L’éléphant n’est même pas encore
entré dans le magasin de porcelaine. C’est pourquoi je pense que la campagne
présidentielle de 2016 est digne d’un feuilleton télé. L’éléphant, qui se
tient devant la boutique de porcelaine, s’appelle discontinuité. Un
mot peut-être intimidant, mais qui décrit exactement ce qui attend les
Etats-Unis. Il signifie que toutes les choses familières ont une fin,
finissent par s’arrêter, ou ne plus fonctionner comme elles le devraient – en
commençant, manifestement, par le processus d’élections qui a lieu aujourd’hui
dans toute sa bizarrerie encore sans précédent.
L’une des raisons pour
lesquelles il est difficile de saisir ce qu’est la discontinuité est qu’un
grand nombre d’opérations et d’institutions de la vie de tous les jours sont
devenues, aux Etats-Unis, un réseau de rackets. Elles n’existent encore qu’au
travers de moyens malhonnêtes. Si nous ne nous mentions pas à nous-mêmes à
leur sujet, elles disparaîtraient.
Prenons par exemple le racket
automobile. Sans une classe moyenne solide et solvable, il est impossible de
vendre des voitures. Les Américains ont l’habitude de payer pour leurs
voitures sur plusieurs mois ou années. Si la classe moyenne se trouvait handicapée
par sa dette existante et par la disparition des emplois au point de ne pas
pouvoir contracter de nouveaux prêts automobiles, il faudrait continuer de
leur en offrir, sous des termes complètement insensés – tels que des prêts
sur sept ans et porteurs de zéro pourcent d’intérêts pour les voitures d’occasion
(qui ne vaudraient plus rien longtemps avant l’échéance d’un tel prêt).
La situation durera jusqu’à ce
qu’elle ne le puisse plus. Les fabricants automobiles et les banques (avec l’aide
des régulateurs du gouvernement et des pom-pom girls politiques) ont créé la
situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui en traitant les « subprimes »
de ces prêts automobiles de la même manière qu’ils ont traité les subprimes
des prêts immobiliers : en les rassemblant sous forme de lots plus
larges d’obligations, appelés obligations structurées adossées à des prêts
bancaires. Ces dernières sont, à leur tour, vendues à de gros fonds de
pension et assurances désespérés de rendements (d’intérêts plus élevés) sur
leurs investissements les plus sûrs qui préservent leur principal. Ces sources
de revenus « collatérales » sont certaines de s’amenuiser, parce
que ceux qui les versent ne sont par définition pas solvables, ce qui
signifie que la fin anticipée de leurs remboursements était à prévoir depuis
le début – ou tout simplement le fait qu’ils coulent complètement, et se
retrouvent à devoir toujours plus d’argent pour des tas de ferraille qui ont
perdu toute leur valeur.
Il n’est pas compliqué de
comprendre que cela se terminera en larmes pour toutes les parties
impliquées, mais nous acceptons la situation, parce qu’il ne semble y avoir
aucun autre moyen de 1) stimuler l’économie dite de consommation, et 2)
maintenir en vie la matrice suburbaine tant dépendante de l’automobile. Nous
avons pris ce qui aurait autrefois pu être une bonne idée, et l’avons
pervertie afin d’éviter tout changement difficile mais nécessaire à notre
époque de l’Histoire.
Le secteur de la santé est
devenu un racket si évident et odieux qu’il est difficile de croire qu’il n’ait
pas encore déclenché de révolution ou, au moins, de massacre dans les locaux
d’une compagnie d’assurance. Il est bien connu qu’une majorité des Américains
ne disposent même pas de 500 dollars pour faire réparer leur véhicule.
Comment sont-ils supposés surmonter un incident médical de 5.000 dollars ou
plus ? Ils ne le peuvent pas. Leur santé mentale se trouve détruite par
le processus de soin de leur situation physique. Il est assez commun pour eux
de se déclarer en banqueroute après une simple appendicectomie ou une visite
aux urgences pour un bras cassé. Bien souvent, ils ne vont même pas voir leur
médecin. Ils savent comment la situation se terminerait. L’industrie pharmaceutique
a été autorisée à se convertir en un racket d’extorsion. Vous avez une forme
de cancer peu commune ? Nous avons quelque chose qui pourrait vous
aider. Oh, son coût ? 43.000 dollars par mois…
Quel genre de politique autorise
une extorsion si cruelle et indécente ? L’administration Obama, bien
entendu, elle qui a permis aux lobbyistes des sociétés d’assurance santé et à
leurs collègues de Big Pharma de rédiger l’Affordable Care Act – dont le nom
est sans doute le plus gros mensonge jamais fait au peuple.
Il est intéressant de voir
comment une fraude similaire se joue dans le domaine des hautes études. Je
suis d’avis que la raison pour laquelle les présidents d’universités ne s’opposent
pas à la coercition maoïste des guerriers de la justice sociale de leurs
établissements est que le grand théâtre du genre, de la race et du mélodrame
du « privilège » sont une puissante distraction qui détourne les
regards du racket administratif grotesque qui offre des formations fantoches
(Dartmouth College : WGSS 65.06 Sur la sexualité radicale :
haute en couleurs, en nature et en fabulosité… Harvard University :
WOMGEN 1424 Fétiches américains) afin d’appeler à leurs jeunes
clients (étudiants) conditionnés par de tristes histoires d’oppression. Tout
ça au service de gros salaires et de bonus pour les administrateurs de ces
institutions.
Et n’oublions pas le secteur
bancaire, ou le secteur financier, qui représente certainement le plus gros
de tous les rackets et roule aujourd’hui à la vapeur d’essence – combinaisons
de taux zéro, d’assouplissement quantitatif et de discours optimistes. C’est
tout ce qui lui reste pour maintenir en vie l’illusion selon laquelle la « monnaie »
représente encore une jauge viable de valeur. La finance est le racket qui s’effondrera
le premier et le plus brutalement. Et lorsqu’il le fera, tous les autres
partiront en fumée. L’éléphant se ruera dans le magasin de porcelaine avant
les conventions politiques, et nous réaliserons alors que rien ne pourra plus
continuer comme avant.