18 JUIN - De Gaulle, l'or et le dollar

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Extrait d’un article de Times Magazine du  12 Février 1965



Peut-être aucun autre chef d’Etat n’avait-il jamais déclenché un tel assaut sur le pouvoir monétaire d’une nation amie. Et personne d’une telle stature n’avait encore fait une critique si acerbe du système monétaire international depuis sa création en 1944. Et voici Charles de Gaulle proclamant la semaine dernière que la suprématie du dollar dans les échanges internationaux arrivait à son terme et appelant à un éventuel retour à l’étalon-or que les nations du monde entier avaient détruit il a y a cinquante ans et invitant pratiquement tous les autres pays à suivre la France et à échanger leurs dollars contre de l’or. Cela était particulièrement irritant, d’autant que les USA étaient en train de s’appliquer à prendre des décisions difficiles concernant leur politique monétaire.


La fuite. Le Président Johnson est confronté à la tache ingrate de ce qu’il nomme produire des « actions fortes et ciblées » pour faire face au déficit américain persistant de la balance des paiements, un problème qui est intimement lié à l’or. Les conseillers du président sont actuellement encore en train de débattre sur la « force » de ces mesures imminentes.


Il existe une prise de conscience croissance, soutenue par l’offensive de de Gaulle que les tentatives du passé pour combler les déficits n’ont été que de simples palliatifs et que le problème a commencé à miner l’influence américaine dans le monde.


Juste avant l’intervention de de Gaulle, le Secrétaire du Trésor Douglas Dillon a admis pour la première fois publiquement que le déficit  des paiements US avait augmenté plus fortement qu’anticipé en 1964. Il atteignait environ 3 milliards de dollars, et tout cet argent était légalement susceptible d’être échangé contre de l’or sur simple demande. La Réserve Fédérale a annoncé que l’offre d’or US avait baissé de 100 millions la semaine dernière soit un record plancher pour les 26 dernières années avec 15,1 milliards de dollars.


Le mois dernier, la France a converti 150 millions de dollars contre de l’or et projette de convertir encore 150 millions très prochainement. Suivant cet exemple, l’Espagne a silencieusement échangé 60 millions de ses dollars de réserves contre de l’or- la plus grosse transaction depuis l’ère Franco. Pour débloquer davantage d’or et satisfaire la demande croissante, un comité du congrès a approuvé la semaine passée une proposition du Président Johnson d’éliminer la couverture de 25% sur l’or nécessaire à la garantie des dépôts faits auprès du système de réserve fédéral. Mais des inquiétudes croissantes surgissent à Washington que les nations qui, jusqu’ici, s’étaient abstenues de convertir leurs dollars en or par considération pour les USA ne se mettent également à convertir leurs dollars en or une fois que cette quantité supplémentaire d’or sera dégagée et que donc, davantage de chargements d’or sortant de Fort Knox.


Privilège de Signal. C’est dans cette situation très tendue que de Gaulle s’est exécuté et ceci sans tenir compte de sa promesse faite en 1963 de soutenir le système monétaire international dans lequel le dollar joue un rôle dominant et dans lequel tout le commerce libre est réalisé soit en dollars, soit en livres sterling, soit en or. L’époque est révolue depuis longtemps, a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse (voir THE WORLD) dans laquelle les monnaies d’une ou deux nations pouvaient jouir « du privilège de signal, de cet avantage de signal ». Le monde actuel, a dit de Gaulle, a besoin d’une base monétaire indiscutable et celle-ci ne doit pas porter le sceau d’un quelconque pays en particulier. En vérité, on ne voit pas très bien comme on pourrait avoir un autre critère standard que l’or ».


De Gaulle semblait appeler à quelque chose comme un étalon-or classique modifié quand il a recommandé de manière ambigüe « des mesures complémentaires et transitoires» pour l’accompagner. Cependant, il n’y pas de doutes quant à ses intentions : promouvoir son leadership pour réduire l’influence économique, militaire et culturelle américaine à l’étranger.


