La Nature, avec cet esprit taquin qui assure que l’évolution des espèces
sera toujours une course-poursuite, a produit pour chaque animal un nuisible
qui lui est spécifique. Par exemple, pour le chien, on trouve la gale sarcoptique canine. Pour le chat, il y a l’ankylostome,
un ver rouge assez dégueu d’un à deux centimètres de long. Pour l’honnête
homme, il y a le douanier.
Bien évidemment, j’en vois deux ou trois, dans le fond, qui s’agitent un
peu, l’air mal à l’aise : « Comment peut-il dire des choses pareilles,
enfin, voyons ! » ou, pire, qui se disent, en se rappelant un de mes vieux billets : « Au secours, il remet ça
! »
Pourtant, je ne fais ici que constater une chose évidente et la redis
simplement, sans fard et sans les chichis politiciens qui enrobent d’habitude
ce genre de franc-parler pour faire passer la pilule de merde en la
camouflant dans une gélatine goût fraise : le douanier n’est, par essence et
par nature, qu’un parasite de l’honnête homme. Il n’existe que dans le but
exclusif de lui pourrir la vie. Plus exactement, son métier consiste
exclusivement à lui amoindrir le pouvoir d’achat en renchérissant les biens
importés ou à faire le gros bras pour des monopoles
mafieux qui le rétribuent directement ou indirectement. Comme le faisait
déjà remarquer Bastiat en son temps (et rien n’a changé depuis), le
douanier intervient dans le but de saboter le commerce entre adultes
consentants.
Sans le commerce qu’il entend parasiter, il n’existerait pas. Sans la
force que lui procure l’État pour accomplir sa mission, il n’existerait pas.
Sans la demande expresse d’autres parasites qui préfèrent tordre les bras des
concurrents qu’améliorer leurs offres, ils n’existeraient pas. Sans le besoin
de certains d’évincer les plus faibles, à coup de talons si besoin, il
n’existerait pas. Le douanier n’est, véritablement, que la matérialisation
physique des jalousies, des bassesses et des lacunes insurmontables des
aigris et des ratés qui ont l’oreille du pouvoir. Et la plupart du temps, le
douanier se trouve parfaitement heureux de cette condition de parasite.
J’en veux pour preuve un récent article paru dans le Figaro, publié dans une
grande discrétion. À l’unique exception de Contrepoints, les autres médias, en
vacance (intellectuelle et aoûtienne), s’occupaient des bavouseries
ministérielles et n’ont donc pas eu le temps de traiter l’histoire, je
suppose. Dans ce petit papier, on découvre, absolument pas étonné dans cette
France qui se délite de plus en plus, que la douane française réalise un
travail parfaitement indispensable et réclamé à grands cris par toute une
population : le tabassage fiscal de retraités impécunieux qui ont
l’audace inouïe de répondre favorablement à des associations pour animer des
séances de lotos-bingos. La violence même des actes perpétrés par ces pervers
pensionnés me provoque des frissons de terreur dans le dos.
Il faut bien saisir toute l’ampleur du problème pour comprendre pourquoi
la douane devait intervenir. On parle ici de lotos-bingos, c’est-à-dire, dans
l’échelle de l’horreur, quelque chose qui se situe à mi-course entre le
remplissage d’une feuille d’impôts et un samedi soir sans télé avec la visite
impromptue de tante Gertrude, oui, celle qui a du poil au menton, une haleine
de poney et des recettes de cakes reconnues chez Lafarge ; ce niveau
d’horreur-là justifie à lui seul que les forces douanières agissent
promptement et sans faiblir.
En effet, malheureusement populaires dans toutes les contrées de France où
tant d’innocents continuent à voter, les lotos-bingos sont ces tirages au
sort de boules numérotées promettant le panier garni ou la perceuse
électrique et ne sont pas, loin s’en faut, un jeu de hasard aux airs bon
enfant pour animer les clubs provinciaux du troisième âge ou le spectacle
annuel de majorettes. Que nenni. Il s’agit, véritablement, d’un de ces moyens
retors pour spolier l’État de son juste tribut ; c’est une façon astucieuse
et presque imparable de blanchir de l’argent de la drogue, du sexe et du
trafic d’armes. Au moins. D’ailleurs, le fait que ce soit généralement
organisé ou animé par des retraités en dit long sur la puissance du lobby des
joueurs de loto-bingos qui se trouve derrière !
Et c’est donc en toute logique que les douanes et les services fiscaux
sont intervenus dans des dizaines de dossiers à côtés desquels les fusillades
marseillaises et corses font figure d’apéritifs : débarquement à 6h du matin
chez des retraités impliqués dans ces trafics massifs de Bingo, avec à la
clef des perquisitions, des gardes à vue, des procès en correctionnelle, des
peines d’amende et de prison ; 650.000 euros en appel pour Bruna, petite retraitée de Bergerac, connue dans tout le
milieu de grand banditisme pour ses recettes de gateaux
au yaourt. 400.000 euros pour Patricia, à Nantes, qui faisait partie d’un
vaste réseau de mamie tricoteuses. Près de 3 millions d’euros pour Philippe,
dit le Caïd de Colmar, qui organisait des douzaines de cercles clandestins de
bingos sauvages et dépravés avec panier de la ménagère à gagner chaque
premier dimanche du mois. L’horreur.
