Comment sortir les taxis de l’impasse ?

IMG Auteur
 
Published : November 14th, 2013
815 words - Reading time : 2 - 3 minutes
( 7 votes, 5/5 ) , 2 commentaries
Print article
  Article Comments Comment this article Rating All Articles  
0
Send
2
comment
Our Newsletter...
FOLLOW : Dia Bras France
Category : Fundamental

 

 

 

 

Nous avons mis en évidence les hésitations du gouvernement français concernant la concurrence faite par les voitures de tourisme avec chauffeur (VTC) aux taxis. La question des taxis sera sans doute une leçon utile pour évaluer la possibilité d’assouplir les réglementations dans certains secteurs. Il s’agit d’une réforme que ce gouvernement ou un autre, tôt ou tard, sera forcé d’entreprendre afin d’amortir l’augmentation exponentielle des tarifs et la dégradation visible des services.


Le problème qui se pose est de savoir comment briser un système protégé dans lequel les acteurs investissent dans l’achat d’une licence en espérant des retours surinvestissement élevés du fait de la rente procurée implicitement par la limitation du nombre des licences en circulation. Dès lors que les responsables politiques sont convaincus de la nécessité de réformer ce système, la question est de savoir comment convaincre ceux qui en bénéficient.


Sur le plan de la faisabilité, la solution la plus évidente est aussi la plus radicale : en finir une fois pour toutes et rapidement avec le système des licences. Il est toutefois peu probable qu’un membre du gouvernement actuel (ou celui d’un prochain gouvernement) ait le courage d’assumer la responsabilité d’une telle réforme. Les nombreuses tentatives échouées dans d’autres pays, comme l’Italie, laissent d’ailleurs présager que la colère des chauffeurs des taxis ne passerait pas inaperçue.


Les tentatives de dérèglementations menées par le gouvernement Prodi en 2007 se sont soldées par un échec partout en Italie et plus particulièrement à Rome, où le maire Walter Veltroni avait dû garantir une augmentation de 18% des tarifs des taxis pour que les syndicats acceptent la création de 500 nouvelles licences et mettre ainsi fin aux manifestations de rue qui paralysaient la capitale italienne depuis plusieurs mois. Le bras de fer avec les taxis sera d’autant plus difficile en France, où les gouvernements quel qu’ils soient sont particulièrement soucieux de leur relation avec les syndicats.


Une telle solution pose par ailleurs un problème important sur le plan moral. Les licences représentent des privilèges. On ne voit pas à première vue d’obstacle moral à en finir le plutôt possible avec un système cher et peu fiable du point de vue du consommateur. Ceci est d’autant plus évident qu’il est, en outre, profondément injuste du point de vue de ceux qui souhaitent pratiquer ce métier. Ils se trouvent ainsi exclus par ce système des licences.


Toutefois, il s’agit là de personnes – les chauffeurs de taxis – qui attirés par le mirage de la rente, ont investi des sommes considérables dans l’achat de leurs licences (environ 200 000 euros pour une licence de taxi parisien) et se sont souvent endettées pour ce faire. Cela fait sans doute parti des risques du métier – quel entrepreneur n’en prend pas. Il semble  cependant assez évident que les détenteurs de licences pourraient légitiment se considérer trompés sur la marchandise et demander des compensations si l’État annulait ces licences du jour au lendemain.


En souscrivant au système des licences de taxis avec toutes les conditions et obligations coûteuses qu’une telle décision comporte, un chauffeur pourrait se considérer trompé par l’État, s’il perdait du jour au lendemain les privilèges attendus. Imaginons un fournisseur de services qui cesserait unilatéralement  de garantir l’accès à toute une gamme de services auxquels des clients viendraient tout juste de s’abonner. Dans ce cas, comme dans celui des taxis (même s’il ne s’agit pas de la même relation contractuelle), il ne serait pas surprenant que les clients réclament des compensations.


La stratégie la plus efficace et le plus juste pour réformer un système de licences (mis à part leur annulation soudaine) serait donc de mettre en place un système de compensations pour les détenteurs. Ces compensations pourraient aller du rachat des licences au prix du marché de ces dernières (ce qui peut s’avérer une opération trop chère) à la mise en place d’une compensation au pro rata, en fonction du temps de détention de la dite licence. Nul ne doute que racheter à un prix fort les licences données gratuitement représenterait une perte sèche pour le budget de l’État, mais ce prix permettrait en quelque sorte de mesurer le coût de mauvaises décisions politiques antérieures.


Une autre stratégie, beaucoup plus longue mais moins onéreuse pour l’État consisterait à dévaloriser le prix de la licence jusqu’à le rendre presque nul. En tolérant la concurrence des VTC, il serait possible de créer de nouvelles opportunités d’affaires susceptibles de décourager les chauffeurs de taxi d’intégrer le système coûteux des licences. Petit à petit, cela en diminuerait le prix jusqu’à le rendre nul, le jour où il serait de fait possible de pratiquer le métier de chauffeur de taxi sans payer de licence.


