Mes chères contrariennes, mes chers contrariens !
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C’est une histoire importante mais pas surprenante. Dans ces colonnes, je dénonce sans relâche la collusion évidente entre des pouvoirs politiques et des régulateurs au pire totalement corrompus (bien qu’en politiquement correct moderne on préfère parler pudiquement de simple conflits d’intérêts) et au mieux fondamentalement incompétents.
Au cœur de la crise que nous traversons se pose un sujet à la fois complexe et épineux et certainement jamais assez abordé et développé. Celui des contre-pouvoirs et je préfère ce terme et ce concept de contre-pouvoir à celui de « régulation ». La règle, le règlement, la régulation, tout cela n’a en soit aucun sens si aucun moyen cohérent et coercitif existe pour faire appliquer ces lois, règles et règlement. Pire, une loi, une règle ou règlement devrait être intelligible par tous et ne pas nécessiter 150 000 pages de texte. La véritable question est bien celle des contre-pouvoirs.
De façon générale et quel que soit le sujet, si vous donnez à quelqu’un tous les pouvoirs, il finira par les utiliser de façon malsaine et à son propre avantage. Si les policiers se tiennent convenablement c’est parce qu’il y a une « police des polices ». Il faut donc des contrôles et de la surveillance. Mais pour cela il faut une volonté politique forte allant à l’encontre du « big business » et de l’argent roi. Or, partout dans le monde, depuis la chute du mur de Berlin et la fin d’un contre-pouvoir essentiel en termes idéologiques à savoir le communisme, nous nous sommes remis à adorer le « veau d’or ». Seul compte désormais l’argent, le pognon, le fric, le flouze, le blé, plus, toujours plus, encore plus. Pour quoi faire ? Pour rien, juste pour l’accumulation jouissive de l’argent et accessoirement du pouvoir que ce dernier procure, pouvoir rarement utilisé à des fins humanistes.
Alors il est évident que cette collusion est devenue incontrôlable. Il est évident que les lois passées, les traités négociés de façon générale le sont à l’encontre des intérêts de tous les peuples. Ils le sont à vocation exclusivement de ces grandes multinationales. Nous sommes rentrés officiellement dans l’ère du totalitarisme marchand.
Simplement, parfois, le mur du silence et de la lâcheté collective se craquèle et certains sortent de leur silence avec des preuves irréfutables de la dérive scandaleuse que l’on ne veut pas voir du système dans lequel nous vivons.
Cette femme, par qui ce nouveau scandale a été rendu public, a bien évidemment été licenciée uniquement « en raison de son manque de résultat personnel ». C’est sûr qu’il est difficile d’être en charge du contrôle de Goldman Sachs, la banque qui dirige le monde, un monstre financier tentaculaire que l’on a laissé se développer sans entrave et dont désormais le pouvoir et la taille menace au-delà du système économique le système démocratique.
Aujourd’hui, nous parlerons de Goldman Sachs mais cette banque, aussi néfaste soit-elle, n’est qu’une partie de notre problème. D’abord parce qu’il existe d’autres banques, comme la Deutsch Bank en Allemagne dont la taille est telle et l’exposition en produits dérivés tellement hallucinante qu’elle peut à elle seule faire sauter le monde (51 000 milliards de dollars de produits dérivés plus ou moins toxiques à son actif), mais aussi parce qu’il ne faut pas oublier, dans ce sombre tableau, le poids de grandes multinationales particulièrement nocives comme des entreprises du doux nom d’Halliburton (dont le fonds de commerce est la guerre privée) ou Monsanto (dont le fonds de commerce est de tuer ce qui survit aux guerres du premier et de laminer la biodiversité).
L’ensemble de ce système je l’appelle le « big businness ». Cet ensemble forme le « totalitarisme marchand », et le totalitarisme marchand, comme tout totalitarisme, est une dictature en soi. Une dictature qui avance masquée sous l’étendard de la liberté… de consommer, mais uniquement de consommer. Partout dans le monde dit « libre », les droits civiques et la liberté politique se réduisent comme peau de chagrin. Partout dans le monde dit « libre », les citoyens sont soumis à des doses intensives de propagande visant à fabriquer leur consentement et à façonner leur manière de penser en leur ôtant sciemment et volontairement tout libre arbitre. Partout nous sommes réduits à l’état de loques tout juste bonnes à donner leur « temps de cerveau disponible » aux lobotomisateurs que sont les émissions télé abrutissantes et bêtifiantes destinées à nous faire consommer toujours plus, pour toujours plus cher, et avec toujours moins d’utilité.
