Deutsche Statbank, une
division de VR-Bank Altenburger Land, qui a été fondée en 1859, n’est
peut-être pas la plus grosse banque d’Allemagne, mais elle restera la
première banque à avoir confirmé les craintes de longue date des épargnants
allemands : la fureur de Draghi.
Les clients individuels
et entreprises qui possèdent des dépôts de plus de 500.000 euros profiteront
à compter du premier novembre d’un « taux d’intérêt négatif » de
0,25%. En d’autres termes, ils auront à payer 0,25% par an à la banque pour
avoir le privilège de lui confier leur argent durement gagné.
L’inflation a eu des
effets similaires sur l’environnement des taux d’intérêt zéro à ceux des
politiques de la BCE et des autres banques centrales sur les épargnants ;
mais cette fois-ci, c’est officiel, et plus personne ne peut se contenter de
nier. Plutôt que de prêter votre argent aux banques afin qu’elles puissent le
prêter à leur tour à des entreprises et des clients privés à des fins
économiques diverses, vous feriez mieux de le cacher dans votre cave. Chapeau
bas toutefois à la BCE et autres, qui sont parvenues, au travers du régime de
taux d’intérêt zéro, à transformer les dépôts bancaires d’un actif productif
en un passif coûteux.
C’est ce que les
Allemands appellent un « intérêt punitif ». La toute dernière
mesure prise par les banques centrales pour confisquer au fil du temps le
capital qu’individus et entreprises ont pu accumuler, et qui aurait dû
réintégrer l’économie par l’intermédiaire des banques.
L’été dernier, la BCE
imposait des taux de dépôt négatifs à ses banques membres. Ils étaient d’abord
fixés à 0,1%, puis ont doublé pour passer à 0,2%. La raison derrière tout
cela ? La BCE a fait durer son « mandat », qui vise à, comme
elle l’a elle-même expliqué, « assurer une stabilité de prix proche de
mais inférieure à une inflation de 2% », qui à son tour est « une
condition nécessaire à une croissance durable en zone euro ». C’est n’importe
quoi. Il n’existe rien du tout qui indique que l’inflation soit nécessaire à
la croissance économique, et toutes les preuves du monde que la croissance
économique puisse stimuler l’inflation. Et la BCE le sait. Mais il ne s’agit
là que du prétexte officiel qui lui permet d’utiliser l’inflation pour
réduire la dette – et l’épargne.
« L’épargne ne
souffrira d’aucun impact direct, nous annonçait la BCE il y a
cinq mois. Seules les banques qui déposent de l’argent sur certains
comptes auprès de la BCE auront à payer des intérêts. Les banques
commerciales pourraient bien évidemment choisir de réduire les taux d’intérêt
de leurs épargnants ».
Une bonne chose pour les
épargnants :
Les décisions de la BCE
quant aux taux d’intérêt finiront par bénéficier aux épargnants, parce qu’elles
soutiennent la croissance et génèrent ainsi un climat économique qui
permettra aux taux d’intérêt d’atteindre un niveau plus élevé.
Un grand merci à la BCE
pour avoir sauvé les épargnants !
Voilà qui s’intègre parfaitement
dans sa politique de « punition des épargnants » et de « récompense
des emprunteurs ». Pour mettre cette politique en perspective, elle a
elle-même ajouté que « ce comportement n’est pas spécifique à la BCE, mais
s’applique à toutes les banques centrales ».
La fureur de Draghi s’abat
désormais sur les particuliers et entreprises d’Allemagne. Une première
banque s’essaye aux taux d’intérêt négatifs. Les autres sont semble-t-il
prêtes à suivre son exemple. Elles se contentent pour l’instant d’en observer
les conséquences mais refusent d’exclure la possibilité qu’elles en feront un
jour de même.
« Nous ne pensons
pas prendre cette direction », a dit Direktbank ING Diba à Welt.
« Nous sommes d’avis
qu’imposer des taux d’intérêt négatifs aux dépôts bancaires – qu’ils
appartiennent à des particuliers comme à des entreprises – envoie un
dangereux signal », a déclaré un porte-parole de la Fédération allemande
des caisses d’épargne (DSGV). Il n’a cependant pas exclu la possibilité que
certaines banques membres suivent cet exemple dans le futur.
« Les banques
tenteront au mieux d’éviter les taux d’intérêt négatifs, a expliqué l’Association
fédérale des banques coopératives allemandes, mais dans cet environnement de
taux d’intérêt zéro imposé par la BCE, des taux d’intérêt négatifs sur les
très gros dépôts ne peuvent pas être exclus ».
« Nous n’imposerons
pas pour le moment de taux d’intérêt négatifs à nos clients individuels »,
a annoncé Commerzbank, la deuxième plus grosse banque du pays. Pour le moment…
« Nous ne sommes
pas en mesure de certifier que nous n’aurons pas recours à des taux d’intérêt
punitifs dans le futur », a décrété Frank Kohler, PDG de Sparda-Bank
Berlin, la plus grosse banque coopérative du pays en termes de membres. Il a
ajouté que les banques qui sont le plus susceptibles de mettre en place des
taux d’intérêt négatifs sont celles dont le modèle d’entreprise repose sur
les activités bancaires liées aux particuliers et entreprises, et dont les
recettes ne peuvent être alimentées par les activités d’investissement, la
prise de risques, la manipulation de marchés et d’autres activités de grosses
banques telles que celles qui ont « généré la crise financière de 2007 ».
« Ce sont
précisément les banques qui n’ont jamais placé le système financier en
position de risque qui souffrent le plus, a-t-il ajouté. Voilà qui n’est malheureusement
pas dénué d’ironie ».
La voie vers les
intérêts punitifs a été ouverte. Tout commencera par de petits intérêts
négatifs sur de gros dépôts. Et puis petit à petit, les dépôts deviendront
moins importants et les intérêts négatifs de plus en plus larges. Aucun dépôt
ne sera plus en sécurité. Voilà à quoi ressemble la stratégie bancaire
centrale de « punition des épargnants jusqu’à ce qu’ils changent d’attitude ».
Les Allemands n’auront
pas la chance de le faire, mais les Suisses se rendront bientôt aux urnes
pour décider quoi faire de leur or. Un vote qui pourrait avoir des
répercussions sur le marché de l’or et les autres banques centrales. Lisez
ceci : What
the Swiss Gold Referendum Means for Central Banks