La crise financière, qui a démarré aux États-Unis, fut principalement la conséquence de dettes et de risques excessifs, parmi d’autres facteurs, si bien que le château de cartes s’est écroulé. Après 8 années de politiques monétaires expérimentales et d’énormes déficits publics de par le monde, la dette des nations a explosé.
La dette américaine vient d’atteindre les 20,5 trillions de dollars, soit 105 % du PIB. Mais les États-Unis sont encore bien loin du Japon, dont la dette représente 250 % de son PIB. Mais quid de la dette privée, qui inclut la dette des ménages et des entreprises ? Comment a-t-elle évolué durant cette période de crédit bon marché ?
Dette privée aux États-Unis
Aux États-Unis, la dette totale du secteur privé (finance exclue) a gonflé jusqu’à 28,5 trillions de dollars. C’est 14 % de plus par rapport aux 25 trillions du pic insensé de la crise financière, ainsi qu’en hausse de 63 % par rapport à 2004. Comparé à la taille de l’économie américaine, la dette privée a grimpé de 147 % du PIB en 2004 à 170 % du PIB au premier trimestre 2008. Tout s’est alors écroulé. Une partie de cette dette fut passée en pertes et profits. Pendant un certain temps, le secteur privé s’est désendetté pour recommencer ensuite de plus belle à emprunter.
Grâce à la croissance économique, le ratio dette/PIB s’est alors mis à baisser jusqu’à 148 % au T1 2015. Il est ensuite reparti à la hausse pour s’élever aujourd’hui à 151,7 % du PIB, soit le niveau que nous avons connu en 2005. Sur le graphique ci-dessus, la ligne en bleue représente la dette du secteur privé en trillions de dollars, la ligne rouge son poids par rapport au PIB.
Dette privée en zone euro
En zone euro, la tendance suivie par le crédit privé est fort similaire jusqu’à la crise de 2008, alors qu’il augmentait aussi bien en termes de montant que de ratio. Mais après la crise financière, l’endettement s’est poursuivi. La dette privée en zone euro s’élève aujourd’hui à 163 % du PIB. (…)
Dette privée au Japon
Au Japon, le niveau des dettes privées a baissé durant les 3 années qui ont suivi la crise financière pour ensuite repartir à la hausse. La dette par rapport au PIB a zigzagué vers le bas pour récemment rebondir jusqu’à 160 %, un ratio supérieur à celui des États-Unis mais inférieur à celui de la zone euro.
Le Japon est un cas unique dans le monde développé. Le secteur privé a connu une bulle du crédit énorme dans les années 80. Depuis, elle baisse de façon presque continue. (…)
Dette privée en Chine
La Chine se trouve actuellement dans la position du Japon juste avant l’explosion de la bulle du crédit japonaise au début des années 90. La dette du secteur privé en Chine, celle qui est en tout cas officiellement admise, a augmenté depuis 2008 de 20 % par rapport au PIB pour atteindre 211 % en 2017. La Chine est donc entrée dans la zone dangereuse qui avait précipité le Japon dans les ennuis. Ce ratio part également du principe que la croissance chinoise n’est pas surestimée. Si cela devait être le cas, comme de nombreux observateurs le suspectent, cela signifie que le ratio d’endettement du privé est encore plus élevé.
Dette privée au Canada
Mais attendez, il y a aussi le Canada ! La dette privée au Canada a plus que doublé depuis 2006, passant de 2,2 à 4,5 trillions de dollars canadiens. Cette dette par rapport au PIB représente un ratio de 217 %, elle se trouve donc à un fifrelin du niveau qui avait provoqué l’explosion de la bulle du crédit au Japon durant le T3 1993. Remarquez comme le graphique du Canada est similaire à celui de la Chine.
En conclusion
En conclusion, le Canada et la Chine se démarquent de ce groupe. Ci-dessous, le graphique compare le ratio d’endettement du privé par rapport au PIB pour ces 5 entités ; on voit bien que le Canada et la Chine sont sur une autre planète, en concurrence afin de déterminer qui sera le premier à voir sa bulle exploser. En comparaison, les États-Unis, la zone euro, le Japon semblent bien raisonnables. Notez comment en 2008 le Canada était proche des grands blocs économiques en termes d’endettement privé (et la Chine bien en dessous).
C’est donc vers la Chine et le Canada qu’il faut se tourner si on veut assister aux premières loges à l’explosion de la bulle du crédit privé. Les ménages canadiens sont parmi les plus endettés du monde, tandis qu’en Chine la frénésie du crédit s’est propagée aussi bien dans les ménages que dans les entreprises.
Source : article de Wolf Richter, publié le 29 novembre 2017 sur WolfStreet.com