Le syndrome du profil atypique, comme le décrit par l’exemple notre
camarade Sylvain sur notre site larobolution.com ici : les entreprises
détestent ceux qui sont atypiques. D’ailleurs, comme aimait à le répéter le
grand patron de la BNP quand j’y étais encore, “commencer à réfléchir c’est
commencer à désobéir”… Tout un programme qui explique les effets castrateurs,
volontairement castrateurs, des politiques managériales menées et que nous
subissons.
Il y a, dans chaque individu, dans chaque être humain, une puissante
dimension et force créatrice. Souvent le bonheur, l’épanouissement n’arrive
pas lorsque nous gagnons de l’argent – bien qu’il en faille un minimum
–, non, l’accomplissement arrive lorsque nous sommes en mesure d’exprimer et
de libérer notre envie créatrice. Il y a là une dimension presque
spirituelle. Le chemin du bonheur est celui de l’accomplissement, celui de l’accomplissement
est celui de la libération de l’énergie créatrice que le monde étouffe.
C’est parce que ce droit est dénié dans les grandes structures que
beaucoup de gens y sont malheureux et trouvent que leur travail manque de
sens.
Le syndrome du profil atypique
Imaginons un peu, un monde où la sélection des candidatures serait faite
par des robots. Des machines qui analyseraient votre CV et feraient un tri en
fonction des critères définis par l’entreprise qui a bien d’autres chats à
fouetter que de se « pastiller » à lire de telles quantités de papiers
formatés bien comme il faut dans le moule du CV type… Ah, c’est déjà le cas ?
Oui, évidemment ! Pas chez tout le monde encore, mais ça vient. En tout cas,
les cabinets de recrutement et/ou les grandes entreprises y ont recours
depuis pas mal de temps. Mais qu’est-ce qui fait le sel d’une entreprise,
qu’est-ce qui la rend originale, créative, innovante ? Pas des profils
prédéfinis qui vont répéter à l’infini un mode opératoire ou un process en ne
cherchant qu’à le peaufiner. Pas des hommes et des femmes soumis à des
procédures castratrices. Non, rien de tout cela, non c’est le profil atypique
qui va changer la donne. L’homme ou la femme qui aura l’audace, la
créativité, peut-être même le génie.
Imaginez Ettore Bugatti. Son père le fait entrer chez Prinetti et Stucchi,
alors fabricants de célèbres tricycles italiens. Le jeune Ettore a 17 ans et
travaille sur les moteurs. Il remporte alors des courses et crée une petite
voiture. Mais chez Prinetti et Stucchi, ce jeune homme (trop) ambitieux
bouleverse les habitudes et veut amener l’entreprise dans la création
d’automobile à laquelle la marque ne prédit aucun avenir. Le pauvre Ettore
est remercié. Il remet cela avec Deutz et on est en 1904. Là encore, il
dérange et quittera l’entreprise qui elle non plus ne croit pas à
l’automobile… La marque finira par disparaître. Ettore Bugatti fonde alors sa
propre marque en 1908 et créera les plus merveilleuses automobiles de
l’histoire…
J’imagine le pauvre Ettore passé entre les fourches caudines d’un
algorithme un peu coincé aux entournures. Pas une chance au génie, mais bien
d’autres seraient dans le même cas et il leur reste aujourd’hui la même
option qu’alors… Créer pour soi-même ! Un constat un peu triste, j’en
conviens, mais cette « dictature » (je n’ai pas franchement trouvé d’autre
terme) risque bien de réduire la créativité à néant. Enfin, j’imagine que
l’on ne laissera pas totale décision aux algorithmes et que l’humain restera
aux « manettes », non ?
Il n’est pas trop tard…Mais presque !
Sylvain Devaux
« L’homme a la possibilité non seulement de penser, mais encore de savoir
qu’il pense ! C’est ce qui le distinguera toujours du robot le plus
perfectionné. »
Jean Delumeau