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« Je
vous le dis, la liberté et les droits humains en Amérique sont
condamnés. Le gouvernement américain va conduire son peuple, et
l'Occident en général, dans un enfer insupportable et une vie
étouffante. « Oussama ben Laden, Octobre, 2001 (cité
dans NewsMax.com 01/02/02).
Hélas,
on peut dire que Ben Laden avait vu juste. Dans le sillage du 11 septembre
2001 et de la menace terroriste persistante, le gouvernement américain
a mis en place le « USA Patriot Act »,
sous Bush Jr., ainsi que d’autres nouvelles lois et décrets
anti-terroristes sous Obama. Depuis, surveillance universelle, saisies de
biens arbitraires, emprisonnements sans procès et arrestations
sommaires de « suspects » sont devenus des pratiques courantes.
Des pratiques qu’on croyait pourtant révolues depuis l'Allemagne
nazie et la Russie soviétique. De telles violations des
libertés et de la vie privée ont-elles
leur place dans une société libre et civilisée et font-elles de l’Amérique un pays plus
sûr ? Telles sont quelques-unes des questions qui furent
abordées par les participants aux différentes tables rondes
organisées au cours de la FreedomFest 2014
à Las Vegas.
L’espionnage électronique
des citoyens
Petit rappel
des faits. Depuis le 11 Septembre, plus de 2 000 personnes, dont de nombreux
citoyens américains, ont été emprisonnés par le
FBI et la police au nom de la « lutte contre le terrorisme ».
Seuls deux d'entre eux ont été inculpés d'un crime
associé au 11 septembre. Conformément à l'article
207 (III) du Patriot Act,
le gouvernement fédéral peut espionner tous les appels
téléphoniques, fax et e-mail à volonté –
sans mandat de perquisition. Les fournisseurs de services Internet
doivent retourner vos dossiers de courrier électronique et leurs
informations sur la clientèle sur simple demande du
gouvernement. Les compagnies de téléphone doivent
également remettre des enregistrements téléphoniques
détaillés, y compris les numéros de carte de
crédit ou de comptes bancaires utilisés pour les
paiements. Récemment, le FBI a développé un nouveau
logiciel appelé « lanterne magique » qui permet
d'enregistrer chaque frappe faite sur un ordinateur.
Le ciblage de l’opposition par l’IRS
(Internal
Revenue Service).
Plus grave
encore, la frontière qui sépare le groupe terroriste de
l'opposition politique s'est progressivement estompée. Le pouvoir se
limite rarement à un objectif déclaré et c’est
ainsi que la définition des groupes terroristes potentiels a
été élargie pour inclure des groupes comme le Tea Party. En 2011, le vice-président Joe Biden a accusé le Tea
Party d'avoir « agi comme des terroristes » dans leur combat
contre le relèvement du plafond de la dette. Or quelques mois plus
tard, l’IRS, le département du fisc américain, a pris
pour cible les membres du Tea Party Patriot. L’affaire a été
révélée au grand jour et a mis dans l’embarras
Obama et le parti démocrate.
Ainsi, Jenny
Beth Martin, co-fondatrice du mouvement Tea Party Patriot, a expliqué au cours d’une
table-ronde qu'environ 1 pour cent des contribuables américains
étaient contrôlés chaque année par l'IRS, tandis
que 10 pour cent de ceux qui ont donné de l'argent à des
groupes Tea Party ont été
contrôlés depuis 2011.
La guerre contre la drogue et la militarisation
de la police
Traditionnellement
en Amérique, le travail de l'armée était
d'anéantir l'ennemi et le travail de la police était de
maintenir la paix. Aujourd’hui les deux tendent à se confondre,
expliquait le journaliste du Washington
Post Radley Balko,
auteur de « Rise
of the Cop Warrior ». Selon lui, il existe une autre raison
que le terrorisme à la montée en puissance de la dictature aux
USA : c’est la guerre contre la drogue. Celle-ci a
créé un environnement dans lequel il est devenu acceptable
d'appliquer la langue et la tactique de l'armée pour lutter contre la
criminalité liée aux drogues, y compris au plus bas de
l’échelle, avec les simples consommateurs de marijuana.
En 1970, il y
avait une équipe du SWAT (force paramilitaire d’intervention
rapide) dans tout le pays, basée à Los Angeles. Il
s’agissait de répondre aux émeutes de 1965 et au climat
d’insurrection urbaine qui s’était installé. Il y a
aujourd’hui près de 500 équipes d'intervention, y compris
dans les petites villes tranquilles du Midwest ou du Sud. Cette
militarisation de la police a été encouragée par les
programmes fédéraux qui ont permis aux services de police
locaux d'acquérir du matériel militaire
excédentaire. Des millions d'articles du Pentagone ont
trouvé ainsi leur chemin vers les services de police locaux, expliquait
Balko, y compris des lance-grenades, des
véhicules blindés, des chars et des mitrailleuses.
Le
résultat de cette escalade insensée est qu’on recense
aujourd’hui des dizaines d'incidents au cours desquels la police a
perquisitionné de simples citoyens, sans mandat, les terrorisant, les
blessant et parfois tuant des innocents. Dans son livre, Radley
Balko raconte plusieurs incidents sanglants, avec
entrée par effraction dans les maisons de
« présumés » trafiquants, sans mandat,
avec pour simple motif la recherche de drogues illicites, de prostituées
ou même de parties de poker illégales. Du fait de leur
immunité, il est impossible ou très difficile pour les gens de
déposer des plaintes contre les policiers du SWAT.
En fin de
compte, l'augmentation massive depuis 30 ans des équipes
d'intervention du SWAT ne semble pas avoir fait beaucoup pour réduire
l'offre de drogues… Quoi qu’il en soit, selon le journaliste Balko la « règle de droit » inscrite
dans le Bill of Rights – qui protège
les innocents – doit simplement être strictement
respectée, et les nouvelles lois « anti-terroristes » doivent
être abrogées. Permettre au gouvernement de détruire les
libertés au nom de la lutte contre le terrorisme, risque de tuer ce
qui a fait de l'Amérique une société forte,
prospère et décente. « Ne donnons pas à
Oussama ben Laden la victoire finale », a-t-il
ajouté en forme de conclusion.
Chronique de la FreedomFest
2014
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