Dans un régime d’étalon-or les Etats-Unis ne seraient plus en mesure de rembourser leurs dettes étrangères contre des dollars mais uniquement contre de l’or. Les hommes d’affaires devraient revoir leurs investissements dans les sociétés étrangères (de Gaulle la semaine dernière a qualifié de tels investissements une « forme d’expropriation »). Tant que les USA n’équilibreront pas leurs paiements en or, les consommateurs américains devront réduire leurs achats de biens étrangers. Raison : comme les dollars ne seraient plus l’équivalent de l’or, ils seraient convertis contre de l’or à l’étranger dès qu’ils seraient dépensés. Les Etats-Unis deviendraient tout de suite moins puissants dans le monde des affaires parce que bien qu’ils aient le double de PNB que les nations du marché commun, ils détiennent à peine plus d’or que ces six pays réunis.


Stricte discipline. Conscient sans aucun doute de l’ironie impliquée dans cette attaque lointaine, de Gaulle a baptisé son plan la « Règle d’Or ». Que pourrait-on dire en faveur de sa proposition ? La valeur de la monnaie serait garantie par l’immuabilité de l’or. En théorie, le système monétaire deviendrait plus stable et moins vulnérable aux crises de confiance. En liant l’offre de monnaie à l’or, le système ne pourrait se permettre d’avoir une expansion trop grande. Aux Etats-Unis et en Angleterre, pays qui peuvent payer leurs déficits au moyen de leur propre monnaie, cela imposerait une discipline fiscale stricte, contiendrait le financement par le déficit et permettrait d’éliminer les nombreux excès qui conduisent à l’inflation et à la récession. Et d’ailleurs, cela forcerait les USA à éliminer leur déficit de la balance des paiements rapidement, d’une manière ou d’une autre.


Pour contrer l’argument selon lequel le système paralyserait aussi le commerce international en raison d’une pénurie globale de l’or, les champions de l’étalon-or prônent une autre mesure qu’ils considèrent nécessaire : de doubler ou  tripler le cours de l’or à 35 $ l’once et donc d’augmenter énormément les réserves monétaires qui financent le commerce mondial. 


Pour le moment au moins, les économistes mondiaux les plus renommés, les banquiers et financiers croient que ce futur doré, même s’il est désirable en théorie et pratiquement impossible à réaliser en pratique. Après la conférence de presse de de Gaulle, les dirigeants des gouvernements britanniques et d’Allemagne de l’Ouest ont déclaré qu’ils ne voyaient pas d’un bon œil le retour à l’étalon or. Le Trésor US a déclaré que ce modèle produirait une guerre économique : les nations demanderaient à leurs débiteurs d’être réglées entièrement et en totalité en or et un grand nombre de ces pays n’auraient pas assez d’or pour le faire. La conséquence serait ensuite un embargo sur l’or de la plupart de ces pays, une augmentation des droits de douanes et une restriction du commerce mondial. Lors d’un récent meeting à Bellagio en Italie, trente des trente-deux économistes mondiaux les plus éminents se sont opposés à un retour de l’Etalon-or.


La grande majorité des économistes et financiers rejettent également l’idée d’une augmentation du cours de l’or, ce qui reviendrait à une dévaluation des autres monnaies mondiales. 


Selon un expert mondial de l’or de Yale, Robert Triffin : « cela aiderait les nations non-alliées et blesserait nos amis et conduirait à un effondrement de la coopération monétaire internationale. » Les plus grands producteurs d’or, la Russie et l’Afrique du Sud seraient aidés car leur or aurait immédiatement une valeur deux ou trois fois supérieure à celle qu’elle a actuellement. Les pays qui ont aidé les Etats-Unis en conservant de grandes quantités de dollars de réserves seraient désavantagés en particulier l’Allemagne, le Japon et le Canada.


De plus, puisque le Congrès devrait normalement débattre et voter sur les changements du cours de l’or, de nombreux détenteurs de dollars se précipiteraient pour les échanger contre de l’or. En théorie, la réévaluation de l’or pourrait être préparée en secret par toutes les nations concernées et annoncée simultanément. En pratique, les économistes pensent que cela est pratiquement impossible à réaliser. Et donc, pour toutes ces raisons, le Président Johnson, dans son Message Economique, il y a deux semaines, a répété six fois que les USA sont bien déterminés à maintenir l’or à son cours actuel.


