Les
Français sont fiers de leur Sécurité sociale. La CGT et
ses sbires font tout ce qui est en leur pouvoir pour faire taire ses
opposants, en témoigne cette conférence
propagandiste qui avait été tenue en 2003 et qui résume
bien l’atmosphère intellectuelle présente chez ses
farouches défenseurs. Qui plus est, la Sécurité sociale
aurait été instaurée en 1945, lors de la glorieuse
époque de la Libération, ce qui rehausse plus encore son
prestige. C’est oublier que certains de ses principes clés, tel
que le sacro-saint principe de répartition des retraites, avaient été
mis en œuvre sous le Régime de Vichy. Curieusement, ce fait
historique passe sous silence…
Actuellement,
le patronat est pointé du doigt pour vouloir « privatiser »
la Sécurité sociale. Pourtant, en pratique, très rares
sont ceux qui souhaiteraient en arriver à une telle
extrémité.
Et, à
ce sujet, il est rafraîchissant de lire ce très récent article,
paru fin juin, sur un blog appelé Acrithène.
L’article expose le mythe selon lequel la Sécurité sociale
fonctionnerait
comme une sorte d’assurance contre les risques sociaux.
En effet, une
assurance traditionnelle – sans prétendre supprimer
l’incertitude – prend en compte le risque auquel est
exposé l’assuré potentiel en vue d’effectuer un
calcul des primes d’assurance adapté à sa situation. En
aucun cas, une compagnie d’assurance ne prend en compte le salaire ou
les revenus en général de son assuré. Au contraire, elle
tendra à récompenser les « bons »
assurés et à pénaliser les
« mauvais » afin d’inciter à un
comportement responsable. « Solidarité oblige »,
répondront les thuriféraires de la Sécurité sociale.
Peut-être. Mais, quoi qu’il en soit, il faudrait alors cesser de
revendiquer le terme « assurance » pour ses nombreuses
composantes.
De plus, la
Sécurité sociale jouit d’un monopole en France,
contrairement aux assurances privées. La concurrence et ses vertus ne
profitent pas aux Français. La bureaucratie du système
génère des coûts importants, l’absence de loi du
profit – si souvent condamnée – n’incite pas
à une gestion saine. Et, contrairement aux clichés, les
détournements de fonds ne sont pas inexistants au sein de ce vaste
monopole.
On nous
rétorquera que les sondages montrent que les citoyens sont globalement
satisfaits de leur système de santé. Certes. Mais si ce dernier
était placé en situation concurrentielle, il est fort à
parier que nombreux d’entre eux étudieraient attentivement les
offres des compagnies privées.
L’article
effleure, en outre, un point qui aurait, sans doute, mérité un
développement plus ample : le fait que la hausse permanente des
cotisations sociales entraîne un coût pour les entreprises. La
conséquence finale, pour ces dernières, est le fait
qu’elles seront toujours moins enclines à embaucher du
personnel, étant même tentées d’en licencier,
surtout en temps de crise économique. Les baisses de charges sociales
ont d’ailleurs, permis
de sauver, voire de créer plusieurs centaines de milliers
d’emplois en France. Cette mesure est évidemment insuffisante
pour restaurer le plein-emploi dans le pays mais elle est tout de même
essentielle.
Surtout, Acrithène démonte un autre mythe de la
Sécurité sociale : celui selon lequel les cotisants en
bénéficieraient plutôt. Faux. Le salarié
français moyen cotise, uniquement pour l’assurance maladie,
à hauteur de 4324 € par an. Or, les chiffres du Haut conseil
pour l’avenir de l’assurance maladie montrent que la
dépense moyenne d’une personne en âge de travailler est de
1500 €… L’écart est abyssal et il est donc
erroné de continuer à colporter l’idée selon
laquelle il s’agirait d’une institution
d’intérêt général. D’autant plus que
notre « fierté nationale » est celle qui
pratique les taux de remboursement parmi les plus bas d’Europe alors
que les dépenses de santé atteignent près de 10% du PIB.
Plus
précisément, depuis le début des années 2000,
de nombreux médicaments – et, principalement, ceux
considérés par les autorités publiques comme
étant faiblement efficace d’un point de vue thérapeutique
– ne sont plus remboursés du fait de l’aggravation des
déficits sociaux. Le but est de rétablir
l’équilibre et le danger est de faire passer en second plan la
santé des assujettis à la Sécurité sociale.
Les pouvoirs
publics ont d’ailleurs développé la notion de
« SMR » (service médical rendu) afin de mieux
faire passer la pilule du déremboursement : désormais,
à en croire lesdits pouvoirs publics, seuls les médicaments
à l’efficacité limitée seraient
déremboursés.
Déjà,
en 2007, peu après l’élection présidentielle,
Laure Allibert (du blog quitter la sécu) pointait du doigt la faiblesse de ces
taux de remboursement, notamment en ce qui concerne l’optique et les
soins dentaires, ce qui oblige les Français à se munir
d’une mutuelle complémentaire privée, plus ou moins
coûteuse, après avoir pourtant été saigné
à blanc en matière de charges sociales.
Évidemment,
les défenseurs du système rétorqueront que cela risque
d’être pire dans un système entièrement
privatisé. Ce n’est pas évident à première
vue. Car la contractualisation de
la relation entre l’assureur et l’assuré implique
que le premier cité, soumis, en outre,
à une pression concurrentielle, ne pourra pas impunément
changer les clauses du contrat. Ensuite – et c’est
l’avantage traditionnel d’une situation de concurrence –
cette dernière permettra à terme de faire baisser les prix,
augmentant, par la même occasion, le pouvoir d’achat des
assurés.
Le
fonctionnement du marché des assurances complémentaires offre
un enseignement intéressant. Une étude
conduite par Perrine Frehaut (économiste
à la direction générale du Trésor), Tristan Klein
(chef de mission adjoint à la délégation
générale à l’emploi et à la formation
professionnelle) et Philippe Laffon (Inspecteur
général à l’Inspection générale des
affaires sociales) montre ainsi que 96% des entreprises sont satisfaites de
leur complémentaire santé. Ce qui ne les empêche pas de
mettre leur prestataire sous pression permanente…
De ce fait,
pourquoi ne pas élargir un mécanisme qui plaît à
presque tout le monde ? Surtout que la situation constamment
aggravée des comptes sociaux ne pourra que conduire à abaisser
plus encore ces taux de remboursement et à dégrader la
qualité des services proposés par la Sécurité sociale.
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