La semaine dernière,
cela faisait douze ans que les Etats-Unis décidaient d’envahir l’Irak, une
décision qui selon le général William Odom deviendrait vite le « plus
grand désastre stratégique de l’histoire des Etats-Unis ».
Avant l’invasion, j’ai
été accusé d’avoir exagéré le coût potentiel de la guerre en disant qu’elle
pourrait peut-être nous coûter jusqu’à 100 milliards de dollars. Un trillion
de dollars plus tard, avec non pas une, mais deux instances de « mission
accomplie », nos troupes sont encore déployées dans le pays.
L’année dernière, le
président Obama renvoyait des troupes en Irak pour la troisième fois. Il
semblerait que le « réveil sunnite », comme l’a surnommé le général
David Petraeus, n’ait pas rencontré le succès qui était autrefois clamé. De
la violence sectaire libérée par l’invasion de l’Irak par les troupes
américaines est né Al-Qaeda, puis un groupe plus radical encore, l’EIIL.
Obama a donc une nouvelle fois déployé des hommes.
Nous avons récemment
reçu de nouvelles
preuves indiquant que la guerre nous a dès le départ été proposée sur le
dos de mensonges et de fabrications. La CIA a déclassifié une grande partie
de ses archives officielles de 2002 sur la situation en Irak, qui sont les
documents utilisés par l’administration Bush pour justifier l’attaque. Selon
ces documents, la communauté américaine des renseignements a conclu que :
« Nous sommes
incapables de déterminer si des recherches en termes d’armes biologiques ont actuellement
lieu. Les informations dont nous disposons quant au personnel irakien de
recherche nucléaire ne correspondent pas à des efforts cohérents de
développement d’un programme d’armement atomique. »
Alors même que les
services de renseignements en sont arrivés à cette conclusion, le président
Bush a annoncé au peuple américain que l’Irak « possède et produit des
armes chimiques et biologiques », et que « tout indique que l’Irak
a établi un programme de développement de l’arme nucléaire ».
De la même manière, le
secrétaire de la défense, Donald Rumsfeld, a parlé des liens évidents entre
Saddam Hussein et Al-Qaeda, liens qui ont été réfutés par le rapport du
National Intelligence Estimate.
Même la conseillère en
sécurité nationale, Condolezza Rice, a déclaré que les tubes d’aluminium
achetés par l’Irak « ne peuvent être utilisés que dans le cadre du
développement de l’arme nucléaire » et que « nous ne voudrions pas
qu’un canon fumant se transforme en champignon atomique ». Elle savait
certainement que ses propos étaient faux. Selon les services de renseignements,
le Département de l’énergie avait déjà conclu que l’achat de ces tubes
correspondait plus probablement au développement de moteurs de fusée.
Il est difficile de
croire qu’au sein d’une société gouvernée par l’Etat de droit, des dirigeants
américains puissent échapper à des poursuites après avoir menti et diffusé de
fausses informations en vue de lancer une attaque préventive contre un pays
qui ne représentait aucune menace pour les Etats-Unis. Le fait qu’ils s’en soient
tirés ne peut que pousser les interventionnistes de Washington à prendre
encore et encore les mêmes décisions. Ils l’ont déjà fait avec la Libye et la
Syrie. Il y a de fortes chances qu’ils en fassent de nouveau de même en
réponse à l’ « invasion » de l’Ukraine par la Russie.
La semaine dernière, le
président Obama accusait l’administration Bush d’être responsable du chaos
irakien. « L’EIIL est une émanation directe d’Al-Qaeda en Irak, il est
né de notre invasion. C’est un parfait exemple de conséquence inattendue. Ce
qui est aussi la raison pour laquelle il faut toujours viser avant de tirer ».
En revanche, si l’invasion
de l’Irak par les Etats-Unis est responsable de la naissance de l’EIIL et d’Al-Qaeda,
comment une intervention accrue dans la région pourra-t-elle régler le
problème ?
Une guerre qui repose
sur des mensonges ne peut être réglée par un nouveau conflit. Nous devons
rentrer chez nous. Et y rester.