Bien que j’aie déjà écrit que l’année 2013 serait
celle de la Chine, n’oublions pas que les banques centrales du reste du monde
ont aussi joué un rôle clé sur le marché de l’or.
Non pas en termes de prêts et
de manipulation de prix, mais dans le sens où certaines d’entre elles
achètent de l’or.
L’année dernière, alors que
les Goldmans, Morgan Stanleys
et UBSs du monde publiaient leurs prévisions pour
2013, le prix de l'or s’est trouvé influencé à
la hausse par les achats des banques centrales.
Au cours des six premiers mois
de cette année, les banques centrales ont acheté plus de 180 tonnes d’or. Ces
quelques dernières années, elles ont acheté entre 70 et 160 tonnes d’or
chaque trimestre. Le deuxième trimestre de 2013 marquait le dixième trimestre
consécutif d’achat d’or par les banques centrales. Je tiens à remercier le Conseil Mondial de l'Or pour ce
graphique :
Les achats d’or des banques
centrales et le rapatriement de leurs réserves d’or par certaines indique que
le rôle des actifs détenus par ces institutions fait l’objet de plus en plus
de contrôles.
Bien que je parle souvent de l’amour
des banques centrales pour l’or, ce n’est jamais en référence aux banques
Occidentales.
Quelque chose d’étrange s’est
pourtant produit au cours de ces dernières années. Non seulement les banques
centrales ont acheté de l’or, mais celles qui ne l’ont pas fait ont été
poussées à défendre leur droit non seulement de posséder de l’or mais aussi
de savoir où leur or se trouve.
Les banques Occidentales ont
ouvertement discuté leur désir de conserver leur or et ont expliqué pourquoi
l’adoption d’une telle attitude est nécessaire. Pour ce qui est de l’endroit
où est déposé leur or, une récente campagne de rapatriement est née en
Pologne, faisant suite à des mouvements du même type dans d’autres pays.
Il est clair que très peu de
banques achètent de l’or, mais notons toutefois que le Trésor Américain et
les banquiers centraux ont mis l’accent lors de la Conférence de 2013 sur les
Métaux Précieux sur l’importance de l’or aux yeux des banques centrales,
qu’elles soient des acheteurs ou des déposants.
Les devises fiduciaires sont
apparues parce que les banques centrales n’appréciaient pas les restrictions
liées aux devises soutenues par l’or. Certains se demandent si certaines
institutions ont depuis changé d’avis au vu de ce qu’elles font pour protéger
leurs réserves, que ce soit en faveur du dollar ou sous la forme du
rapatriement de ce qui leur appartient.
Très peu s’attendaient à ce
que des nations Occidentales fassent partie de la liste des acheteurs d’or,
mais il est important de s’y intéresser, parce qu’elles sont celles qui
détiennent la majorité de l’or mondial.
L’Allemagne et son or
Au début de l’année, nous
n’entendions plus parler d’autre chose que du rapatriement de son or par
l’Allemagne. Ce n’était bien entendu pas la première fois que l’Allemagne
décidait de déplacer ses réserves d’or. Entre 2000 et 2001, 930 tonnes de
métal ont été déplacées de Londres vers Frankfort afin de réduire les coûts
de dépôt.
En tant que puissance
Européenne et détentrice de la deuxième plus importante réserve d’or du
monde, beaucoup se sont posé des questions quant aux motifs de cette dernière
décision.
Lors de la conférence du LBMA
la semaine dernière, Clemens Werner, directeur en chef de la Division des
Opérations de Marché à la Bundesbank a présenté le plan de dépôt de l’or Allemand.
Cette décision de l’Allemagne
n’a pas été justifiée par le risque présenté par les devises et l’exposition
à un effondrement éventuel du dollar. Werner l’a en revanche attribué à une
menace non-existante de Guerre Froide et au lancement de l’euro.
C’est en raison du rôle joué
par l’or au sein d’un portefeuille diversifié et de sa capacité à absorber la
volatilité et à maintenir le niveau de confiance du public que la banque
centrale Allemande a confirmé n’avoir aucune intention de vendre ses 3390
tonnes de métal.
L’Italie ignore les
pressions quant à son or
La relation de l’Italie avec
l’Allemagne est liée à l’or. En 1974, le pays utilisait 500 tonnes d’or pour
nantir des obligations après avoir reçu un plan de sauvetage de 2 milliards
de dollars de la part de l’Allemagne.
