Mes chères contrariées, mes chers contrariens
!
Avant de vous parler du fort mouvement de hausse concernant les taux
d’intérêt dans le monde, je voulais juste revenir sur la
baisse de l’or de la fin de la semaine dernière. Quelques jours
après – il faut toujours un peu de temps pour que ces
informations arrivent jusqu’à nous –, nous avons appris
que les appels de marge avaient encore été augmentés,
obligeant un certain nombre d’investisseurs à découvert
à couper tout ou partie de leur position, ce qui entraîne
toujours mécaniquement un afflux d’ordres ce qui pèse sur
le cours de l’or.
Évidemment, ce n’est pas la seule mauvaise nouvelle pour
l’or (à court terme j’entends), ni pour les actions quelle
que soit leur place de cotation, ni pour les obligations !
La mauvaise
nouvelle ? Les taux explosent à la hausse !
Avant de commencer à disserter sur ce sujet essentiel, voici
quelques chiffres juste pour illustrer ce mouvement
massif de hausse des taux :
- Emprunt à 10 ans USA 2,62 % à ce jour contre un plus
bas dans la dernière année de 1,38 % ;
- Emprunt à 10 ans France 2,45 % à ce jour contre un
plus bas dans la dernière année de 1,65 % ;
- Emprunt à 10 ans Allemagne 1,82 % à ce jour contre un
plus bas dans la dernière année de 1,13 % ;
- Emprunt à 10 ans Italie 4,82 % à ce jour contre un
plus bas dans la dernière année de 3,64 % ;
- Emprunt à 10 ans Espagne 5,05 % à ce jour contre un
plus bas dans la dernière année de 3,94 %.
Plusieurs
constats peuvent être tirés à l’appui de ces
quelques exemples chiffrés :
1/ La France, qui est un pays en faillite, reste tout de même
moins considérée comme un pays en faillite que les
États-Unis d’Amérique puisque les USA empruntent plus
cher que la France. Cela ne nous sera d’aucune utilité pour le
reste des événements et pour le futur, mais en attendant
ça fait toujours plaisir !
2/ L’Espagne et L’Italie se rapprochent dangereusement,
malgré le silence assourdissant des médias et de notre
Président – pour qui je le rappelle la crise est finie –,
d’un niveau de taux insupportable nécessitant l’activation
des mécanismes d’aides européens.
Pour mémoire, n’oubliez pas le principe magique qui
préside au fonctionnement de ces machins européens. Ce sont des
pays surendettés qui empruntent de l’argent qu’ils
n’ont pas pour le redonner à des pays carrément en
faillite.
3/ C’est en Allemagne que les taux montent le moins, ce qui
signifie pour les marchés et les « zinvestisseurs
» que c’est ce pays qui a le moins de
chance de faire faillite. La différence commence à devenir
très conséquente avec les taux français mais encore plus
avec les taux américains !
Les effets
d’une hausse des taux d’intérêt !
Maintenant, essayons de débroussailler un peu tout cela et voir
où ça peut nous mener par la suite. Je vous propose de lister
les principaux effets secondaires d’une hausse des taux. Cette liste
n’est pas exhaustive, mais vous aurez une bonne idée de ce qui va
arriver si ce mouvement se poursuit.
Lorsque les taux augmentent, l’argent emprunté par les
agents économiques devient plus cher. Un crédit immobilier
devient beaucoup plus cher (actuellement ils sont au plus bas et ceux parmi
vous qui n’auraient pas encore renégocié leur prêt
immobilier sur 30 ans ont intérêt à courir à la
banque et vite). Logiquement, la capacité d’emprunt des
acquéreurs va diminuer d’autant. Le marché immobilier
risque donc de s’effondrer puisqu’il a une très forte
sensibilité aux taux d’intérêt.
Si le marché immobilier a autant monté ces
dernières années, c’est parce que les prix au
départ de la bulle il y a 13 ans étaient bas et que les taux
étaient en baisse. Avec des prix très hauts (comme
actuellement) et des taux qui montent, vous aurez un krach immobilier.
Si l’immobilier s’effondre, les banques qui financent ces
acquisitions – puisque 97 % des achats donnent lieu à un
crédit – vont connaître quelques difficultés.
Regardez ce qu’il se passe pour les banques espagnoles…
Il ne faut pas oublier non plus que le marché immobilier
américain est convalescent et qu’il se remet difficilement de la
précédente… hausse des taux d’intérêt
de 2007 !
Mais il n’y a pas que le crédit immobilier qui va
augmenter. Ce même phénomène se produira pour les
entreprises qui financent leurs investissements à crédit.
