Mes chères contrariennes, mes chers contrariens !
C’est avec un immense plaisir que je vous retrouve aujourd’hui pour une nouvelle année qui démarre sur les chapeaux de roues avec l’Allemagne qui envisage tout simplement officiellement pour la première fois de laisser sortir la Grèce de la zone euro… C’est une sacrée nouvelle et nous y reviendrons longuement dans ce premier édito de l’année.
Avant toute chose, je souhaitais, à tous, vous présenter mes meilleurs vœux de bonheur et de santé, le reste n’étant que de l’intendance qui suivra plus ou moins bien. L’essentiel est bien le bonheur alors ce n’est que cela que je vous souhaiterai pour 2015. Soyez heureux.
2015 s’annonce une année complexe !
J’ai eu quelques messages raillant le fait qu’il n’y avait pas eu d’attaque de Noël de la part des marchés. Certes, et alors ? Pour celles et ceux qui n’auraient pas compris ou qui ne veulent pas comprendre, parler d’un risque, évoquer des rumeurs sérieuses et crédibles ne veut pas dire par définition que cela devient une certitude. Nous n’avons pas de certitudes sur tous les sujets.
Alors bien sûr, il n’y a pas eu d’attaque et nous devons nous en réjouir. Certes Mario Draghi a déclaré qu’il irait jusqu’au bout de son mandat mais uniquement parce que la rumeur enflait tellement qu’il a été obligé d’intervenir publiquement pour la démentir, ce qui prouve bien que dans notre monde ultramédiatisé il n’y a pas de fumée sans feu.
Nous sommes au tout début de 2015, nous entamons la 8e année après la crise dite des « subprimes », et que s’est-il passé depuis ? Le constat est implacable.
La croissance économique est au mieux anémique. Les mécanismes européens sont une vaste fumisterie tant il s’agit soit d’artifices de communication (l’Union bancaire par exemple), soit d’une grande plaisanterie économique où des pays surendettés s’endettent encore plus avec de l’argent qu’ils n’ont pas pour prêter le tout à des pays carrément en faillite comme la Grèce qui jamais ne pourront rembourser. Les dettes d’États justement s’envolent… Jamais nous n’avons cumulé des déficits aussi importants et des dettes aussi monstrueuses.
L’Allemagne n’acceptera pas la monétisation de la part de la BCE…
Cela fait donc huit ans que l’Allemagne, la première économie de la zone euro, a réussi à ne pas engager son économie pour renflouer les autres pays européens. Certes l’Allemagne a consenti quelques efforts et quelques dépenses mais somme toute particulièrement limités par rapport à ce qu’elle aurait pu faire. Pour le moment, l’Allemagne n’a pris aucun risque et prône une vertu monétaire sans faille que la baisse du bilan de la BCE matérialise sans conteste.
En zone euro, sous la pression allemande, la masse monétaire baisse et cela leur convient très bien. La rigueur. Rien de plus, rien de moins.
Tout le monde veut croire qu’au pied du mur l’Allemagne dira à Mario Draghi : « Vas-y Mario, fais péter les billets… » C’est ce que veulent croire nos hommes politiques en France (si l’Allemagne cède au dernier moment, Hollande n’aura pas à faire une rigueur et une austérité trop forte), c’est ce que veulent croire nos journalistes et nos médias, et c’est évidemment ce que veulent croire les marchés véritablement drogués à l’argent gratuit des « quantitative easing ».
Vouloir le croire ne veut pas dire que cela va se produire. Je peux évidemment me tromper et cela ne me pose aucun problème. Je ne vous donne pas LA vérité, je partage avec vous des raisonnements. Certains seront bons et justes, d’autres erronés. Dans tous les cas, votre responsabilité personnelle et votre libre-arbitre vous permettront de vous forger votre propre conviction.
Mon analyse consiste à dire que rien ne garantit plus de voir l’Allemagne céder au dernier moment que de la voir ne rien céder du tout au sujet de la mutualisation des dettes et de la création monétaire. Partir du principe que l’Allemagne, qui refuse avec une constance exemplaire depuis maintenant presque 8 ans de se lancer dans une telle politique monétaire débridée, le fera au bout de la 9 année… me semble intellectuellement un peu léger et je ne prendrai pas le pari là-dessus pour engager mon patrimoine sur cette hypothèse. Au contraire. Je préfère partir de l’hypothèse inverse et si mon patrimoine peut résister justement à un refus de l’Allemagne de la fuite en avant monétaire, alors il devrait survivre au fait que l’Allemagne cède plus ou moins partiellement au « dernier moment » et « au pied du mur ».
