Ça y est, la synchronisation du gouvernement avec la croissance du pays est achevée : tout est nul. Rassurez-vous, ce n’est ni grave, ni une surprise. C’est même parfaitement en ligne avec ce qui était attendu. C’est Michel Sapin, le ministre en charge des finances, qui l’a clairement annoncé.
Eh non ! N’allez pas croire qu’une telle annonce et de tels chiffres soient mauvais : en réalité, sans les précieux coups de boutoirs d’Arnaud Montebourg contre le capitalisme apatride sans foi ni loi, elle aurait probablement été négative. On peut donc dire que cette croissance nulle est, finalement, une excellente nouvelle qui n’a certainement pas coupé l’appétit à Michel Sapin.
Certes, on pourrait regarder un peu autour de la France et constater que d’autres pays, malgré une conjoncture mondiale pas toujours simple, s’en sortent pourtant. L’Allemagne, qui n’est pas exempte de problèmes, donne pourtant une indication de ce qu’il est possible de faire. Et la baisse d’impôts a tout de même eu quelques effets bénéfiques en Angleterre qui n’affiche pas le même taux de chômage que la France. Le fait est que le gouvernement de Cameron a lâché la bride aux entreprises qui créent maintenant 100.000 emplois chaque mois à tel point que le 5 mai, l’OCDE rehaussait ses prévisions de croissance pour 2014, à 2.7%, la plus forte d’Europe.
De toute façon, on peut toujours mâtiner ces observations de la nécessaire prudence liée à des marchés boursiers et monétaires suspects, on peut largement admettre que les finances publiques des pays qui s’en sortent encore à peu près ne sont pas, loin s’en faut, en pleine forme. Mais les petites lignes au bilan, en bas de tableau, ne laissent guère de doute : après une France sous Sarkozy en plein marasme, la France de Hollande s’enfonce.
Devant ce constat, on doit s’interroger pour comprendre pourquoi ces chiffres sont présenté comme – je cite Sapin – « pas grave ».
Une raison se dégage d’abord : toute autre chose qu’un déni de réalité obligera de façon certaine l’exécutif à inscrire de nouvelles prévisions de PIB et, surtout, de recettes fiscales dans la future loi de finances rectificative de juin, ce qui, vis-à-vis de l’étranger (FMI et Commission Européenne notamment), serait catastrophique. Et en terme de politique intérieure, admettre que la croissance a pris ses valises pour aller s’installer durablement outre-Rhin et outre-Manche revient à expliquer que le Pacte de Croissance, péniblement signé il y a deux semaines avec force dissensions dans la majorité, était basé sur des prévisions de PIB fausses. Autrement dit, l’encre n’a pas eu le temps de sécher que le pacte serait déjà caduc. Voilà qui n’aiderait pas à conserver une majorité rassemblée…
Tout ceci est ennuyeux, parce qu’à mesure qu’augmentera l’écart entre les prévisions et la réalité, tant les institutions étrangères que françaises seront obligées de demander un réalignement de la politique économique pour tenir compte des nouveaux chiffres. Bien sûr, on peut, comme le chef de l’État, s’entêter bizarrement sur la certitude d’un prochain retournement, dans six mois, un an, deux ans (allez savoir), mais c’est un pari risqué, surtout avec les données macro-économiques actuelles, et les problèmes structurels français.
Bon, OK, les espoirs du candidat Hollande (0.5% en 2012, 1.7% en 2013, et 2 à 2.5% à la fin du mandat) paraissent particulièrement décalés deux ans après le début de son mandat, mais on peut accorder au candidat Hollande une ignorance de l’ampleur de la crise à laquelle le président, maintenant, ne peut plus et ne doit plus faire référence : non seulement, il a eu le temps de prendre la mesure des dégâts, autant liés à la conjoncture très défavorable qu’aux imbécilités politiques d’une droite économiquement à la rue, mais il a aussi largement eu le temps d’agir pour corriger le tir.
Or, ni lui ni la fine équipe en place ne l’ont fait. Montebourg continue d’agonir les entreprises de son mépris (la dernière en date étant Google, au sujet de la recherche) et le dernier décret pondu dans l’urgence, même s’il restera probablement inapplicable, montre de façon assez symptomatique l’idéologie qui agite le ministre et, par extension, le gouvernement : le repli sur soi, le protectionnisme le plus agressif, et une attaque brouillonne et répétitive des valeurs entrepreneuriale… On voit mal dans cette attitude ce qui va relancer le moteur économique français.
Quant à la dernière manœuvre de Valls, elle laisse songeur. À quelques jours des élections européennes, le premier ministre se rend compte, ingénu, que la pression fiscale serait un tantinet trop forte, notamment par l’arrivée récente et pas du tout voulue d’1,8 millions de nouveaux ménages (soit 3 millions de Français) dont, statistiquement, une partie avait le bon goût de voter pour les socialistes et qui risquent bien, avec le petit rappel citoyen et fiscal, de ne plus adouber le parti de leurs votes. On comprend bien qu’ici, il s’agit de calmer le jeu avec les européennes qui s’approchent, même si la proposition semble délicieusement parfumée de panique.
Et pour rattraper le coup, Manuel propose donc d’ajouter une réduction calculée sur le revenu fiscal de référence. Si, bien sûr, cette réduction d’impôts est toujours bonne à prendre, l’aspect « simplification fiscale » est encore une fois oublié. Et comme d’habitude, l’option « On annule ce qui avait créé le problème en premier lieu » n’a pas été choisie.
En outre, cela revient à constater une baisse d’un milliard d’euros dans les caisses de l’État, fort dépourvues. Si la mesure est effectivement appliquée, et atteint ses objectifs, il va donc falloir trouver un milliard supplémentaire ailleurs… Ou faire des coupes.
Or, la solution proposée par Valls pour dégoter ce milliard n’est pas, justement, d’adapter le périmètre de l’État pour compenser cette perte de revenus. Pour lui, il suffira d’intensifier la lutte contre la fraude fiscale.
La situation est donc la suivante : la croissance est nulle, les perspective économiques sont médiocres, mais le gouvernement, refusant de prendre en compte les exemples pourtant éclairant autour de la France, continue à déployer un enfumage positivement grandiose pour camoufler son absence de toute coupe budgétaire pourtant nécessaire, et d’afficher une attitude négative, voire hostile, aux entreprises.
Forcément, ça va marcher.
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