Le dispositif
le plus populaire, en France, de la loi dite Obamacare est l’extension
du système d’assistance publique
« Medicaid, » lequel fournit une assurance santé
sous condition de ressources.
Pourtant,
comme le démontra une commission parlementaire il y a quelques mois,
le programme implique déjà d’immenses fraudes et
gâchis. Logiquement, comme le notait son rapport officiel, les risques
de tels abus (coûtant des milliards de dollars aux contribuables
américains, et cela sans bénéficier véritablement
aux plus défavorisés) devraient donc croître avec
l’élargissement du système.
Plus
précisément, les parlementaires mettaient en lumière
trois exemples.
Dans
l’État très Démocrate du Minnesota, les
autorités truquèrent ainsi les comptes de leurs programmes
sociaux, gonflant leurs dépenses prises en charge par
l’État fédéral. Conséquence: quatre
organismes « sans but lucratif » amassèrent en
2010 un excédent de 1,5
milliards de dollars, qu’ils redistribuèrent sous la forme de
bonus à leurs directeurs et employés syndiqués.
Dans la ville
très « gauche-caviar » de New-York, la
commission chiffra le montant des remboursements frauduleux à 10% des
dépenses totales, dont 20% à 30% relevaient par ailleurs
d’abus, ou bien de paiements pour des services non nécessaires.
Certes, la
mégalopole n’en était pas à son coup
d’essai. Un audit par le Département de la santé avait en
effet découvert que New York City avait perçu 275 millions de
dollars de fonds fédéraux injustifiés entre 2004 et
2006. Cela pour les seuls soins à la personne. Un excédent de
207 millions existait également, cette fois pour les dispensaires.
Les
législatures de gauche ne sont pourtant pas seules en cause. Le
rapport parlementaire évoqué plus haut pointait ainsi
également du doigt l’État très Républicain
du Texas. En 2010, celui-ci dépensa en effet plus en appareils
dentaires que les 49 autres États combinés- une
« anomalie » passée jusque là
inaperçue…
Trop souvent,
on se contente de croire que des programmes tels que Medicaid, et plus
généralement les systèmes redistributifs de protection
sociale, sont une « bonne chose » puisqu’ils
bénéficient aux plus défavorisés, auxquels ils
offrent l’accès à des services essentiels.
Mais, si on
l’analyse, cette croyance se limite au faux raisonnement suivant :
puisque les fonds prélevés sont destinés à une
bonne cause, ceux qui les administrent doivent être de bonnes
personnes, et ceux qui les reçoivent des gens méritants.
En fait, cela
revient à s’imaginer que le système fonctionne bien
simplement parce que son nom et la rhétorique qui l’entourent
sont vertueux.
En
réalité, l’ensemble des personnes concernées par
de tels programmes, celles qui y sont employées, comme celles qui en
bénéficient, sont tout aussi intéressées, et
prêtes à profiter de la moindre occasion de s’enrichir,
que les individus « favorisés » qui les
financent. Il en est évidemment de même des politiciens qui en
sont les leveurs de fonds.
Une administration
publique est, non moins qu’une entreprise, un moyen pour des individus
de retirer des revenus. La différence est qu’une entreprise doit
respecter les lois, satisfaire ses clients qu’elle ne peut contraindre
à payer, et subir la concurrence d’autres entités tout
aussi avides. Les administrations publiques, elles, sont des monopoles
à tous points de vue.
Il
n’est dont pas étonnant que de tels
« abus » existent. En réalité, il ne
s’agit pas du tout d’abus : les exemples cités
ci-dessus ne sont pas de simples grains de sable enrayant une belle machine,
mais plutôt les circuits parmi d’autres de son fonctionnement
normal.
Certes, les
programmes de protection sociale servent en partie leur fonction officielle
et permettent à telle famille démunie d’emmener une
petite fille chez le dentiste, ou encore à telle mère
célibataire de soigner une terrible infection : le genre
d’histoires que l’on trouve dans les journaux, les documentaires
de propagande, et les discours d’hommes politiques (1).
Mais ils ne
le font jamais que dans la limite où cela leur est nécessaire
pour se justifier et convaincre l’opinion de leur bien fondé.
Au-dela, ce sont de purs et simples systèmes d’extraction de
rentes.
La meilleure
preuve en est d’ailleurs que ces programmes ne cherchent guère
à atteindre leurs buts. Toutes les études confirment ainsi
qu’à peine plus de la moitié des américains
éligibles à l’assistance publique en
bénéficient effectivement.
La
première raison en est la difficulté d’accès
à de tels services, du fait de leur complexité bureaucratique.
Contrairement à une entreprise dont la publicité et le
management cherchent à attirer de la clientèle, les programmes
sociaux semblent s’acharner à se fermer à ceux auxquels
ils sont destinés. Du moins ne sont-ils pas incités à
les atteindre.
Car en fait,
plus le système fonctionne mal, plus grande est la part que peuvent
prélever ceux qui devraient le servir- au lieu de s’en servir.
Et plus leur financement peuvent croître, en raison de la persistance
des maux qu’ils sont censés combattre.
Tout aussi
bien, ces programmes sont, du fait de leur complexité, prioritairement
accessibles à ceux qui cherchent à les frauder,ou du moins
à des personnes auxquelles ils n’étaient pas
destinés, mais qui ont les relations et les capacités
nécessaires pour en profiter.
Bien entendu,
cela sert les intérêts électoraux : comment
s’opposer à des programmes destinés à
éviter la gangraine à de jeunes enfants ? Mais, que
l’on y réfléchisse : n’est-ce pas l’argument
idéal à mettre en avant, dans une démocratie
avancée, pour servir ses propres intérêts et de ceux de
son groupe que la poursuite du « bien
commun » ?
(1) Dans la
mesure où il servent leurs buts officiels, de tels programmes
pourraient parfaitement, notons-le, être remplacés par
d’autres bien plus efficaces, et indépendants de
l’État.
Une copie du
rapport cité plus haut est disponibleici.
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