Imaginez une société qui peut avoir du crédit à 3
% et une machine à acheter qui va lui rapporter du 6 %... Elle peut
encore faire l’investissement car c’est rentable. Mais si son
taux d’emprunt passe à 6 %... alors son investissement ne lui
rapportera plus rien. Elle n’a plus aucun intérêt à
investir… ni à recruter.
Des taux en hausse sur une économie fragile, c’est la
certitude de faire rentrer un pays en récession. Léger
problème : nous sommes déjà en récession. Si les
taux montent encore, cela ne fera qu’aggraver les choses.
Enfin, vous aurez la même logique à l’œuvre
pour tous les crédits à la consommation qui vont devenir plus
onéreux. Résultat ? Les consommateurs dépenseront moins,
moins de consommation = moins de production = encore plus de récession
et de chômage.
Voilà pour les aspects crédits, mais ce n’est pas
tout. Des taux d’intérêt en forte hausse vont directement
influer sur d’autres grands paramètres comme les actions, les
obligations, l’or, la capacité de financement des
États… Et les banques !
Les actions :
Pour gagner de l’argent en Bourse, il n’y a que deux
possibilités. Soit le titre monte, soit les dividendes versés
finissent par vous rapporter plus que le prix payé pour
l’action… Par nature, les actions sont risquées et
volatiles. Pourquoi prendre le risque de devenir actionnaire d’une
entreprise si vous pouvez placer « sans risque » (ça
c’est la théorie car ce n’est évidemment plus vrai,
mais tout continue comme avant…) sur des obligations
d’États dont le rendement est en hausse ?
Résultat ? Lorsque les taux montent, traditionnellement les
investisseurs se détournent totalement des marchés boursiers
pour tout placer en obligations d’États. Les marchés
boursiers s’effondrent. C’est exactement ce qui se passe
aujourd’hui. Les marchés actions comme le marché
immobilier sont très sensibles aux taux. Disons simplement que le
marché boursier réagit beaucoup plus vite (presque
instantanément) que le marché immobilier.
Les obligations :
Une remontée trop forte des taux d’intérêt
peut entraîner un krach obligataire (toujours très douloureux),
puisque que toutes les obligations achetées il y 1 an à 1,38 %
ne rapportent plus rien par rapport aux obligations émises
aujourd’hui ou qui seront émises demain.
Souvenez-vous du tableau plus haut : « Emprunt à 10 ans
USA 2,62 % à ce jour contre un plus bas dans la dernière
année de 1,38 %. »
Résultat ? Le cours des obligations s’effondre. Or encore
une fois, souvenez-vous de l’édito d’hier dans lequel je
vous montrais que les fonds propres de BNP Paribas (qui n’est
qu’un exemple car c’est la même chose pour toutes les
banques) étaient investis en obligations d’État à
100 % ! Si les obligations perdent 30 %, cela veut dire que la banque perd 30
% de ses fonds propres… Au sens des règles prudentielles, elle
est déjà en faillite et doit se recapitaliser
d’urgence… Il n’y aura aucun investisseur pour le faire.
Les États devront donc payer… ou les banques faire
faillite… à ce moment-là, ce sont les épargnants
qui paieront… En perdant leur sous !
L’or:
Logiquement, l’or ne rapporte rien, comme vous le savez tous. Si
les taux montent et que l’avenir d’une monnaie semble
assuré, il n’y a plus aucune raison de détenir de
l’or… Sauf qu’il ne faut pas oublier que ce raisonnement
est valable… lorsque lesdits États ne sont pas
surendettés ni en pleine récession – pour ne pas parler
de déflation et pour éviter de vous faire peur avec le
mot…. DÉPRESSION !!
L’or va donc probablement baisser gentiment au fur et à
mesure que les taux montent jusqu’à ce que les zinvestisseurs finissent par admettre qu’à
ce rythme, les banques vont s’effondrer, les États vont
s’effondrer, et que l’économie toute entière va
s’effondrer… sauf… l’or ! À ce moment-là,
ils comprendront que l’or ne protège pas seulement de
l’inflation mais également de l’insolvabilité !
Capacité de financement des États
et des banques:
Justement à propos d’insolvabilité, et nous
touchons là le nœud du problème de la montée
très forte des taux d’intérêt.
