Depuis le samedi 12 janvier 2012, la France
est en guerre. En guerre contre les bataillons islamistes du Sahel qui
essaient de prendre le pouvoir au Mali. La question de
l’opportunité de la participation de la France à ce
conflit est épineuse, en ce qu’elle pose en
réalité la question de la souveraineté des peuples et de
leur liberté à disposer d’eux-mêmes, ou de la vocation
de la France à revenir faire la police au Soudan français.
Certains commentateurs soupçonnent
François Hollande d’essayer de se dégager de la zone de
turbulence qu’il traverse en utilisant ce conflit comme diversion, et
pour refaire une santé à l’union nationale de sa France
réconciliée avant le printemps. L’Histoire le dira, mais
elle nous a malheureusement déjà montré que la guerre a
déjà pu servir de variable d'ajustement de la politique
intérieure.
D’autres voient déjà
dans ce conflit la possibilité d’un rebond économique,
car, c’est bien connu, « une bonne guerre, ça relance
toujours l’économie ». Et d’aucuns de citer la
guerre des Malouines, coup d’accélérateur supposé
de l’économie britannique en 1982.
L’explication est séduisante,
mais absolument fausse. Le seul coup d’accélérateur
qu'ait connu le Royaume-Uni au début des années 80 est celui
des réformes engagées par Margaret Thatcher alors Premier
ministre, consistant d’ailleurs en un coup de frein sur la
dépense publique, sur la pression fiscale, et en une politique de
privatisation, de maîtrise de l’inflation, et
d’affaiblissement du pouvoir syndical.
Pour le reste, comme pour tous les conflits,
le bilan économique est celui d’une destruction de richesse. Et
ce n’est ni la fabrication des fusils, ni la reconstruction des villes
qui ont un jour enrichi un pays. Cette idée reviendrait un peu
à penser que les pertes humaines des guerres sont une bonne
opération pour la démographie, ou qu'un tailleur s'enrichit en
brûlant ses costumes.
L’analyse la plus pertinente à
ce sujet reste celle de Frédéric Bastiat avec la fable de la
vitre cassée, qui indique que ce que l’on voit (la
réparation de la vitre) cache ce que l’on ne voit pas (ce que
nous aurions pu faire avec l’argent qui a servi à réparer
la vitre). La simplicité du raisonnement est en réalité
un point fondamental permettant de comprendre de l'erreur économique
du keynésianisme et de la relance en général. Il conclut
ainsi : « la société perd la valeur des objets
inutilement détruits, » et avec cet aphorisme : «
Casser, briser, dissiper, ce n'est pas encourager le travail national,
» ou plus brièvement: « destruction n'est pas profit.
»
Cette démonstration n'est pas un
argumentaire de justification de l'inaction militaire au Mali, mais replace
le débat de la « rentabilité de la
guerre » à sa juste place : celle d'un coût qui
pèsera inévitablement sur l'économie française.
La question de la légitimité et du bien
fondé de l'intervention française dans un conflit qui
s'apparente à une guerre civile est d'une autre nature, et ne saurait
trouver de justification dans un soi-disant « retour sur
investissement » ou une quelconque destruction créatrice.
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