Nous avons, dans tout cela, perdu notre humanité, perdu notre liberté, perdu notre citoyenneté, perdu ce qui faisait de nous des femmes et des hommes libres. Ceux qui dénoncent cette situation sont au mieux traité de « pessimistes » rejetant le prôgrès, et au pire de complotistes dignes de l’internement psychiatrique d’office. Mais c’est l’inverse mes chers amis. Être bien adapté à une société malade n’est justement pas une preuve de bonne santé mentale.
Alors lorsque les preuves sont incontestables, lorsque les faits sont avérés, nous devons les partager au maximum et au plus grand nombre pour leur faire prendre conscience que nous sommes arrivés au bout de quelque chose et que cette crise ne trouvera une résolution réelle que si nous nous réapproprions le pouvoir et que nous refusons de jouer le jeu de la consommation que nous impose ce système inique.
Je vous traduis donc ici l’essentiel de cet article de l’agence Bloomberg qui revient sur cette affaire des enregistrements secrets entre la FED et les représentants de Goldman Sachs.
Traduction par mes soins et adaptation de cette article de l’Agence Bloomberg
« Il est fort probable que la plupart des gens seront d’accord sur le fait que les gens payés par le gouvernement des États-Unis pour réglementer Wall Street ont eu leurs lots de difficultés.
La plupart des gens seraient probablement d’accord sur deux raisons qui permettent d’expliquer ces difficultés.
Face à un système financier de plus en plus complexe, les régulateurs doivent se le faire expliquer par les financiers qui ont crée ce même système ultra-complexe avec pour résultat une pratique délétère et de plus en plus fréquente chez les régulateurs de quitter leur emploi du gouvernement pour un emploi beaucoup mieux rémunéré dans les banques mêmes qu’ils étaient autrefois destinés à réglementer et contrôler.
Les régulateurs de Wall Street sont des gens qui sont payés par Wall Street, à accepter les explications de Wall Street, et qui ont peu de moyens pour se défendre et pour faire respecter les règlements et les lois en vigueur.
Notre système de réglementation financière est évidemment dysfonctionnel. Mais parce que le sujet est si pénible, et les détails si compliqués, le public ne lui accorde pas beaucoup d’attention ni d’importance.
Cela pourrait bien changer aujourd’hui, car – vendredi 26 septembre – le programme de radio » This American Life « a diffusé une histoire à couper le souffle sur la régulation de Wall Street, et le public n’aura aucune difficulté à comprendre .
Le journaliste, Jake Bernstein, a obtenu 46 heures de bandes magnétiques, faites en secret par une employée de la Réserve fédérale.
46 heures de conversations au sein de la FED, et entre la FED et Goldman Sachs.
C’est un document extraordinaire. Le but n’est pas ici d’instruire un procès, mais la conclusion essentielle à retenir est la suivante : la FED n’a pas réussi à réglementer les banques, car elle n’a pas encouragé ses employés à poser des questions, à exprimer leurs opinions ou à signaler des problèmes.
C’est même tout le contraire : la FED encourage ses employés à garder la tête baissée, à obéir à leurs dirigeants et à apaiser les banques.
Si les régulateurs bancaires n’ont pas réussi à faire correctement leur travail ce n’est pas parce qu’ils n’avaient pas les outils pour le faire, mais parce qu’ils ont été dissuadés de les utiliser.
Le rapport cite les employés de la FED disant des choses comme, « vous ne pouvez pas penser quelque chose comme ça » ou encore « personne ne se sent individuellement responsable des erreurs de la crise financière parce que les décisions sont prises par consensus ».
En plus d’un échec financier, nous sommes face à un échec culturel.
À la fin de 2011, les régulateurs ont été dotés de pouvoirs réglementaires plus larges par la loi Dodd-Frank, ils ont embauché un tas de nouvelles personnes et l’une d’elle était une femme de forte volonté à l’esprit indépendant nommé Carmen Segarra.
« This American Life » a interrogé des personnes qui avaient travaillé avec elle, avant son arrivée à la FED, qui la décrive comme intelligente et parfois brutale, mais jamais non professionnelle. Elle est évidemment brillante et curieuse, parle quatre langues, et est diplômée d’Harvard, de Cornell et Columbia. Elle est également bien évidemment informée : avant d’aller travailler à la FED, elle a travaillé directement, et avec succès, pour les services juridiques et de la conformité des grandes banques. Elle a travaillé pour la FED après la crise financière, dit-elle, que parce qu’elle pensait qu’elle avait la capacité d’aider la FED pour réparer le système.
Au début de 2012, Segarra a été affectée au contrôle et à la surveillance de… Goldman Sachs, et a donc été installée à l’intérieur de Goldman. (Les personnes qui régulent les banques pour la FED sont physiquement stationnées à l’intérieur des banques.) (Note personnelle de votre auteur-serviteur ici présent, faut tout de même être un peu con pour croire que l’on peut réglementer et contrôler un monstre comme Goldman Sachs, tout seul avec ses 10 petits doigts fussent-ils tout boudinés ou pas.)
