Il y a quelques mois, le président Hollande et le gouvernement Ayrault, prenant la mesure du marasme dans lequel le pays s’enfonce, sont montés aux créneaux pour annoncer, urbi et orbi, une réforme fiscale d’importance, quelque chose qui allait enfin remettre la France sur les rails multiples de la simplification administrative et fiscale, de la croissance et de l’emploi retrouvé. Moyennant un chantier qui allait durer tout le quinquennat (et même un peu plus) et une remise à plat des taxes, ponctions et prélèvements, la réforme allait gravement envoyer du steak, on verrait ce qu’on verrait et accrochez-vous bien.
Las.
On sentait déjà, au bilan de l’année 2013, que le « choc fiscal » n’avait pas été à la hauteur des espoirs gouvernementaux : jugé peu efficace, il aurait même cassé la reprise économique française (un peu comme on casse la course d’un éléphant en lui tirant dans les pattes).
Et pour l’année 2014, on sent déjà des soucis : les meilleures intentions du monde ne sont rien si l’intendance, lourde, tatillonne et pusillanime, ne suit pas. Apparemment, à Bercy, ils se sont refilés le mot — ces gros fainéants — pour ne surtout pas permettre aux valeureux combattants de la fiscalité française d’aboutir à leurs nobles buts. On découvre, au bord du désespoir et dans un épais rapport pondu par un groupe de travail interadministratif entre la DGI, la Sécu et d’autres molochs gluants, que la fusion CSG-Impôt sur le Revenu ne sera pas possible. Rooh, c’est dommage de laisser ainsi tomber une idée pareille qui était d’ailleurs l’un des engagements de campagne du candidat Hollande (le n°14) ! On peut au passage se demander comment il lui était venu une idée pareille tant sa réalisation semblait délicate, la CSG étant considérée comme une cotisation sociale, et l’Impôt sur le revenu comme un impôt, les deux n’étant pas assis sur les mêmes assiettes, ni les mêmes modalités…
Et c’est doublement gênant parce qu’en parallèle, les finances du pays ne se portent pas exactement bien, ni même de mieux en mieux. On apprend en effet qu’un autre rapport, Haut Conseil du financement de la protection sociale et qui sera probablement aussi vite enterré que celui sur la complexité de la fusion CSG/IR, estime que les déficits accumulés pourraient dépasser 100% du produit intérieur brut de la France en 2060, dans une joie et une bonne humeur qu’on comprendra parcimonieusement mesurée pour le dire gentiment. Bon, évidemment, 2060 est une échéance fort lointaine ce qui rend l’alarmisme du rapport un tantinet déplacé, mais le message essentiel d’une dérive de plus en plus grave des comptes sociaux reste cependant clair : aux déficits publics déjà abyssaux, il va falloir ajouter des déficits sociaux toujours plus profonds.
À ce rythme, on a du mal à imaginer autre chose qu’une faillite retentissante dans un avenir plus ou moins proche.
Et cette impression ne s’évapore pas lorsqu’on voit les solutions envisagées et lentement mises en place en loucedé par un gouvernement idéologiquement à la rue : comme la fusion de la CSG avec l’impôt sur le revenu semble mal barré, comme d’un autre côté, les déficits publics et sociaux augmentent autant que la pression fiscale, pourquoi ne pas … augmenter la pression fiscale en annulant la déductibilité de la CSG à l’impôt sur le revenu ? En effet, et grâce à l’application des mathématiques socialistes habituelles en France, payer moins d’impôts que prévu sur ses impôts, c’est un avantage fiscal qu’il va vite devenir nécessaire de corriger selon Christian Eckert dont les dernières déclarations fiscales ont dû être bien trop légères pour pouvoir lui ramener les pieds sur terre.
Le raisonnement est, comme d’habitude, simple et parfaitement stupide : une partie de la CSG, qui est un impôt payé sur le salaire brut (et donc sur une somme dont on ne touche pas la totalité), peut être déduite des revenus ce qui amoindri l’autre impôt (sur ce revenu). Évidemment, plus on a un revenu élevé, plus on paye d’impôts, et plus on peut déduire de CSG. Pour Eckert qui aime semble-t-il terriblement prendre dans la poche des autres, le fait d’avoir moins d’impôts à payer sur ses impôts est une « injustice à corriger » car, tenez-vous bien, « seuls ceux qui paient l’impôt profitent de cet avantage fiscal. Pas les autres ! »
(Oui. Le fait de pouvoir diminuer ses impôts quand on en paye est un avantage sur ceux qui n’en paient pas. Le niveau de Facepalm atteint ici est ahurissant. J’en remets un autre, tiens.)
Je note que, dans la presse, aucun journaliste n’a relevé cette saillie consternante de bêtise d’un député, payé, justement, par nos impôts. Je regrette, un peu désabusé, qu’aucun gratte-papier n’ait eu la présence d’esprit ou la toute toute petite paire de couilles d’écrire que ce raisonnement d’âne bâté méritait clairement les moqueries les plus grasses et une campagne médiatique destinée à ruiner tout espoir pour le pauvret de se faire jamais réélire. Mais baste, passons, nous sommes en France, après tout, et quoi qu’on dise ou fasse, certains voteront obstinément pour les pires saprophytes…
Le résultat, bien sûr, restera le même : les taxes augmenteront, les impôts aussi, le choc fiscal sera celui d’un uppercut correctement administré, et l’économie française continuera donc de s’effondrer. Et si je dis ça, ce n’est pas parce que je suis un incorrigible pessimiste ; enfin, si, aussi, mais pas seulement : c’est parce que la France est déjà dans le peloton de tête des pays les plus mal lotis en terme d’impôts. C’est parce que la France est maintenant en tête pour les prélèvements de tous genres, tant sur les entreprises que sur les particuliers. C’est parce que la France perd chaque année qui passe des places dans le classement de la liberté économique et que chaque place perdue se traduit mécaniquement par du chômage, de la perte de pouvoir d’achat et une extension de la misère populaire. C’est parce que le taux de marge des entreprises françaises est 10 points en dessous de la moyenne européenne. Et c’est parce que l’inculture économique crasse des Français encourage les politiciens à persister dans leurs erreurs, à taper sur le capital qui n’est que du travail différé, à taper sur l’actionnariat là où l’État est pourtant le plus gros actionnaire du pays…
Les politiciens de ce pays prennent maintenant tous les problèmes à l’envers, résonnent comme des barriques vides, ânonnent des ritournelles keynésiennes, anti-capitalistes et collectivistes qui, tous les jours, poussent un paquet supplémentaire de Français dans la misère et un autre vers l’exil. Et lorsque le peuple s’en rend compte, que fait-il ? Tout montre qu’il en réclame une deuxième couche.
Ce pays est foutu.
(Remerciements à Ministère Propagande pour l’infographie)
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