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De
l’audace, Monsieur Hollande, de l’audace ! Votre discours du 20
juin à l’ouverture de la conférence sociale
n’était qu’un pauvre copié-collé des
discours sans relief que vous prononcez depuis un an. On a beau chercher, il
n’y rien de nouveau dans ce que vous dites. C’est toujours la
même rengaine sur la nécessité d’avoir plus
d’intervention de l’Etat, plus d’argent public, plus de
redistribution, plus de service public.
Et que dire de
ceux qui vous écoutent ! Toujours les mêmes : syndicats
communistes, trotskystes, collectivistes, vaguement réformistes, ou
patronat trop poli et s’excusant de ne pas être suffisamment
prolétaire.
Vous
êtes la France du huis-clos social ! Un peu d‘ouverture vous ferait
du bien. De toute façon vous n’avez rien à perdre car les
syndicats de travailleurs ou de patrons n’ont pas aimé le
discours que vous avez prononcé. Alors autant les affronter pour de
bon !
Quittez le
costume de « Monsieur Compromis » et taillez dans le vif ! Vous
vouliez un discours social tranchant pour faire basculer les lignes,
provoquer un séisme salutaire, enfin avoir une vraie confrontation :
alors, un peu de courage et inspirez-vous de Thatcher ! Qu’avez-vous à
perdre au point où vous en êtes ? Votre discours aurait eu un
autre retentissement.
Imaginez un
instant. La veille de l’événement, vous jetez aux orties
le discours lymphatique préparé par vos conseillers. Marre du
« socialement correct », il faut mener une blitzkrieg sociale.
Sur Internet, vous retrouvez le discours de Margaret Thatcher qu’elle a
prononcé le 14 octobre 1983. Vous le reprenez, mot pour mot.
Le lendemain,
au pupitre du Palais d’Iéna, vous attaquez : « Un des
grands débats de notre temps est de savoir combien de votre argent
devrait être dépensé par l’État et combien
vous devez garder à consacrer à votre famille. »
Là vous captez l’attention. Puis vous jetez à la face des
syndicalistes : « N’oublions jamais cette
vérité fondamentale : l’État n’a aucune
autre source d’argent que l’argent que les gens gagnent
eux-mêmes. Si l’État souhaite dépenser plus, il ne
peut le faire qu’en empruntant votre épargne ou en vous taxant
davantage. Il n’y a rien de bon à ce que quelqu’un
d’autre paie ; cette autre personne, ce sera vous. »
Les
journalistes sont déjà en train de twitter
et textoter frénétiquement, sentant
le moment historique, le discours fondateur d’un quinquennat
jusque-là ronronnant. Puis soudain la phrase choc : «
L’argent public n’existe pas, il n’y a que l’argent
des contribuables. » Thierry Lepaon,
secrétaire général de la CGT, aussi rouge que son
drapeau, se lève, indigné, choqué, prêt à
quitter la salle. Les photographes immortalisent la scène, les
caméras se précipitent, les commentateurs prennent
l’antenne en direct.
Sentant enfin
de l’action, la vraie, celle d’une politique courageuse, vous
continuez : « La prospérité ne viendra pas de
l’invention de programmes de dépenses publiques de plus en plus
somptueux. Vous ne devenez pas riches en commandant un carnet de
chèques à votre banque et aucune nation n’est jamais
devenue plus prospère en taxant ses citoyens au-delà de leur
capacité. » La salle s’agite, les bien-pensants sont
effrayés par autant de courage : cela fait trop longtemps qu’un
homme politique s’est dressé pour dire la vérité.
Alors vous
donnez le coup de grâce : « Nous avons la mission de nous assurer que chaque euro levé par
l’impôt soit dépensé de manière sage et
bonne. Les gens parlent de service ‘gratuit’. Ce n’est pas
gratuit. Vous devez payer pour ! » Lepaon
s’effondre dans son siège, Jean-Claude Mailly
de Force Ouvrière, stupéfait, n’a pas la force de
réagir, Laurent Berger de la CFDT se croit dans un cauchemar, Laurence
Parisot du Medef se demande si les aides aux
entreprises seront toujours disponibles. Vous perdez l’intelligentsia
bobo, les bien-pensants collectivistes, tous les froussards du politiquement
correct, mais vous gagnez l’appui inconditionnel de ceux qui se
crèvent à bosser et qui n’en peuvent plus de toujours
payer !
Par ces quelques
mots, Monsieur Hollande, vous seriez entré dans l’Histoire par
la grande porte. Vous auriez relancé l’histoire sociale de la
France ! Vous seriez enfin devenu Président !
Au lieu de
cela, vous avez préféré rester dans le rang. Comme
d’habitude. À peine avez-vous esquissé l’ombre
d’un début de proposition en suggérant que l’on
pouvait éventuellement cotiser un peu plus longtemps – mais pas
trop, quelques mois – pour les retraites. Votre prudence vous perdra.
C’est
que malheureusement, nous ne partageons pas les mêmes
références. La vôtre est corrézienne. La
vôtre est radicale. Votre modèle c’est Henri Queuille,
député, ancien ministre, président du Conseil sous la
Troisième et la Quatrième République, grand gestionnaire
de l’inaction politique. Sa devise : « Il n’est pas de
problèmes qu’une absence de solutions ne finisse par
résoudre. » Alors on vous comprend mieux : votre ligne
politique, c’est l’absence de vraie politique. Un conseil : abandonnez
Queuille, prenez Thatcher, c’est plus viril…
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