La Réserve Fédérale ne répond
que devant Dieu. Ben Bernanke ne sait peut-être pas
que son boss est un petit malin. Voilà tout à coup que le taux d’intérêt sur 10
ans des bons du Trésor gonfle tel un furoncle purulent sur le pâle postérieur
de Ben au moment où il pensait pouvoir s’asseoir et profiter du combat de
boue entre Larry Summers et Janet Yellen pour sa succession.
Ce pauvre Ben, fidèle étudiant
de la Grande Dépression, n’a pas su se rendre compte que son pays s’est
transformé depuis une nation de fermiers et d’ouvriers en une nation de pole-dancers et de serveurs, etattend
son sublime moment d’Hooverisation. Comme le pauvre
Hoover, il se retrouve à faire les cent pas dans la cabine de pilotage six
mois seulement après avoir géré la pile de détritus qu’est la finance
Américaine construite sur une terre de fraude comptable et d’illusions
dorées.
Chaque individu qui s’intéresse
un tant soi peu à son univers, – ceux qui ne font pas la queue pour une
carte de chomage, ne regardent pas envieusement les
pages d’un catalogue de tatouage ou n’attendent pas de regarder le dernier
gang bang de Kim Kardashian sur Duck
Dynasty – a certainement les nerfs en pelote. La vague a nourri un tsunami d’appels de
marge jusque dans les Hamptons, qui
donnera bientôt au terme ‘la tête sous l’eau’ une nouvelle vie dans la drôle
mythologie du capital. L’immortel Bill Gross a même envoyé un appel au
secours sur Twitter en fin de semaine. Il n’est pas
surprenant que tout le monde ait les jetons.
Les gens ont peur que les
banques centrales aient finalement perdu le contrôle d’une situation qu’elles
ne font que prétendre contrôler depuis 2007, alors que le racket grotesque
qu’est le regroupage des prêts immobiliers a causé une fissure psychotique
dans les murailles du système bancaire. Le remède a jusqu’alors été une
demi-décennie de taux d’intérêts proches de zéro et d’utilisation forcenée de
la carte de crédit nationale. La triste vérité commence à émerger au travers
du brouillard de psychose, et le marché des obligations est perdu. Sans lui,
tous les marchés papier sont cuits, ainsi que les marchés des actions et fort
probablement le système fiduciaire tout entier.
Et puis n’oublions pas le
mélodrame énergétique. Comment une personne dotée d’un minimum d’intelligence
peut-elle supposer que l’économie turbo-industrielle actuelle puisse se
remettre d’un pétrole à 107 dollars le baril ? Toutes les allusions à
une reprise qui fleurissent dans les médias ne sont basées que sur une
poignée de chiffres du PIB qui, comme nous le savons tous, sont complètement
erronés. En clair, les Etats-Unis ne pourront pas continuer de survivre un
brut à 100 dollars le baril et tentent de compenser en se prêtant de la
monnaie à eux-mêmes. Toutes les économies virtuellement avancées en ont fait
de même, et se retrouvent aujourd’hui dans l’embarras puisqu’elles n’ont plus
nulle part où se cacher – quant aux Etats-Unis, ils n’ont plus nulle part où
exporter leurs fraudes financières.
Le Japon est le plus
intéressant corps du laboratoire de pathologies. Il s’est tiré dans le pied
il y a vingt ans et pratique depuis l’auto-cannibalisme. Il n’a ni pétrole ni
gaz, et souffre maintenant d’une crise nucléaire qui ne fait l’objet que d’un
peu moins d’attention que son effondrement économique. Je pensais autrefois
que le Japon n’avait pas d’autre choix que se tourner à nouveau vers l’ère
médiévale. Mais maintenant, je me pose la question de savoir s’il en restera
autre chose dans dix ans qu’un archipel dépeuplé de ruines radioactives. Il
ne peut possiblement pas acheter plus de bons du trésor aux Etats-Unis, et
tente désespérément de se débarrasser des quantités qu’il a accumulées. Et
lorsqu’il y parviendra, il déclenchera une réaction en chaîne qui réduira à
néant la valeur prétendue de la dette papier du monde. Il se peut que le
processus ait déjà commencé.
Si vous vous préparez pour ce
qui arrive, alors soyez sûr de vous préparer à un monde sans prétentions
financières. La crédibilité est prise au piège dans les courants violents qui
approchent des Hamptons. Quand l’eau partira, tout
ce qu’il restera sera de petites choses affreuses gesticulant dans la boue,
et quand elle reviendra, tout ce que vous verrez à perte de vue sera un
spectacle de noyage de banquiers. Attachez-vous à votre communauté locale si
vous en avez une. Et même si vous y parvenez, il vous sera difficile de
donner un sens à tout cela.