Dès le départ, son travail lui a semblé très différent de ce qu’elle avait imaginé (bon il n’y a pas à dire elle est tout de même au mieux très naïve cette brave dame, tout le monde sait bien que ce monde-là est un monde de faux culs pour le vrai fric). Dans les réunions, si l’une des personnes Goldman disait quelque chose de révélateur voire d’alarmant, les autres employés de la FED présents à la réunion les ignoraient ou les minimisaient.
Par exemple, dans une réunion, un employé de Goldman a estimé que « pour ses clients les plus riches certaines lois ne s’appliquaient pas »…. (Pfff, quelle surprise, quel scoop, dites donc, cette personne que je remercie tout de même d’avoir enregistrer les sbires de Goldman Sachs venait de découvrir l’eau chaude, c’est-à-dire que les riches avaient des passes-droits.)
Après cette réunion, Segarra se tourna vers son supérieur à la FED pour lui dire qu’elle avait été surprise par cette déclaration – ce à quoi son chef a répondu : «Vous n’avez pas entendu cela… » (Goldman Sachs a toujours raison, c’est l’article 1 et lorsque Goldman Sachs a tort, vous devez évidemment vous reporter immédiatement à l’article 1 à savoir que Goldman à toujours raison. Si elle m’avait demandé, je lui aurais expliqué comment tout cela allait se passer et évidemment… se finir.)
Bon, en gros, le chef de la fille a fini par lui demander de modifier les comptes rendus de réunion pour biffer tout ce qui ne relevait pas du « domaine public » n’est-ce pas, et comme elle entendait bien ce que ses oreilles entendaient, elle est allée acheter un magnétophone… enfin, maintenant, c’est des enregistreurs numériques vachement tout petits qui se planquent partout à faire pâlir d’envie un agent double du KGB de la guerre froide (hein Vladimir).
Depuis ce jour-là et jusqu’à ce qu’elle se fasse virer, elle a enregistré ses réunions de Goldman Sachs.
Alors que retenir de cette histoire ?
1 Vous saviez que les banques étaient plus ou moins contrôlées par les organismes de réglementation et plutôt moins que plus, maintenant vous en avez la certitude.
2 La seule raison pour laquelle vous en êtes désormais sur c’est qu’une femme, Carmen Segarra, a eu le courage de lutter contre le système. Elle a payé le prix fort pour nous informer de l’évidence. Elle a perdu son emploi, ruiné sa carrière, et devra sans aucun doute supporter aussi une vie de poursuites et de calomnies.
Alors qu’allez-vous faire à ce sujet ? En ce moment, la FED nous explique que la crise est en train de passer mais ce n’est pas le cas. »
Mon point de vue personnel sur cette affaire-là.
Objectivement Carmen ne nous apprend rien de neuf, chez Goldman c’est des pourris, on le savait depuis bien longtemps. La FED et les autres banques centrales ont des liens de consanguinité avec les grandes banques, rien de nouveau. Il y a de la collusion ? C’est une évidence. Ils se gavent tous sur le dos des peuples ? Mais c’est leur raison d’être. Ils sont juste là pour tondre le mouton, le pigeon. C’est presque dans leur « objet social ».
Non, ce qu’il faut retenir c’est que cette fois, les enregistrements diffusés sont une preuve formelle de ce que tous les observateurs savent, supputent ou imaginent. Cette fois, nous en avons la certitude.
Il n’y a, là-dedans, nullement besoin d’invoquer quelque théorie du complot que ce soit car il est un complot qui se forme toujours de façon parfaitement naturelle et depuis la nuit des temps et il s’agit des communautés d’intérêt. Aujourd’hui, le monde est gouverné, dirigé par une poignée de communautés d’intérêts. En réalité, vous en avez 4. Les banques, les fabricants d’armes, les « pétroliers » au sens large et enfin le reste des grandes multinationales et je peux vous assurer que leurs intérêts propres ne sont pas, mais alors pas du tout ceux des peuples et c’est précisément la raison pour laquelle ces 4 grandes communautés d’intérêts nous ont fait basculer dans le « totalitarisme marchand ». Elles ont réussi, pour la simple et bonne raison que les peuples ont abdiqué tout pouvoir politique et que progressivement tous les contre-pouvoirs se sont effacés.
Oubliez le village global ou la mondialisation heureuse. Bienvenue dans la dictature mondiale 2.0. Vous allez adorer.
Préparez-vous et restez à l’écoute.
À demain… si vous le voulez bien !!
Charles SANNAT
« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes » (JFK)