Plus récemment, les réserves
d’or du pays et leur utilisation comme nantissement se sont retrouvées au
cœur des spéculations après que le Conseil Mondial de l’Or a suggéré la vente
des 2451,8 tonnes d’or du pays pour contrer les coûts d’emprunts publics.
Ce n’est selon Banca d’Italia pas une option.
Le directeur de la banque centrale, Salvadore
Rossi, a rappelé à ceux qui ont participé à la conférence du LBMA le ‘rôle
joué par l’or pour les réserves des banques centrales’.
Rossi a souligné l’importance
de la valeur de l’or qui, bien que sa propre devise ait perdu 69% depuis
2000, est unique dans le sens où il n’est ‘émis ni par un gouvernement ni par
une banque centrale, et où sa valeur ne peut être influencée par les
décisions politiques ou la solvabilité des institutions quelles qu’elles
soient’.
Rossi a ajouté que l’or est un
composant important des réserves des banques centrales en raison de son histoire
et de la psychologie qui lui est liée. Il a aussi expliqué que posséder de
l’or permet aux banques centrales d’assurer leur indépendance. ‘En tant
qu’élément qui accroît la résistance des réserves à un effondrement abrupt,
l’or marque l’indépendance des banques centrales et leur capacité à agir en
tant que garantes de la stabilité financière domestique’.
J’ajouterai ici que la BCE
n’est pas autorisée à mettre la main sur l’or des banques membres en raison
d’une loi sur l’indépendance des banques centrales qui interdit l’utilisation
des réserves d’or pour soutenir une économie.
Cela n’a pas pour autant empêché Chypre de succomber à la pression après qu’un
examen de ses besoins financier mené en avril dernier a poussé beaucoup à
suggérer la vente des 13,9 tonnes d’or du pays pour l’aider à lever les 400
millions d’euros dont il avait besoin.
Le Trésor des Etats-Unis apprécie l’or plus que quiconque
Plus tôt cette année, Brett Arends, de chez MarketWatch, a
pris le temps de demander au Trésor s’il considèrerait la vente des réserves
d’or des Etats-Unis si la crise venait à escalader. Le Trésor lui a indiqué
que non, et a ajouté que ‘la vente de l’or du pays ne ferait qu’endommager la
confiance envers le dollar, à l’échelle domestique comme internationale, et
déstabiliserait le système financier global’.
Comme le souligne Arends, ceci suggère que même le Trésor sait que la
confiance que le public a en l’or est plus importante que celle qu’il a en le
dollar.
Beaucoup me répondront
peut-être que la raison pour laquelle les Etats-Unis ne vendront pas leur or
est qu’ils n’en ont plus à vendre, puisqu’ils ont déjà prêté tout ce qu’ils
avaient. Mais ce n’est pas là l’objet de cet article. Le Trésor est conscient
du fait qu’un gouvernement qui détient de l’or a une capacité de maintenir la
confiance des marchés bien supérieure à ceux qui n’en possèdent pas.
Le Trésor ne s’accroche pas à
la notion de l’or parce qu’il veut pousser le marché à croire qu’il pourra
l’utiliser comme actif de dernier recours pour se débarrasser de sa dette,
mais parce que sa valeur est bien supérieure à ce que l’on essaie de nous
faire croire.
Le grand projet de l’or
Pour ce qui est de la spéculation
autour des réserves d’or, elle mène inévitablement au projet d’un retour à un
étalon or. Il est rare d’entendre parler des réserves de la Chine sans que
mention soit faite de cette suggestion. Pour être honnête, au vu de la
dévaluation des réserves souveraines par rapport à l’or, l’argument tient
parfaitement debout.
Il s’agit là de spéculation
quant aux plans des banquiers centraux et de leur compréhension du
fonctionnement de l’or. Ce graphique suggère qu’à l’heure actuelle, une
monnaie saine est loin d’être ce qu’ils ont en tête.
Ce que nous devons tirer des
commentaires de nos banquiers centraux est que l’or est important. Bien que
ses fluctuations de prix puissent être comparables à celles des autres actifs
que vous avez en votre possession, sa capacité de maintenir sa valeur et son
niveau de confiance reste intacte.
Les banquiers centraux le
savent. Bien qu’un étalon or ne soit pas encore sur le tapis, la vente de
leur or l’est encore moins.
|