Si c’est vrai, alors ce ne peut
pas être de la vantardise. J’ai déjà répété à de nombreuses reprises que le
gouvernement fédéral ne pourra que devenir moins puissant, moins compétent et
moins efficace à mesure que se développera la Longue urgence. Et c’est à ce
tournant de l’Histoire que nous en sommes désormais arrivés.
C’est un phénomène qui se
développe depuis le tournant du siècle. Toutes les tentatives d’élargir sa
portée et son envergure – comme l’addition de Dieu-sait-combien de nouveaux
services de renseignements – n’ont fait que produire un micmac confus qui
menace aujourd’hui la légitimité même du gouvernement fédéral.
Après presqu’un an d’enquêtes,
le FBI, la CIA, la NSA, la DIA, DHS et compagnie n’ont pas été capables de
dénicher une seule preuve substantielle de la soi-disant « collusion »
entre la Russie et la campagne électorale de Trump – et a vu des fuites d’informations
qui ont affecté bien d’autres affaires collatérales sur la même période, je
ne peux que conclure qu’il n’y ait rien à en tirer si ce n’est une hystérie
complètement fabriquée.
Nous pourrions en effet imaginer
que la communauté des services de renseignements aurait pu fabriquer
des faits plutôt que de simples vagues d’hystérie, et c’est justement là qu’entrent
en scène son incompétence et son impuissance. Elle ne peut rien faire de plus
que de nous annoncer que Flynn et Sessions se sont entretenus avec l’ambassadeur
de Russie – comme si des ambassadeurs n’étaient pas justement envoyés aux
Etats-Unis par leurs pays respectifs pour s’entretenir avec les représentants
de notre gouvernement. Et au vu des capacités graphiques actuelles, elle
aurait au moins pu nous concocter un court-métrage dans lequel Donald Trump
pourrait être vu en train de passer le marché du siècle : l’échange du
Kansas contre la Lituanie ; ou même Jared Kushner promenant Vladimir
Poutine sur son dos dans les couloirs du Kremlin. Mais tout ce qu’on nous a
offert n’a été que des emails envoyés par le Comité national démocrate et
John Podesta, membre de la campagne Clinton, dans lesquels ils se vantent d’avoir
pu si facilement écraser Bernie Sanders – ce qui ne dépeint pas très joliment
ce qui est finalement devenu le mouvement dit de la « Résistance ».
L’effet net de tous ces bruits
et de toute cette furie est un gouvernement aujourd’hui si paralysé qu’il ne
peut même plus adopter une nouvelle loi, aussi médiocre qu’elle soit, ou remplir
ses fonctions (excessives). Ce qui pourrait théoriquement être une bonne
chose, si ce n’est que ce que nous voyons aujourd’hui sont des départements
entiers livrés à eux-mêmes, et notamment le département militaire, qui opère
désormais sans aucun contrôle de la part du monde civil. Apparemment, le
général Mattis, le secrétaire à la défense, aurait pris à lui seul la décision
d’envoyer quelques 8.000 hommes supplémentaires en Afghanistan pour faire
avancer la situation dans le pays, qui traverse actuellement une seizième
année de guerre. Ou peut-être est-il parvenu à détourner l’attention de Trump
de son compte Twitter suffisamment longtemps pour lui présenter ses objectifs
et obtenir un hochement de tête approbateur.
Peut-être n’avez-vous pas
entendu parler, le weekend dernier, de l’avion de chasse américain abattu par
un avion de l’armée syrienne dans l’espace aérien de la Syrie. A une époque
antérieure, un tel acte aurait pu être qualifié d’acte de guerre. Je me
demande qui en a donné l’ordre. Et quelles en seront les conséquences. Les
gens les plus raisonnables se demandent peut-être aussi si nous n’avons pas
déjà causé suffisamment de dégâts dans cette région du monde.
Avec une armée américaine
déchaînée à l’étranger, et une communauté des services de renseignements
sortie de sa réserve à l’échelle domestique, et une Maison Blanche embourbée
dans la tourbière du Russiagate, et un Parlement et un Sénat qui ne savent
plus où donner de la tête, c’est à se demander ce que quiconque pourra faire
face à la banqueroute technique imminente des Etats-Unis, qui se profile à l’horizon
alors même que le Trésor dépense ce qui lui reste de réserves pour couvrir
ses dépenses – depuis l’agriculture jusqu’aux subventions Medicare. Ce puits
s’assèchera avant la fin de l’été, et si le problème du plafond de la dette n’est
pas bientôt résolu, le pays ne sera pas en mesure d’emprunter davantage pour continuer
de prétendre être solvable.
Rien n’indique que le Parlement
et le Sénat pourront s’extirper de tout ça. La situation est telle qu’elle
nécessitera de nouveaux tours de passe-passe financiers extraordinaires de la
part de la banque centrale et des too-big-to-fail. La conséquence la plus
probable en sera un déclin spectaculaire de la valeur du dollar, voire
peut-être même un effondrement des marchés des actions et de l’immobilier.
Le public se fiche peut-être de
la Syrie, de l’Afghanistan et du soutien du gouvernement au secteur laitier,
il ne risque pas de passer outre le fait que sa monnaie ne vaudra bientôt
plus rien. Et je doute qu’il se tourne vers Hillary pour son Salut.