L’Allemagne refuse tout bluff ou chantage grec. La Grèce peut donc sortir de l’euro…
«Le gouvernement allemand juge quasiment inévitable une sortie (de la Grèce) de la zone euro, si le chef de l’opposition Alexis Tsipras (Gauche radicale Syriza) dirige le gouvernement après les élections (législatives), abandonne la ligne de rigueur budgétaire et ne rembourse plus les dettes du pays », affirme le site Web de l’hebdomadaire, en s’appuyant sur « des sources proches du gouvernement allemand »…
Voilà ce que l’on a appris ce week-end et c’est en revanche, depuis le début de la crise en 2007, une immense première. Pour la première fois, la chancelière allemande explique et fait passer le message que la Grèce peut sortir de l’euro, que cela ne représente plus du tout un risque systémique pour la zone euro et que si elle souhaite rester dans l’euro, la Grèce devra boire le calice de l’austérité jusqu’à la lie.
En effet, « Wolfgang Schäuble avait jugé que la Grèce était tenue de continuer sur la voie des réformes déjà engagées, «sans aucune alternative», quel que soit le résultat du futur scrutin ».
Les choses sont donc très clairement dites par les Allemands. Ils ne négocient rien, n’acceptent rien depuis 8 ans et ne veulent pas plus rembourser les dettes des autres aujourd’hui qu’hier… Alors pourquoi accepteraient-ils désormais l’inverse ? Pour le moment, ils disent aux Grecs « souffrez ou sortez, on s’en fout mais on paiera pas un euro de plus pour vous »… Et vous savez quoi ? Ils diront exactement la même chose à la France ou à l’Italie qui, de surcroît, montrent leur incapacité à se réformer et à tenir leurs dépenses publiques. L’Allemagne n’a aucune bonne raison de faire confiance à la France et à l’administration Hollande.
J’ai toujours dit que la Grèce devait sortir de l’euro et qu’elle finirait par en sortir.
Et c’est évidemment ce que je souhaite à nos amis Grecs pour cette année 2015. Ho, la sortie de l’euro de la Grèce ne sera pas un remède miracle, mais… cela leur permettra, en récupérant leur souveraineté monétaire, de retrouver des marges de manœuvre.
Cela va créer également un précédent politique majeur, en montrant à tous les autres pays en difficulté (dont la France) que sortir de l’euro est possible et réalisable.
Finalement, je peux vous dire que tout cela n’est qu’une question de temps. La Grèce devait sortir de l’euro il y a 7 ans. Nous avons fait souffrir tout un peuple pour rien pendant 7 ans mais la réalité a la peau dure et les faits finissent par s’imposer à tous. Néanmoins, que de temps perdu pour rien et de souffrances inutiles…
Finalement, je peux vous dire que si les dettes française et italienne n’ont pas été attaquées à Noël, elles le seront un jour ou l’autre tant notre situation financière devient chaque jour un peu plus dramatique et tant notre pays s’approche un peu plus de l’insolvabilité. C’est une évidence. Je ne connais pas le moment, mais là encore notre niveau de dettes et notre incapacité à l’endiguer finiront par nous poser de graves problèmes surtout si l’euro, avec la sortie de la Grèce, n’est plus « irréversible ».
Finalement, je peux vous dire que la vérité et la réalité sont un mur et que l’on finit toujours par le percuter. Seule l’interrogation du moment perdure.
L’année 2015 verra probablement le retour sur le devant de la scène du risque d’explosion de la zone euro et c’est une bonne nouvelle car, depuis 8 ans encore une fois, nous n’avons rien fait, nous avons juste gagné du temps. 2015 sera l’année des actes, plus celle des paroles, et cela risque de s’avérer particulièrement difficile. En démarrant l’année avec un nouvel épisode grec, nous devons comprendre que désormais, l’euro… n’est plus irréversible.
Il est déjà trop tard, préparez-vous.
À demain… si vous le voulez bien !!
Charles SANNAT
« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes » (JFK)