Nouvel Axe Européen. De Gaulle ne croit probablement pas que le monde va revenir à un étalon-or. Il a beaucoup été influencé par Jacques Rueff, son mentor économique et probablement le plus ardent défenseur d’un retour à l’or. Rueff a salué l’explosion de de Gaulle la semaine dernière comme « une invitation à une entreprise commune qui va délivrer l’occident d’un système monétaire absurde ». Mais de Gaulle, bien qu’il admire sa théorie, est un artiste du possible et il est probablement en train d’utiliser la menace d’un étalon or dans l’espoir de mettre une certaine pression sur les USA et la Grande-Bretagne afin d’accepter des changements plus mineurs dans le système actuel qui seraient favorables à la France. Pendant les six derniers mois, il a soutenu la création d’une nouvelle monnaie de réserve internationale appelée le CRU (ou unité de réserve collective) qui donnerait un poids plus grand à l’or et une puissance financière plus importante aux nations ayant de larges réserves d’or. Les Etats-Unis y ont été opposés mais l’attaque de de Gaulle sur le dollar pourrait forcer Washington à reconsidérer la chose.


Les plus hauts responsables du Comté Directeur de la Réserve Fédérale pensent que de Gaulle, aidé par l’Espagne de Franco, est en train de former un nouvel axe européen créé dans le but d’embarrasser et d’affaiblir les Etats-Unis en attaquant le dollar. Pour soutenir le dollar, le Président de la Fed William McChesney Jr. a pressé le Président Johnson à procéder à des changements radicaux et précipités pour éliminer les déficits de la balance des paiements. « D’une manière ou d’une autre, quelque chose doit être fait », a-t-il dit récemment. « Il est important que nous faisions face à ce qui est finalement devenu un déficit chronique et qui nous laisse dans une position faible. »


Martin, Douglas Dillon et le Directeur du Budget Kermit Gordon sont en train d’exercer des pressions en faveur de mesures qui affecteraient dramatiquement les politiques des nations étrangères et domestiques. Parmi les propositions que l’un ou l’autre des trois ou bien les trois ont proposées conjointement : une taxe de 50$ à 150 $ de sortie du territoire par personne pour décourager le tourisme à l’étranger, un contrôle direct des investissements à l’étranger, une coupe plus grande dans les investissements à l’aide étrangère et si nécessaire une réduction drastique des troupes stationnées en Europe. Ces propositions ont été chaudement débattues pendant une série de meetings secrets à la Maison Blanche. Le Département d’Etat est contre tout retrait des troupes ou toute coupe dans l’aide étrangère, et le Département du Commerce argumente que les restrictions sur l’investissement détruiraient la réputation des USA comme étant le marché du capital le plus libre au monde. La Maison Blanche pense qu’une taxe sur les personnes concernant les touristes qui se rendent à l’étranger serait un véritable poison politique.


Le compromis de Johnson. Le département d’Etat croit, en fait, qu’un déficit des paiements de 3 milliards ne devrait par vraiment inquiéter une nation ayant une économie de 650 milliards de dollars et deux fois plus de créances en devises étrangères que les pays étrangers n’en n’ont contre le dollar. Il argumente que les USA pourraient réduire le déficit de 500 millions en comptabilisant ses dépôts étrangers à court termes aux USA comme des actifs au lieu de dettes.


Un fort soutien en faveur de cette perspective optimiste a été apporté la semaine dernière par Pierre-Paul Schweitzer, le Président Directeur Général du Fonds Monétaire International et le Contrôleur en chef des monnaies de rang mondial. « Une estimation plus réaliste pourrait abaisser quelque peu le déficit global », a-t-il affirmé. « la structure de la balance des paiements US est une de ses forces sous-jacentes ».


Avec sa préférence habituelle pour les compromis, le Président Johnson a décidé plus tôt la semaine dernière de faire quelques aménagements légers. Ceux-ci devaient inclure une petite restriction de l’offre monétaire domestique afin d'empêcher le dollar de s’écouler vers l’étranger, une taxe sur les crédits des banques américaines à l’étranger et une campagne de presse pour persuader les hommes d’affaires américains de réduire leurs investissements à l’étranger. Le pavé dans la mare de de Gaulle a pu convaincre le Président que des politiques plus dures sont nécessaires. En tout cas, Washington est d’accord avec de Gaulle sur au moins un point : quelques changement devraient être faits dans un système monétaire mondial qui met les USA à mal.




Histoire de l’or

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