L’Amérique semble en
suspens à l’occasion ce long weekend qui ne demande rien de plus en termes de
dévouement que d’allumer le barbecue et s’asseoir devant deux films
profondément idiots qui illustrent on-ne-peut-mieux notre détachement des
troubles de notre ère.
D’abord, il y a Mad Max: Fury Road, qui
présente l’effondrement de la civilisation sous forme d’une course poursuite
entre voitures surpuissantes. Il faut dire que les réalisateurs soient tombés
complètement à côté. Le présent, c’est plutôt une exposition de voitures
surpuissantes. Houston. Los Angeles. New Jersey. Pékin. Mumbai… L’avenir ne
nous permettra pas d’avoir des voitures, qu’elles roulent à l’essence ou à l’électricité,
et qu’elles nécessitent ou non un conducteur. Mad Max: Fury Road est un exercice de nostalgie pervers, un
peu comme si être une nation de sauvages assis dans le siège passager, nous
battant continuellement pour notre petite place sur l’autoroute, allait un
jour nous manquer.
L’autre blockbuster des
vacances, c’est le dernier Disney, A la poursuite de demain, un autre
exercice de nostalgie pour le présent, dans lequel la vie idéale de l’Homme
est une matrice d’applications pour smartphones, de robots et d’hologrammes.
Tous ceux qui ont déjà été à Disneyland se souviennent de la première
installation Tomorrowland a finalement être due être démantelée parce que sa
représentation du futur était devenue complètement ridicule – à commencer par
l’idée que la tâche la plus pressante du projet humain était le voyage dans l’espace.
Aujourd’hui, la corporation Disney – une corporation diabolique, il faut le
dire – semble croire que plus de monnaie encore peut être égouttée d’un
public persuadé qu’une techno-utopie nous attend.
Une autre idée commune
aux deux films et que les filles peuvent aujourd’hui être ce que les garçons
étaient autrefois, que c’est désormais leur tour d’être les maîtres
incontestables de l’univers, que les hommes ont dépassé leur date de
péremption et qu’ils n’existent plus que pour humilier les femmes. Ce message
n’est qu’une tentative mensongère d’élargir la part d’audience des adolescents,
dont la fantaisie du jour est certes incomprise des commentateurs culturels
trop occupés à célébrer le triomphe et les merveilles de la vie transgenre.
Les commentateurs
estiment la place de ces deux films sur l’échelle populaire de l’optimisme et
du pessimisme. Ce sont là les seuls choix des masses : être un
pessimiste, ou un éternel optimiste. Ces deux opinions sont cartoonesques et
n’apportent aucune indication quant à la poursuite du projet de civilisation.
Il n’est question que de destruction ou de contrôle surnaturel, faîtes votre
choix. Je trouve les deux options révoltantes.
Il est toutefois
intéressant de soulever que la véritable Fury
Road s’étend aujourd’hui entre la Syrie et l’Irak, avec l’EIIL dans
le rôle principal. Nous pouvons voir dans les médias, et sur internet, un
sentiment accru de déjà-vu. Les bombardements aériens deviennent trop
familiers, et les déploiements de troupes infectent les transmissions wifi.
Peut-être devrions-nous envoyer Charlize Theron et une poignée d’acolytes
armés de fusil de chasse sur le terrain. Quelle autre solution avons-nous ?
Personne ne le sait.
La Journée commémorative
est le dernier jour de l’année pendant lequel nous souhaitons faire face à
la calamité qu’est le médiévalisme rampant – pensez à tous ces pauvres
Américains écrasés et massacrés ces douze dernières années. Il est aussi
intéressant de voir que les médias passent complètement à côté de la plus
grosse récompense sur le plateau de jeu : l’Arabie Saoudite. Vous
trouvez que la conquête de l’Irak par l’EIIL est une mauvaise nouvelle ?
Attendez de les voir arriver à Riyad. Plus aucune nouvelle ne nous parvient
du Yémen, à la base de la péninsule arabique, un Etat déchu à la population
presqu’égale à celle de son voisin. Si nous savons ce qui s’y passe – le
Pentagone et la NSA le savent certainement – ce n’est certainement pas assez digeste
pour être soumis à la consommation populaire.
C’est une ironie, parce
que si l’Arabie se trouvait affectée par cette calamité – et je crois qu’elle
le sera – nous apprendrons dans l’heure que le futur des Etats-Unis ne sera
pas peuplé de voitures superpuissantes, de motos hors-route, d’hologrammes, d’applications
smartphone et de n’importe quelle autre préoccupation ridicule du moment.