Il était temps : la douane ferre de plus en plus de gros poissons, comme
Annie, 62 ans, qui cumulait déjà une retraite scandaleusement confortable de
100 euros par mois (car oui, la retraite par répartition permet ce genre de
largesses inouïes), et dont la cupidité sans borne l’a poussée à participer à
plus de 181 lotos en 4 ans (soit à peu près 1 par semaine, la stakhanoviste
!) pour près de 300 euros par mois (oui, vous avez bien lu : 300 euros par
mois – que peut-on faire de toute cette montagne de pognon ?). Le fisc,
heureusement, a vu clair dans le jeu de la trouble retraitée : elle a
évidemment omis de s’être acquittée de l’impôt sur les spectacles de 127.923
euros (soit 106 années de sa copieuse retraite) et n’a pas déclaré les
recettes des associations pour lesquelles elle travaillait, d’un montant
total de presque 1.000.000 d’euros (on nage dans la plus pure folie).
Schnouffe à tous les étages. Diamants de gros calibres. Billets
authentiques et contrefaits. Prostitution, traite des blanches, et,
probablement, pédo-pornographie, tout y est.
Oui, on peut le dire : les douanes ont fait un fier travail. On est bien
loin, ici, des quartiers sensibles de Grenoble, Marseille ou de Seine
Saint-Denis. On est au-delà des anicroches banales, à coups de pierre ou de
kalachnikov, entre jeunes et pompiers, policiers. Le bingo des retraités,
c’est, à l’évidence, l’étage au-dessus des vols de passagers de trains
(déraillés ou non). Il faut bien comprendre : le bingo, c’est
l’antithèse de la République, du vivrensemble, du
multiculturalisme, de la France apaisée. Il fallait donc écraser
toute velléité de recommencer.
D’ailleurs, (et je cite l’article du Figaro), à la Direction générale des
douanes, on dénonce « la prospérité inquiétante d’organisations
structurées à l’enrichissement vertigineux » — un enrichissement
vertigineux, en France, manquerait plus que ça, non mais ! — et, surtout,
leur lien étroit avec les milieux du grand banditisme. Et même que d’abord,
ils ont eu une affaire en mars dernier, à Aix-En-Provence. Alors ça ne rigole
pas. Annie, Philippe, Bruna ou Patricia, ils vont
morfler grave.
…
À ce point de l’analyse des conneries éhontées débitées par les parasites
méprisables des douanes, on doit s’arrêter, et laisser refroidir la machine
quelques secondes.
On doit, en effet, se poser quelques questions, essentielles, ces
questions que tout honnête homme se pose, et que même tout fonctionnaire,
même travaillant pour les douanes, aurait dû se poser avant d’aller plus loin
dans les dépôts de plaintes, dans les poursuites qui furent menées contre ces
retraités.
Elle est où, la décence et l’honneur attachés à leur fonction,
lorsqu’on voit ce qu’ils font ? Elle est où la mesure et la morale
lorsqu’on lit que les enflures du Parquet firent appel de la relaxe d’Annie ?
Quel est le but ? Écraser du vieux ? Ruiner du retraité ? Pourquoi ? Pour les
trois francs six sous qu’ils devraient, hypothétiquement, à un fisc
tentaculaire et de plus en plus fou ?
Oh, soyez sûrs d’une chose : les coprophages extrémistes qui ont lancé ces
fatwas contre les bingos municipaux se regardent le matin dans la glace et
disent, tous, à un moment ou un autre : « J’ai suivi les ordres »,
dans le meilleur des cas. Dans le pire, ils sont, comme je l’ai dit, joyeux
d’écraser des honnêtes gens. Pour ceux-là, la justice, l’équité, la morale
sont sans intérêt. Seul la Loi (aussi idiote soit-elle) et seul l’appât du
gain (honorifique ou financier) attaché aux faits d’armes les motive.
Peu importe qu’on ne verra jamais ces minables douaniers et ces
inspecteurs du fisc orduriers tenter des descentes dans certains quartiers
« connus des forces de police ». Peu importe que leur job consiste
à saboter celui des autres. Peu importe que ces douaniers et ces Bercy-boys n’ont jamais été là pour demander des comptes à Hollande,
ou à Cahuzac. Peu importe parce que tout ce qui
compte, maintenant, c’est de remplir les caisses de l’État. Il est aux abois
et il ne recule plus devant aucune saloperie, aucune immondice.
Et ce n’est que le début : Français, Françaises, l’État s’attaque à vos
ancêtres, à vos vieux. Il s’en prend aux honnêtes, aux pauvres et aux
vulnérables. Combien de temps le supporterez-vous ?