Hernando de Soto est un économiste péruvien, président de
l'Institut
pour la liberté et la démocratie (Lima, Pérou). Il s’est fait
connaître avec la parution en 2000 du livre The Mystery of Capital.
Cet ouvrage a fait l'objet d'une traduction française, sous le titre : Le
Mystère du capital. Pourquoi le capitalisme triomphe en Occident et échoue
partout ailleurs, réédité en poche chez Flammarion en 2010. Avec
son institut, il se consacre, par le biais d’un travail sur le terrain, à la
compréhension des causes juridiques de l’exclusion économique et à la
présentation aux gouvernements et aux institutions civiles des moyens
permettant de mettre en place une politique économique et sociale susceptible
d'assurer progrès et prospérité à tous les agents économiques
Cet économiste, qui a consacré sa vie à la cause des
pauvres en Amérique latine, estime que le capitalisme réel n’a jamais
été mis en œuvre dans la plupart des pays en voie de développement. En
effet, les secteurs privés de ces pays fonctionnent en grande partie par la
lutte pour l’accès à des faveurs du gouvernement, à des monopoles et à des
privilèges. Leur approche économique consiste à essayer d'exclure ou de
marginaliser les concurrents – non en augmentant en quantité et en qualité la
production, mais par des moyens politiques, la contrainte législative, les
droits de douane et les nombreuses ressources de coercition juridique à la
disposition d'un État moderne.
Ce sont ces gens-là qui donnent au capitalisme sa mauvaise
réputation. C'est pourquoi de Soto caractérise ces économies
officielles non pas comme des économies de marché, mais comme des économies
mercantilistes. On parle également de capitalisme de copinage ou de
connivence.
Mais l'Occident, aussi, a un passé
mercantiliste. Alors, comment le capitalisme occidental a-t-il évolué depuis ses origines mercantilistes jusqu’aux
sociétés de richesse à grande échelle ?
Hernando de Soto soutient que la richesse de l'Occident ne
provient pas du colonialisme, mais des institutions de la propriété et des
mécanismes juridiques par lesquels les premiers Américains et les Européens
furent capables d'extraire une plus grande valeur des marchandises et
du capital.
La liberté de créer un capital et de le transmettre (ou ce
qui revient au même, le droit de propriété), n’existe pas partout dans le
monde. Nous avons mis nous-mêmes en Occident longtemps à nous débarrasser du
système féodal. Il en va de même dans le reste du monde.
« Marx avait raison en disant que la tendance naturelle du
capitalisme à son début est de se concentrer. C’est pour cela que nombre de
pays qui l’ont expérimenté ont échoué au XIXe et au XXe, en Amérique latine
et en Russie. S’il a prospéré en Occident, c’est qu’à l’origine on a trouvé
un moyen institutionnel de reconnaître et de protéger les droits de
propriété », écrit-il.
Selon lui, les pauvres manquent de titres juridiques
garantissant leur propriété. En conséquence, ils sont incapables d'utiliser
leurs actifs. Par exemple, ils ne peuvent pas obtenir de prêts bancaires pour
développer leurs activités ou améliorer leurs propriétés. Avec ses collègues,
il a calculé le montant du « capital mort » dans des actifs sans titre
détenus par les pauvres du monde. Il est arrivé au chiffre de 9,3 trillions
de dollars, une somme qui dépasse de loin le montant de l'aide étrangère
accordée aux pays en développement depuis 1945.
Le système économique fonctionne réellement bien au Chili,
en Colombie, et au Pérou, là où les dirigeants sont à l'écoute de tous les
citoyens. Il ne fonctionne pas au Venezuela, à Cuba et en Argentine,
pays dans lesquels les chefs d’États prétendent agir au nom du peuple mais
dans le mépris des réalités économiques. Il fonctionne également assez mal au
Brésil, là où va justement se dérouler la coupe du monde en juin-juillet
2014. Dans le prochain article, nous nous pencherons sur ce grand pays
d’Amérique latine.
À lire : le chapitre premier du livre Le mystère du capital
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