de routine pour les
superviseurs bancaires. Ils consistent à estimer, sous un ensemble
d'hypothèses relatives à l'environnement macroéconomique
anticipé, les besoins en capitaux propres d'une banque sur les trois
années à venir. Après comparaison de ces besoins avec
les fonds propres existants, les superviseurs imposent à la banque de
lever les fonds nécessaires afin de combler la différence, s'il
en est une. Cette mesure de contrôle prudentiel de la résistance
des banques aux chocs futurs contribue-t-elle véritablement à
la stabilité financière? Ou est-ce plutôt un exemple de
dirigisme économique, dont il nous faudra examiner les
conséquences cachées?
Le rôle
des capitaux d'une banque est d'amortir les chocs liés aux variations
de valeur de ses actifs, principalement des prêts bilatéraux aux
entreprises et aux ménages et des obligations marchandes émises
par les États et les entreprises. Le niveau des capitaux est donc
variable. Les gains sur les actifs, y compris les revenus courants
liés aux intérêts sur les prêts et obligations,
augmentent les capitaux propres. A contrario, les pertes les diminuent.
Cette
possibilité d'érosion, partielle ou totale, des capitaux
propres pose tout naturellement la question de leur « bon »
niveau. Combien de capitaux propres une banque devrait-elle avoir? C'est
précisément cette question que les tests de résistance
des banques se proposent d'éclairer. Leur réponse consiste
à dire qu'une banque doit avoir assez de capitaux pour qu'à la
suite des pertes attendues sur les trois années à venir, les
capitaux propres représentent au minimum 6% de ces actifs
pondérés au risque. Pour en comprendre les
répercussions, essayons d'imaginer comment cette problématique
serait adressée sur un marché libre.
Sur le
marché, personne n'aurait la prétention de connaître ni
l'environnement macroéconomique futur ni la profitabilité
attendue des banques sur les trois années à venir. Les
propriétaires d'une banque essaieraient plutôt d'éviter
la perte de confiance de leurs clients et la faillite en suivant des
règles de conduite éprouvées par le temps. C'est la
hausse du coût de ses emprunts, ou de l'intérêt qu'elle
doit payer pour attirer des dépôts qui servent de signal. Ils
indiqueraient que l’activité
de la banque commence à être jugée plus risquée,
et que par conséquent elle devrait lever plus de fonds. En un mot,
c'est le système des prix qui déterminerait le bon niveau de
capitaux.
Les tests de
résistance font fi du système de prix qu'ils remplacent par une
approche administrative de la gestion bancaire. Des personnes externes
à la banque calculent les besoins en capitaux, sans y être ni créditeurs, ni déposants,
ni propriétaires, et avoir
un intérêt personnel à la santé de
l'établissement financier. Elles sont certes expertes mais ne risquent jamais leur
propriété dans leur calcul. Cette prétention de
connaissance suprême mise à part, une telle approche administrative
contribue à la collectivisation du système financier.
Premièrement,
en imposant à la banque un montant particulier de fonds propres, les
superviseurs imposent, de fait, un prix minimum sur les actifs de
l'établissement. Cette imposition est sans importance pour les banques
qui passent le test, et qui n'ont donc pas besoin de lever des fonds
supplémentaires. Pour ces banques, les investisseurs
considèrent que la valeur de marché de leurs actifs est
supérieure au prix minimum décrété de fait par
les superviseurs. Les choses se corsent pour les établissements qui ne
passent pas le test. En effet, ces banques n'ont pas de chance d'attirer des
investisseurs privés qui y auraient déjà pris des
positions s'ils anticipaient qu'ils pouvaient en profiter. En imposant
à la banque de lever des fonds supplémentaires, le superviseur
décrète un prix minimum de ces actifs au-dessus de leur valeur
de marché. Comme le plan d'augmentation du capital est voué
à l'échec, l'État doit intervenir pour combler la
différence, et nationaliser partiellement ou totalement la banque. Sa
gestion, et sa restructuration, lui incombe dorénavant.
Deuxièmement,
ce mode opératoire empêche la restructuration de la banque, et
conduit par conséquent à des malinvestissements
futurs. Sur le marché, où chaque investissement n'est qu'une
question de bon prix pour le bon risque, ce sont les nouveaux investisseurs
qui imposeraient la restructuration voulue, et nécessaire, aux
activités de la banque. Dans le pire des cas où la banque se
serait retrouvée avec des capitaux négatifs, ils demanderaient,
pour et avant d'investir, que les créditeurs et déposants
s'associent à l'effort de redressement en renonçant à
une partie de leur créance sur la banque, ce qui permettrait de
combler le trou négatif. Une fois sous tutelle de l'État, une
telle restructuration de fond en comble n'est plus nécessaire, et la
participation des créanciers n'a plus de raison d'être. Le
gouvernement, tant que sa propre condition financière n’est pas
en jeu, peut financer la banque par
des impôts, et prolonger et ralentir le processus de restructuration.
Au fonds, les
tests de résistance des banques ne sont donc qu'un prétexte
à la nationalisation des banques en difficultés et à la
mutualisation forcée de leurs pertes par tous les contribuables,
qu'ils en soient créditeurs ou non. Plutôt que d'assurer la
stabilité financière, ces tests sont un outil de l'intervention
étatique qui a pour but de maintenir en vie des établissements
financiers qui devraient être fermés.
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