Au Japon, des révoltes éclatent contre les taux négatifs

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Published : March 18th, 2016
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… Et les exportations plongent au rythme le plus rapide depuis 2009.

Voilà qui serait hilarant si ce n’était pas aussi sérieux : des politiciens épuisés en pleine session parlementaire, vilipendant le gouverneur de leur banque centrale pour sa nouvelle politique de taux d’intérêt négatifs. C’est là exactement ce qui s’est passé au Japon.

Les taux d’intérêt négatifs imposés par la banque centrale ont causé un grand nombre de troubles financiers. Depuis qu’ils ont contaminé l’Europe, ils ont traîné une majorité des indices boursiers en territoire baissier. Aux Etats-Unis, les actions ont plongé. Le NASDAQ est brièvement passé à la baisse avant de rebondir, et il n’est aujourd’hui que 14% en-dessous de son niveau record. Le Russel 2000 est en marché baissier et a perdu 22,4%.

Les actions japonaises ont été ravagées depuis que la Banque du Japon leur a infligé des taux de dépôt négatifs il y a trois semaines, bien que son gouverneur, Haruhiko Kuroda, ait répété plusieurs fois au Parlement qu’il ne considèrerait jamais une telle idée. Malgré le rebond enregistré en début de semaine, le Nikkei a perdu 24% depuis son récent record.

C’est pourquoi Kuroda s’est tenu jeudi face au Parlement pour être vilipendé par tous les partis présents. Selon DJ Business News, il aurait « esquivé une attaque concertée au Parlement par des législateurs qui pensaient que sa politique nuirait aux consommateurs et enverrait un message de désespoir ».

Un législateur de l’opposition du nom de Shinkun Haku s’en est pris à Kuroda : « Niez-vous que les banques imposeront un fardeau supplémentaire aux déposants » en imposant des frais ou des intérêts sur les dépôts ? « Si vous ne pouvez pas le nier, ne le faites pas. C’est oui ou c’est non. »

Kuroda a contourné sa remarque du mieux qu’il a pu et refusé de spéculer quant à de possibles frais, mais a déclaré que « les taux d’intérêt des dépôts n’auront que très peu de chances de devenir négatifs ».

Il a fait référence aux exploits des taux d’intérêt négatifs sur les dépôts en Europe, qui ont encouragé les prêts malgré quelques effets indésirables. « L’Europe a des intérêts négatifs bien plus larges que le Japon, et je n’ai pas entendu parler de taux négatifs appliqués aux dépôts individuels en Europe », a-t-il dit. Mais nous en avons bel et bien entendu parler. Les allemands les appellent intérêts punitifs.

D’autres législateurs se sont opposés à lui.

« Vous avez annoncé au peuple qu’il devrait se méfier, parce que l’économie japonaise est en difficulté », a déclaré le législateur du Parti communiste, Akira Koike.

Le législateur de l’opposition, Motoyuki Odachi, l’a accusé de « ressembler à une machine de propagande de la seconde guerre mondiale ».

Même le membre du parti au pouvoir, Masahiro Ishida, s’en est pris à lui. Sa politique est difficile à comprendre, a-t-il dit, et « pourrait avoir l’effet indésirable de déconcerter le marché ».

Déconcerter le marché ? Quel marché ? Celui que les banques centrales essaient de toutes leurs forces de manipuler ? Oui, celui-là. Les taux d’intérêt négatifs le « déconcertent », ou le font plonger. Tout le monde sait qu’il devrait grimper, notamment parce que la Banque du Japon achète 80 trillions de yens (700 milliards de dollars) par an d’obligations gouvernementales et d’autres titres, dont des ETF et des J-REITS, dans le seul objectif de faire gonfler les prix des actifs.

L’effondrement des prix des actions au Japon et partout dans le monde ne fait pas partie du plan. Et le rebond du yen face au dollar depuis l’annonce des taux négatifs, en dépit des efforts de l’écraser, n’en fait pas partie non plus. Un yen affaibli était supposé faire grimper les exportations japonaises de sorte que le Japon puisse sortir de la crise. Mais les exportations aussi sont en baisse.

Au cours de la première moitié de 2015, les exportations ont gagné 7,9%. Et puis elles ont plongé. Elles ont perdu 2,2% en octobre, 3,3% en novembre et 8% en décembre. Le Ministère japonais des Finances vient de rapporter un déclin de 12,9% des exportations au mois de janvier, leur plus grosse chute depuis octobre 2009.

Les exportations vers la Chine ont baissé de 17,5%. Les exportations vers Hong Kong – qui pour beaucoup partent ensuite vers la Chine – ont perdu 26,2%. Les exportations vers l’ensemble des pays asiatiques sont en baisse. Pour neuf des onze pays asiatiques listés, les exportations ont plongé de 15,8 (Malaisie) à 26,2% (Chine et Vietnam). Un rapport bien vilain !

Si les taux négatifs écrasent les actions, stimulent le yen et écrasent les exportations en plus de punir les épargnants, les retraités, les banques et les investisseurs sur les titres à revenus fixes comme les sociétés d’assurance, à quoi servent-ils ?

Est-ce la raison pour laquelle ces politiques ne gagnent pas le soutien du public ? DJ Business News a cité une source officielle anonyme qui a expliqué le phénomène de cette manière :

« Ceux qui comprennent cette politique nous critiquent, et ceux qui ne la comprennent pas nous critiquent également. »

Et le public n’a aucune affection pour les taux négatifs. Il est vrai qu’ils permettent à Japan Inc. d’obtenir des prêts moins chers pour financier des projets en Thaïlande ou au Vietnam. Mais la société japonaise est composée de beaucoup de retraités qui vivent de leur épargne et de leur pension. Ils ont déjà été touchés par la hausse des taxes de consommation et les hausses des prix, et les intérêts de leurs revenus ont décliné. Leurs versements de pension ont stagné. Ces gens prévoient de vivre longtemps et de rester en bonne santé. Alors ils se serrent la ceinture, ce qui n’est pas bon pour l’économie. Mais ils ne sont pas d’humeur à verser des frais ou des intérêts sur leur épargne.

La Banque du Japon a, au-delà de ses manipulations financières, une tâche difficile à accomplir. Comme l’explique DJ Business News, elle « fait face à une force différente et tout aussi difficile à contrôler : l’opinion publique ». Cette réaction négative face aux taux négatifs l’a beaucoup surprise.

Voilà où nous en sommes aujourd’hui. Les politiques monétaires sont un jeu de confiance. Les gens, et notamment les investisseurs, on besoin de croire en ces politiques et en les banques centrales comme s’il s’agissait de forces divines, ils ont besoin de les suivre à l’unisson et de refuser les appels de la réalité. Mais lorsque cette confiance se défait, tout s’écroule.

Et voilà ce que nous en tirons : un dérapage des échanges internationaux. Lisez ceci : I’m in Awe at Just How Fast Global Trade is Unraveling





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