« Si
les intérêts punitifs excèdent le seuil de douleur... »
L'Association des
banques d'épargne de Bavière, qui représente 71 banques d'épargne bavaroises,
en a assez de l'absurdité des taux de dépôt négatifs de la BCE, et tente de
déclencher une révolte au Palais.
En 2014, alors que des
taux d'intérêt négatifs étaient appliqués pour la première fois en zone euro,
les Allemands les ont baptisés « intérêts punitifs » (Strafzinsen),
parce que ces taux étaient destinés à nuire aux banques et aux épargnants
jusqu'à ce que leur humeur s'améliore. Mais, pour une raison que l'on ignore
encore, leur humeur ne s'est pas améliorée.
Les actions des banques
ont plongé à mesure que leurs profits ont été réduits par l'environnement de
taux négatifs. Les actions des sociétés de la zone euro ont dans ensemble
baissé, et l'économie de la zone euro n'y a pas particulièrement bien répondu
malgré les taux punitifs appliqués par la BCE.
Les banques bavaroises
en ont assez. Le Frankfurter
Algemeine a obtenu un mémo de la part de l'Association des banques
d'épargne de Bavière qui encourage ouvertement ses membres à accumuler du
liquide dans leurs propres coffres plutôt que de le déposer auprès de la BCE
et verser des frais de pénalité de 0,3% sur ces dépôts.
« Les banques
d'épargne devraient donc se demander si elles ne tireraient pas profit de
conserver du liquide dans leurs coffres plutôt de l'envoyer, comme elles ont
l'habitude de le faire, auprès de la BCE », explique le mémo.
Pour estimer les coûts
totaux et déterminer quelle serait la meilleure solution pour les banques -
conserver leur capital ou le déposer auprès de la BCE - l'association a
analysé les coûts d'assurance additionnels qui seraient nécessaires, et
discuté quelques options d'assurance pour couvrir de tels volumes de capital
dans les coffres des banques.
Selon cette analyse,
l'assurance de ces réserves coûterait 0,15% plus taxes, pour un total de
0,1785%. C'est inférieur aux frais de pénalité de 0,3% imposés par la BCE.
Pour 1.000 euros additionnels conservés dans ses coffres, une banque devrait
payer 1,785 euro par an. Si ces 1.000 euros étaient déposés auprès de la BCE,
ils lui coûteraient 3 euros par an. Multipliez cette différence de 1,21 par
des dizaines de centaines de millions, et elle devient très vite
significative.
Les banques disposent
d'un total de 245 milliards d'euros déposés auprès de la BCE. Avec un taux de
dépôt de -0,3% extrapolé au fil des années, il leur faudrait verser 735
millions d'euros d'intérêts punitifs.
« Les taux
d'intérêt punitifs nous coûtent déjà très cher », a expliqué un banquier
central au Frankfurter
Algemeine.
Bien que les banques
d'épargne puissent faire face à des coûts additionnels, comme par exemple
pour transporter du capital ou couvrir leurs réserves, le stockage de leur
liquide dans leurs propres coffres leur offre une bien meilleure option.
Nous avons reçu des
demandes de « programmes de protection contre la BCE », a expliqué
la porte-parole de l'association au Frankfurter
Algemeine, bien qu'elle ait refusé d'indiquer des chiffres
exacts. L'association n'a pas non plus commenté quant aux intérêts punitifs
déjà versés par les banques d'épargne. Ils pourraient cependant, comme
l'explique le journal, impliquer des millions d'euros.
Pour assurer ces
réserves additionnelles, les banques d'épargne pourraient se tourner vers le
Versicherungskammer Bayern, la plus grosse société d'assurance publique
d'Allemagne. La société offre depuis toujours des couvertures pour les dépôts
des banques d'épargne de Bavière et d'ailleurs. Afin de se protéger face à la
BCE, une banque d'épargne n'a qu'à modifier sa politique existante.
Voici ce que nous en dit
le Frankfurter Algemeine
:
Dans le cercle bancaire
centralisé, ces considérations par les institutions financières sont
observées attentivement. Elles montrent que des taux d'intérêt punitifs qui
excèdent le seuil de douleur peuvent potentiellement mener à des réactions
qui visent à contourner la BCE. L'objectif de la BCE est de pousser les
banques à prêter plus. Les voir accumuler du capital dans leurs propres
coffres serait contre-productif.
Les taux d'intérêt punitifs
coûtent aux banques bien plus que les intérêts qu'elles doivent verser à la
BCE : l'environnement de taux négatifs tout entier réduit leur
profitabilité. Elles s'en sortiraient certainement mieux si elles pouvaient
imposer de gros intérêts aux épargnants, mais une telle décision verrait
instantanément s'évaporer tout le liquide du système.
Ignorant comme toujours
la réalité, Draghi a annoncé aux marchés qu'il continuerait d'exercer des
pressions. Le conseil de direction de la BCE devrait prendre de nouvelles
mesures dès jeudi.
Les marchés semblent
s'attendre à quelque chose d'important, d'où la récente reprise des marchés
boursiers. Mais la dernière fois que Draghi a fait grimper les actions grâce
à ses promesses - ou ses menaces - elles n'ont pas mis longtemps à replonger.
Le marché pense
aujourd'hui que la BCE fera grimper les taux négatifs jusqu' à -0,4% voire
-0,5%. Pour les rendre moins destructeurs pour les banques, les taux
pourraient grimper par paliers.
Le Frankfurter Algemeine ajoute
donc que :
Une hausse des taux d'intérêt
négatifs augmente les chances de voir les banques qui possèdent les plus gros
excès de capitaux de rechercher des solutions alternatives. Comme conserver
leur liquide dans leurs propres coffres.
Mais ce n'est qu'une des
conséquences inattendues de la politique absurde des taux négatifs. Lisez
ceci : “Perverse,
Unpredictable Effects” of Negative Interest Rates: Mortgage Rates Soar in
Switzerland