La
fiscalité française se durcit à l’intérieur
des frontières de l’Hexagone, mais aussi à
l’extérieur. L’idée selon laquelle il faudrait lier
l’impôt à la nationalité fait son chemin.
L’un des artisans de cette fiscalité est un député
socialiste de 47 ans, élu du Cher, ancien avocat de SOS Racisme,
spécialiste du droit du travail défendant les ouvriers du Cher
contre les patrons : Yann Galut. Mais depuis
peu, ce député est aussi le président de la Commission
contre l’exil fiscal, créée à
l’Assemblée nationale avec comme mission
« d’envisager des solutions efficaces et pérennes
pour limiter l’exil fiscal ».
C’est
que le nombre de départs s’est accru ces derniers mois. On a
parlé de 5000 départs depuis l’élection de
François Hollande. Celui qui voulait « réenchanter
le rêve français », selon ses dires, n’a fait
que désenchanter toute cette partie de la population qui voulait
simplement travailler et vivre de son argent. Était-ce un rêve
inaccessible ?
Les mesures
fiscales de plus en plus contraignantes, les augmentations
d’impôts, les politiques d’aide sociale n’ont fait
que transformer l’entrepreneuriat français en vache à
lait. Pour échapper au cauchemar, nombreux sont ceux qui pensent
à partir, qui prennent des renseignements pour identifier les havres
fiscaux en Europe et au-delà. Ne nous trompons pas : il ne
s’agit pas d’évasion fiscale, mais de pouvoir jouir du
produit de son travail.
Yann Galut et ses acolytes de la Commission contre
l’exil fiscal nomment ces Français les
« expatriés fiscaux ». Essentiellement des
entrepreneurs, leur départ signifie une perte d’argent pour l’État.
La réaction du gouvernement est classique : au lieu de penser en
termes de liberté et de se demander pourquoi ces Français
partent, il pense en termes de contrainte et veut continuer à les
taxer hors de France. Yann Galut, pourtant assez
jeune, devient un symbole de cette vielle idéologie étatique.
Et il voudrait
faire croire aux contribuables expatriés qu’il n’agit
qu’au nom de la solidarité nationale, de la
générosité : « il ne s’agit pas de
pénaliser globalement les expatriés fiscaux d’autant que
certains d’entre eux quittent la France pour des raisons familiales,
mais bien de demander à chaque
citoyen français – les exilés fiscaux y compris –
une juste contribution à l’effort national de redressement de
nos comptes publics ».
Tout cela
n’est qu’une rhétorique politicienne à laquelle il
ne faut pas prêter attention. L’analyse doit être faite de
comme on analyserait un business : sur les base des faits. Les voici
à travers les mots de Yann Galut.
Premier fait : la motivation de l’État. « L’évasion fiscale représente en effet entre 30 et
80 milliards de manque à gagner pour la France, une somme
considérable quand on la compare aux quelques 50 milliards
d’euros d’intérêts annuels de la dette
française. » Les socialistes cherchent de
l’argent. Or, ceux qui partent sont ceux qui créent les
richesses ou qui ont déjà un patrimoine appréciable. Ne
restent au pays que les salariés de la classe moyenne et les
assistés : les taxer encore plus ne rapportera plus grand-chose.
Il faut donc poursuivre ceux qui s’en vont, détenteurs des
vraies richesses.
Deuxième fait : durcir ce
qui existe déjà.
« Élargir
l’assiette de l’Exit Tax qui impose les
exilés fiscaux français sur les plus-values qu’ils
réalisent à l’occasion d’une vente
d’entreprise par exemple. »
Troisième fait :
créer un nouvel impôt lié à la nationalité. « Belgique, Russie, Suisse ou Royaume-Uni… quelle que soit la
destination des exilés fiscaux, des pistes de réflexion existent
à l’instar de ce qui se pratique en Allemagne, en Espagne, au
Portugal, en Italie : les contribuables de ces États qui
s’expatrient continuent en effet à payer leurs impôts
pendant quelques années dans leurs pays d’origine. »
Cet impôt serait temporaire
dans un premier temps, durerait quelques années, mais en France le
temporaire devient permanent, alors ne soyons pas dupes : c’est
bien le principe de lier l’impôt à la nationalité
qui est sur la table.
Quatrième fait : la
proposition de loi. « Rien n’interdit à ce que nous
fassions des propositions de loi en ce sens dès le mois de mai
prochain. »
Concrètement, si cet échéancier est
respecté, cela veut dire une ou plusieurs propositions de lois déposées
à l’Assemblée nationale. Ces lois pourront soit être
votées à l’été et applicables
d’urgence dès le quatrième trimestre 2013, à
l’instar de l’impôt exceptionnel qu’ont subi les
contribuables soumis à l’ISF en octobre dernier, soit être incluses dans le projet de
loi de finances 2014 pour être votées en décembre et
applicable au 1er janvier prochain.
L’État
est déterminé. C’est un nouveau coup porté
à l’entreprenariat français puisque un tel projet risque
d’accélérer les départs. Voici pourquoi : aucune
loi ne pouvant être rétroactive, ceux qui veulent partir –
les entrepreneurs, les retraités, les cadres supérieurs - doivent
le faire maintenant, avant le vote. Ainsi ils ne tomberont pas sous le coup
de la loi, ce qui sera le cas de ceux qui partiront après sa
promulgation.
Yann Galut et le gouvernement qu’il représente peuvent
bien parler de « solidarité nationale et de justice
fiscale », cela ne changera pas grand-chose : plus ils en
parlent, moins on en veut.
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