Goldman Sachs prévoit depuis
quelques années déjà la dissolution de l’or. En juillet 2015, Jeff Currie
(directeur de recherche en marchandises pour la firme d’investissement) a
prédit que le prix du métal jaune passerait en-dessous des 1.000 dollars l’once
avant le début 2016. Mais cette prédiction ne s’est pas matérialisée, malgré
le fait que l’or était déjà inférieur à 1.000 dollars à l’époque de sa
déclaration.
Il n’en est pas moins que se
tromper quant à la direction de l’or ne l’a pas empêché de conseiller aux
investisseurs d’ouvrir des positions à découvert sur la marchandise en
février de cette année, et de déclarer que son cours passerait sous les 1.000
dollars sous les douze prochains mois. Selon lui, l’or est principalement une
valeur refuge en période de tourmente économique, et les Etats-Unis font
aujourd’hui face à un risque de récession minime – il n’y a donc aucune
raison pour les investisseurs de rechercher la sécurité offerte par l’or.
En revanche, Goldman Sachs, un
bastion d’apologistes keynésiens – et comme beaucoup d’autres sur Wall Street
– ne comprend pas ce qui influence réellement le prix de l’or… et la raison
pour laquelle il a gagné 18% depuis le début de cette année.
L’or est bien plus qu’une simple
valeur refuge. Il est la meilleure forme de monnaie connue de l’Homme, en
raison notamment de sa rareté et de son indestructibilité. Les institutions
financières n’apprécient pas l’or parce qu’il a tendance à grimper lorsque
les titres qu’elles vendent piquent du nez. Et les gouvernements le détestent
parce qu’il révèle la destruction persistante du pouvoir d’achat de la classe
moyenne au travers de la monétisation de la dette par les banques centrales.
La théorie avancée par Wall
Street depuis des années à l’encontre du métal jaune est qu’il ne verse pas d’intérêts.
Après tout, pourquoi posséder un actif qui ne verse aucun intérêt s’il est
possible de posséder un dépôt bancaire ou de la dette souveraine de court
terme ? Mais avec les taux d’intérêt négatifs sur la dette souveraine et
les taux de dépôt proches de zéro pourcent qui deviennent aujourd’hui la
norme, l’or ne représente plus une perte en termes de coûts d’opportunité.
Plus important encore, avec 7
trillions de dollars (30%) de la dette souveraine des pays développés aujourd’hui
sujets à des taux d’intérêt négatifs, il n’est même pas nécessaire de voir se
développer une inflation pour que les rendements réels deviennent négatifs. L’inflation
est traditionnellement favorable à l’or, parce qu’elle est un ingrédient
nécessaire à la baisse des taux nominaux réels. Lorsque les rendements sur
les espèces sont négatifs, les investisseurs recherchent une marchandise
capable de maintenir son pouvoir d’achat. Ce que Goldman Sachs ne parvient
pas à reconnaître, c’est que parce que les banques centrales ont forcé les
taux à la baisse, l’inflation n’a pas besoin de faire rage pour que les taux
d’intérêt réels passent dans le rouge.
Ainsi, l’argument depuis
longtemps utilisé contre l’or est invalide. Les investisseurs réalisent que
la sécurité offerte par la dette souveraine n’existe plus lorsqu’ils perdent
de l’argent sur leur principal.
Pire encore, les banquiers
centraux s’enfoncent davantage en territoire inconnu pour parvenir à leurs
objectifs d’inflation. Le directeur de la BCE, Mario Draghi, a récemment
accru son programme d’assouplissement quantitatif pour le porter à 80
milliards d’euros par mois contre 60 milliards précédemment, et achète
désormais de la dette d’entreprise pour parvenir à un niveau durable d’inflation.
Les banques centrales du monde ont promis de faire « tout leur possible »
pour parvenir à un taux d’inflation de 2%. Les investisseurs devront donc
bientôt retirer un minimum de 2% aux taux d’intérêt déjà négatifs qu’ils
touchent sur la dette souveraine et aux taux zéro offerts par les fonds des
marchés monétaires pour calculer leurs rendements réels.
Dans cet environnement, l’or
grimpe, parce que les citoyens du monde risquent de lourdes pertes en termes
de pouvoir d’achat de leur épargne.
Dans cette nouvelle dystopie
keynésienne, la croissance et l’inflation sont perçues comme une seule et
même chose. La théorie du succès est simple : imprimer de la monnaie
pour générer l’inflation. Voilà qui devrait faire grimper les prix des actifs
et abaisser les coûts d’emprunt, pour mener à une hausse de la création de
dette. Plus de dette signifie, pour les Keynésiens, une stimulation de la
demande en agrégats et de la croissance économique.
Mais la conséquence la plus
pernicieuse de cette dépendance est qu’il faut toujours plus de substance
pour parvenir au même résultat. Les économies globales sont devenues accro à
la dette, et les gouvernements sont forcés d’abaisser constamment les coûts d’emprunt
afin de libérer davantage de prêts pour les secteurs privé et public.
M. Currie et Goldman Sachs ne
semblent pas comprendre que des taux négatifs couplés à une hausse des
attentes d’inflation sont la recette parfaite d’une hausse de l’or –
notamment parce que les banques centrales n’ont plus d’autre choix que de
réduire perpétuellement la valeur de leur devise par rapport à celle de leurs
partenaires commerciaux. Même la Réserve fédérale a trouvé nécessaire de
revenir sur son projet de rehausser ses taux d’intérêt quatre fois cette
année après le déclin des marchés du mois de janvier dernier.
Cette folie n’a pas de fin. L’intervention
des banques centrales sur les marchés des capitaux est devenue si extrême que
ces dernières sont désormais incapables de vendre leurs propres titres et de
combattre l’inflation sans faire s’effondrer les valeurs des actions et des
obligations. En effet, les conséquences inévitables de leurs actions sont
désormais l’inflation et la dépression. C’est là la véritable raison pour
laquelle un marché haussier des métaux précieux vient d’apparaître.