Au beau milieu de la brume
générée par Trump et ses hordes d’adversaires, il doit certes être difficile de
discerner les véritables problèmes qui tourmentent notre société et, pour
ceux qui y parviennent, d’adopter une attitude cohérente à leur égard. C’est
ce qu’a joliment illustré Paul Krugman dans son futile article publié lundi
par le New York Times, On
Economic Arrogance – et dont le titre décrit sa propre attitude à la
perfection.
Dans cet article, Krugman tente
d’expliquer la stagnation économique par les tours de passe-passe de fonds de
commerce des économistes de l’académie : chiffres de la productivité, de
la démographie et du travail. Krugman ne sait absolument rien de ce qui
afflige notre réalité, qui se trouve être les rendements décroissants des
investissements sur l’énergie pétrolière. Nous en arrivons à un point où la
tâche qu’est d’extraire du pétrole du sol ne vaudra bientôt plus les coûts qu’elle
nécessite. Parce que toutes les choses que nous faisons et produisons au sein
de cette économie sont basées sur un pétrole peu cher – sans aucun programme
viable de remplacement de cette énergie par ce qu’on appelle les « renouvelables »
– nous ne pourrons bientôt plus générer suffisamment de capital pour
maintenir un mode de vie même proche de celui que nous avons aujourd’hui.
Nous ne pourrons même plus générer suffisamment de capital pour verser nos
intérêts sur la dette que nous avons accumulée afin de dissimuler l’impasse
énergétique dans laquelle nous nous trouvons. Voilà pourquoi le système
financier finira par exploser. Et quand ce domaine de l’économie partira en
fumée, le reste suivra.
Le véritable problème qui s’impose
aujourd’hui à nous est de savoir comment les Etats-Unis – ou devrais-je dire
les nations soi-disant « développées » - pourront naviguer ce
déclin général des modes de vie sans s’enliser dans un nouvel âge sombre, ou
pire encore. Soit dit en passant, le Grand Maestro Alan Greenspan, s’est
lui-aussi prononcé à des fins tout aussi spécieuses quant à la question de la
« productivité » la semaine dernière, dans cet
article publié par Business Insider. Aucun de ces Grands Vizirs ne sait
de quoi il parle, et une nation qui dépend de leurs conseils ne peut que se
perdre dans une galerie des glaces tous feux éteints.
Nous avons donc Trump et ses trumpétistes
d’un côté, qui nous chantent le refrain du retour de notre grandeur passée (une
économie industrielle en effervescence peuplée de joyeux lurons armés de leur
boîte à lunch), et une clique de technocrates ignorants de l’autre, qui
pensent sincèrement pouvoir « résoudre » le problème de la
productivité grâce à des mesures qui ne sont rien de plus que différentes
sortes de fraudes comptables.
Nous avons aussi un public
américain, et des médias grand public, qui ne remettent jamais en cause les
prémisses d’un grand projet de dépenses en « infrastructures »
destiné à relancer notre économie en déclin. Si vous leur demandez ce qu’ils
y perçoivent, ils vous répondront qu’ils en espèrent de nouvelles routes, de
nouveaux ponts, tunnels et aéroports. Certains suspectent, et ils ont raison,
que nous ne disposons pas de l’argent nécessaire – ou qu’il puisse seulement
être rassemblé par toujours plus de fraudes comptables (d’emprunts
supplémentaires à l’avenir). Mais dans l’ensemble, une majorité des adultes
de ce pays, quel que soit leur penchant politique, pensent que nous devrions
nous lancer dans une orgie de dépenses, et que ce serait une bonne chose.
Et à quoi servirait ce renouveau
des infrastructures nationales ? A promouvoir un mode de vie sans
avenir. Une matrice de dépendance extrême à une automobilisation de masse qui
n’a aucune chance de perdurer ne serait-ce qu’une décennie supplémentaire. Toujours
plus de WalMarts, de Targets, de Taco Bells, et autres accoutrements de notre
mode d’existence en constante zombification. Ne devrait-il pas être évident,
même aux yeux de ceux qui ne comprennent pas le dilemme de l’énergie
pétrolière, que rien ne peut plus être fait ?
Il n’est pas difficile de
décrire notre monde en suspens, comme je l’ai moi-même fait dans mes livres. Notre
destin est évident, que nous l’acceptions ou non. Tout ce que nous pouvons
encore faire, c’est rendre la transition plus facile en nous attelant à la
tâche.
L’Histoire est impitoyable. A l’heure
d’aujourd’hui, la dynamique que je décris ici nous propulse vers une
reconnaissance difficile, qui se manifestera peut-être dès le printemps en
raison de l’inaptitude politique de Trump et de l’antipathie de ses
adversaires, et nous laissera au cœur d’un tourbillon constitutionnel au
moment même où le système financier commencera à se défaire. Attendez-vous à
ce que les débats sur le plafond de la dette et une nouvelle hausse de ses
taux d’intérêt par la Fed suffisent à le faire trébucher. Et même à ce
moment-là, nous ne serons pas arrivés au bout de nos tribulations, parce que
le Deep State se sera mis à blâmer la Russie, la Chine ou le Mexique pour
tous les problèmes qui nous accablent.