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Sur la
question des véhicules diesel, Arnaud Montebourg, ministre du
redressement productif, se distingue une nouvelle fois par son patriotisme
économique. Si certains ministres à l’instar de Delphine
Batho, ministre de l’environnement, ou Cécile Duflot, ministre
du logement, veulent une convergence fiscale entre le diesel et
l’essence sans plomb, Montebourg, tout comme Pierre Moscovici, ministre
des finances, refuse cette solution : il préfère un
mécanisme de prime. Mais attention, pas n’importe lequel.
Arnaud Montebourg fait le distinguo
entre la prime nocive et la prime utile à l’économie
nationale. Ainsi, la prime à la casse tombe sous le couperet
montebourgeois : « nous sommes opposés aux primes
à la casse car ça a été une drogue qui a
précipité nos constructeurs dans la difficulté.
Ça fait trop de dégâts. » C’est
vrai : ce type de prime a bloqué le processus de
« destruction-créatrice » au sein de
l’industrie automobile française en créant un
marché artificiel fondé sur l’intervention et
l’aide de l’État. Au lieu de laisser les constructeurs
français affronter la crise en se restructurant, en réorientant
leur stratégie, en innovant, voire même en disparaissant pour
laisser la place à d’autres plus performants, l’argent
public a mis sous perfusion toute une industrie qui aujourd’hui
n’est plus compétitive – le marché
s’effondre, comme le confirme les chiffres de février – et
fonctionne à 60% au diesel ce qui est une exception française.
Mais la vérité est
qu’Arnaud Montebourg, en critiquant la prime à la casse, ne
pense pas à la notion économique de
« destruction-créatrice », loin de là.
Dans l’esprit du ministre du redressement productif si cette prime a
fait du dégât, c’est parce qu’elle a permis aux
clients de faire jouer la concurrence, de comparer différents type de
voitures, de choisir entre des véhicules français et des
véhicules étrangers. Il fustige donc une « une prime à la casse qui remplit les carnets
de commandes des fabricants étrangers. » C’est une
critique sans détour du marché de celibre-choix exercé
par les clients.
La ligne directrice d’Arnaud Montebourg est le patriotisme
économique. S’il y a une prime qui doit permettre de remplacer
les véhicules diesel par des voitures sans plomb, elle doit être
patriotique. Il explique : « Notre
souhait est de trouver une formule qui permette non pas d'attaquer le diesel,
parce qu'attaquer le diesel, c'est attaquer notre industrie, c'est attaquer
nos emplois, c'est attaquer le 'Made in France'. » Il n’en
dit pas plus sur le mécanisme pour pourrait obliger les
français à acheter seulement des véhicules
« Made in France », mais il se place, par ses dires, dans
la droite ligne des « primes à la casse » :
contrôle, limitation, protection sont les trois piliers de la
« pensée » économique d’Arnaud
Montebourg.
Le patriotisme économique
– et donc le protectionnisme – est un outil politique
démagogique et séduisant qu’Arnaud Montebourg utilise
à chaque déplacement dans les usines de Peugeot ou de Goodyear,
mais il ne mène à rien. Pire, comme le rappelle
l’économiste Frédéric Bastiat, « le
régime protecteur est une source de maux, d’incertitude et de
dangers », précisant qu’ « il nourrit
les animosités nationales, retarde l’union des peuples,
multiplie les chances de guerre, fait inscrire dans nos codes, au rang des
délits et des crimes, des actions innocentes en elles-mêmes. »
Ainsi les déclarations de Montebourg ne peuvent qu’engendrer une
tension économique avec les constructeurs étrangers qui se
sentiraient lésés et pointer du doigt les clients français
qui iraient acheter une voiture allemande ou japonaise.
Il
y a pourtant une mesure pacifique et respectueuse de la liberté du
consommateur à laquelle aucun ministre n’a fait allusion. Elle permettrait
d’augmenter naturellement les ventes de voitures roulant au sans plomb
et de diminuer le nombre de véhicules diesel. Il s’agirait tout
simplement de baisser la taxe sur l’essence sans plomb pour la mettre
au prix du diesel, voire en-dessous. Le consommateur saurait naturellement
où est son intérêt et quel type de voiture acheter : une
telle mesure ne coûterait pas un centime aux contribuables qui
pourraient même leur faire faire des économies. Mais une
économie pour le contribuable signifie une recette en moins pour
l’État, et ça, non seulement ce n’est pas à
l’ordre du jour, mais est-ce bien patriotique ?
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