Pour l’heure, le gouvernement semble hésiter quant aux choix des réformes au risque de choisir la seule option désastreuse, à savoir réglementer les VTC en pensant que cela pourra compenser les effets pervers des réglementations pesant sur les taxis.


 

 

Data and Statistics for these countries : France | All
Gold and Silver Prices for these countries : France | All
<< Previous article
Rate : Average note :5 (7 votes)
>> Next article
Marian Eabrasu est professeur d’économie et d’éthique à l’ESC-Troyes. Il a été chercheur à l’International Centre for Economic Research (Turin, Italie) et à l’institut Ludwig von Mises (Auburn, Etats Unis). Il est l'auteur de nombreux articles publiés dans des revues à comité de lecture comme La Revue Française de Science Politique, Quarterly Journal of Austrian Economics, Business and Society, etc. Son dernier article publié en 2012 dans Raisons Politiques s'intitule "Les états de la définition wébérienne de l'Etat"
Comments closed
  All Favorites Best Rated  
En Urugay, les taxis ont été frappés de plein fouet par la crise de 1929, et se sont organisés entre eux pour se partager le peu de gâteau qui leur était resté.
Depuis lors, ce gremium, syndicat ou corporation n'a pas cessé de gérer les entrées-sorties dans la profession, de sorte que la population n'a jamais manqué de taxis bon marché et que les chauffeurs ont toujours pu faire vivre leur famille...
85 ans sans la moindre intervention coercitive d'un rond-de cuir qui n'aurait connu ni le métier ni le marché du moment... !!
Le but de l'Etat est d'augmenter le nombre de taxis, pas nécessairement gagner de l'argent en revendant de nouvelles licences (oui d'accord je fais de l'angélisme !).
Créer des licences répond à cet objectif, mais lèse les proprios de licences (qui ont pu les acheter fort cher, en empruntant souvent pour le faire). Donc c'est effectivement un sujet très sensible que de dévaloriser le capital-licence d'une façon ou d'une autre.

Je vais faire une suggestion, pour les grandes villes (pour les petites agglomérations mon système ne marche peut-être pas).
A t-il été étudié la possibilité de créer des coupons détachables à partir de TOUTES les licences existantes ?
Par exemple 2 coupons détachables, par licence. Ces coupons se négocieront dans une bourse d'échange : le candidat taxi rachètera 10 coupons et aura droit automatiquement à sa licence de plein exercice, absolument identique à toutes les autres licences existantes (mais qui, elles, pourraient avoir 0, 1 ou encore 2 coupons attachés). Liberté totale de négociation sur les coupons : l'Etat n'y fourre plus son nez.

Est-il possible d'attacher de nouveaux coupons à cette licence toute fraîche ? (Apparemment on ne crée pas une pyramide de ponzi par un système similaire à des intérêts composés ?) Par exemple : année 0 de départ = 100 taxis / année 1 = 120 taxis / année 2 = 124 taxis / année 3 = 124,8 taxis , en supposant que tous les coupons soient détachés dans l'année.

Ces 20% de coupons dévalorisent automatiquement d'environ 20% le capital-licence, mais les taxis ont encore leur licence (environ 160.000) + 2 coupons d'environ 20.000 + 20.000. Donc aucun taxi n'est lésé dans l'affaire.
Ceux qui venaient d'acheter à crédit leur licence à 200.000 pourraient immédiatement s'alléger d'environ 40.000 de remboursement par la vente de leurs coupons. Ils ne sont pas lésés non plus dans l'affaire.

Tout cela fonctionne bien je le répète si l'Etat ne vient pas mettre sa patte griffue dans le système et laisse le libre droit de négocier les coupons dans la bourse d'échange (et ne vient pas mettre une usine à gaz de plus-values taxables dans le système). Croire à la parole de l'Etat est bien la variable la plus aventureuse dans l'affaire !
Rate :   0  1Rating :   -1
EmailPermalink
Latest comment posted for this article
En Urugay, les taxis ont été frappés de plein fouet par la crise de 1929, et se sont organisés entre eux pour se partager le peu de gâteau qui leur était resté. Depuis lors, ce gremium, syndicat ou corporation n'a pas cessé de gérer les entrées-sorties d  Read more
Rüss65 - 11/16/2013 at 9:49 PM GMT
Top articles
World PM Newsflow
ALL
GOLD
SILVER
PGM & DIAMONDS
OIL & GAS
OTHER METALS
Take advantage of rising gold stocks
  • Subscribe to our weekly mining market briefing.
  • Receive our research reports on junior mining companies
    with the strongest potential
  • Free service, your email is safe
  • Limited offer, register now !
Go to website.