Vous avez normalement, à ce stade de la démonstration,
compris à quel point une montée des taux allait être
ravageuse pour les banques. Leurs fonds propres sont investis en obligations
d’États qui vont perdre de la valeur en raison de l’augmentation
des taux. Les banques ne se prêteront plus entres elles ou à des
taux prohibitifs. On assistera à un nouveau gel du marché
interbancaire. C’est exactement ce qui s'est passé en 2008 avec
la faillite d’une seule banque… Lehman Brothers ! Ce sera un bis repitita,
encore plus grave puisqu’il ne serait plus possible
d’après les dernières déclarations de Ben Bernanke le mamamouchi en chef de la planche à
billets américaine… justement d’imprimer autant de monnaie
que nécessaire.
Concernant les États, le processus est également assez
simple. On va résumer et simplifier les choses de la façon
suivante.
Soit le PIB de la France 2 000 milliards d’euros.
Soit la dette de la France (bientôt 100 % du PIB, ce n’est
qu’une question de temps) 2 000 milliards d’euros.
Soit le plus gros budget de l’état 60 milliards
d’euros pour l’Éducation nationale !
Soit un taux d’intérêt d’emprunt de 2,5 %
(actuellement) et vous obtenez un coût des intérêts de la
dette de 2,5 % de 2 000 milliards soit environ 50 milliards d’euros
à sortir chaque année.
Soit un taux moyen qui passerait à 5 % (comme c’est le
cas en Espagne actuellement, voir tableau en haut de ce texte) et les
intérêts de la dette s’élèveront à
100 milliards d’euros chaque année… sur un budget total de
380 milliards d’euros (côté recettes).
Résultat ? Game Over ! System Failure. Faillite ! The End…
Alors que
penser de tout ça ?
Économiquement parlant, et quoi qu’en dise Ben Bernanke et la FED, la raison pour laquelle du Japon au
Royaume-Uni en passant par les USA tout le monde imprime autant de billets que
possible, c’est justement pour maintenir les taux
d’intérêt au plus bas et de sauver le marché
immobilier, le marché du crédit à la consommation, les
bilans des banques et permettre aux États de faire face à leurs
dettes… Enfin aux intérêts de celles-ci. Au bout du
compte, c’est la seule façon de sauver l’économie
en tout cas à court terme, à défaut de sauver la monnaie
!
Annoncer l’arrêt des injections de monnaie revient
à dire aux marchés que les taux peuvent reprendre leur niveaux naturel. Mais le niveau naturel sera
très élevé dans la mesure où il n’y a plus
beaucoup d’épargne disponible par rapport à des besoins
de financement des États qui n’ont jamais été
aussi grands, auxquels il convient d’ajouter une prime de risque
liée à des niveaux de dettes/PIB records partout à
travers la planète.
Résultat : si les autorités monétaires laissent
monter les taux… les taux vont monter. Beaucoup. Précipitant
l’ensemble du monde dans l'insolvabilité. C’est une
évidence. C’est tellement une évidence qu’encore
une fois c’est la raison pour laquelle nous avons fait l’inverse
jusqu’à présent.
Alors de deux choses l’une. Soit cette annonce de
l’arrêt des quantitative easing est une
intox destinée à gagner du temps (c’est ce que je pense,
comme Trichet en 2011 qui a augmenté les taux en indiquant qu’il
allait poursuivre le mouvement de hausse pour lutter contre
l’inflation), soit les autorités monétaires ont
décidé que l’effondrement économique du monde entier
ne devait plus être retardé plus longtemps (ce que je ne veux
pas croire puisque depuis 5 ans ils font tout pour soutenir le système
économique et financier y compris l’impensable).
Encore une fois, je pense que nous reprendrons rapidement la planche
à billets car sinon la catastrophe sera rapide et la mort douloureuse.
L’ensemble du monde est dépendant à l’argent
gratuit. Nous sommes tous tombés dans le piège des taux bas et
l’on ne peut pas en sortir.
Dans tous les cas, rien n’a changé. Soit
l’économie s’effondrera étouffée par des
taux élevés (récession, déflation,
dépression, insolvabilité), soit l’économie
s’effondrera par hyperinflation suite à des injections de
liquidités toujours plus massives et importantes.
Au final, il ne peut en rester
qu’un!… L’or ! (et l’argent)
Tout le reste ne sera que ruine, destruction et désolation.
Charles SANNAT
Editorialiste et rédacteur du Contrarien
Matin
Directeur des Études Économiques Aucoffre.com
http://www.lecontrarien.com/
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reproduit à sa suite. Le Contrarien Matin
est un quotidien de décryptage sans concession de
l’actualité économique édité par la
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Directeur des études économiques. Merci de visiter notre
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