Dans un premier
article, nous avons montré que les tueries du genre de Sandy Hook
ne se limitent malheureusement pas aux États-Unis où le port
d’arme est autorisé. En fait, dans de nombreux autres pays
beaucoup plus strict en la matière, des atrocités du même
genre ont eu lieu.
Depuis la tuerie en 1999 du lycée Columbine
à Littleton, Colorado, une cinquantaine de personnes ont commis des
actes similaires, soit, aussi froid que puisse paraître ce genre de
calcul, une moyenne d’un peu moins de quatre par ans.
Il semble raisonnable de penser qu’un
contrôle plus ou moins grand des armes à feu ne peut guère
espérer avoir le moindre effet à une si petite échelle.
Quelle que soit la législation en vigueur, il sera
toujours possible à quelques personnes de se procurer des armes et de
faire le mal. Cela est d’autant plus vrai que quiconque est prêt
à abattre de sang froid des dizaines d’innocents sera a fortiori prêt, à cette
fin, à se procurer une arme sur le marché noir, ou par
n’importe quel autre moyen.
En fait, la plus ou moins grande facilité
d’accès aux armes n’a certainement aucune
conséquence sur le nombre de détraqués qui finissent par
s’en procurer, et par tenter de s’en servir. Leur nombre est trop
limité, relativement aux possibilités de s’armer qui
restent incompressibles dans n’importe quel pays (marché noir,
chasse, tir de compétition…)
Considèrons, par exemple, les 3 millions
d’armes à feu répertoriées en France par le
fichier AGRIPPA (Application nationale de gestion du répertoire
informatisé des propriétaires et possesseurs d’armes.)
Ce chiffre comprend uniquementles armes
légalement détenues (principalement par des chasseurs et des
sportifs.) Pour ce qui est du nombre d’armes à feu circulant
réellement en France, le syndicat des armuriers l’estime
à 10 millions. Mais une enquête menée par l’Institut des hautes
études internationales et du développement avance un chiffre deux
fois plus élevé, également repris par
l’Observatoire des transferts d’armement.
Si la France connaît une mortalité par arme
à feu 10 fois moins élevée que les États-Unis (0,5
décès, hors suicides, pour 100 000 personnes, contre 5/100
000), et reste pour l’instant à l’abri du fléau des
tueries scolaires, ce n’est pas tant que les armes y sont inaccessibles
que parce que la population s’en sert moins pour commettre des crimes
de sang et autres atrocités.
Malgré la législation prohibitive du pays,
rien n’empêcherait, par exemple, un fils de chasseur de
s’emparer d’une des armes de la maison pour aller massacrer ses
pairs.
Faut-il en conclure que face à ce
phénomène, nous sommes impuissants ? Certainement pas.
Mais la réponse la mieux adaptée à cette triste
réalité humaine et sociale n’est pas dans l’illusoire
tentative de désarmer les meurtriers de masse latents et de
prévenir leurs attaques, mais plutôt de permettre à leurs
victimes potentielles de se défendre au mieux.
On oublie trop souvent que les armes sauvent également des vies.
Quelques jours avant le massacre de l’école
primaire Sandy Hook, un homme masqué ouvrit le feu dans le centre ville de Clackamas. Parmi les passants, un jeune homme de 22 ans,
titulaire d’un permis, sortit son arme et mit le meurtrier en joug.
D’après son témoignage, tirer aurait pu
s’avérer dangereux pour les passants, et il s’est donc
abstenu. Cela n’en a pas moins suffit pour mettre fin au massacre et
pousser le meurtrier à retourner son arme contre lui-même.
On se
rappelle aussi que le forcené du Connecticut mit également fin
à ses jours à l’approche d’une résistance
armée, celle de la police.
Le
« Gun Free School Zones Act, » lequel interdit le port
d’arme en zone scolaire, ne peut pas être absous de toute
responsabilté. En l’absence de cette réglementation, il
n’aurait peut-être pas fallu 10 minutes pour protéger les
enfants.
C’est
d’ailleurs dans le but d’assurer une plus grande
sécurité aux citoyens - et non par obstination
idéologique ou amour irrationnel des armes à feu - que le
Représentant républicain de Caroline du Sud, Philip Lowe, a
récemment proposé une légisaltion autorisant les
détenteurs légaux d’armes à feu travaillant dans
des écoles à les y apporter.
L’
exemple du Connecticut n’est qu’un parmi d’autres. Car il
est fréquent aux États-Unis, que des armes permettent à
des victimes de se défendre.
Une branche
de la National Rifle Association réalise une revue de presse à ce sujet mais ces
« bonnes » nouvelles ne font que rarement les
manchettes.
Plusieurs
raisons à cela. Tout d’abord, elles sont plus courantes, et donc
moins remarquables. Ensuite, elles sont moins sensationnelles, le nombre de
victimes y étant par définition moindre. Enfin, elles sont
gênantes pour les grands médias, généralement
partisans d’un plus grand contrôle des armes et d’une plus
grande intervention de l’État en général.
Outre ces
faits divers, dispose-t-on de données plus scientifiques ? Le
problème est que le sujet est tellement « chaud »
que les statistiques en la matière sont difficiles à
évaluer.
Ainsi une étude approfondie datant de 2004 rappelle que les chiffres
oscillent entre 100 000 et 2 500 000 pour ce qui est du nombre
d’utilisations annuelles d’armes à feu à des fin
d’auto-défense… Selon la dernière donnée,
les cas de protection contre des tentatives de viol se monteraient à
près de 330 000.
La
vérité est certainement entre ces deux extrêmes. Quelle qu’elle soit, elle est incomparablement
plus élevée que le nombre de blessés et de morts par
armes à feu, lequel est largement inférieur, de l’ordre
de 60 000, et comprend l’ensemble des actes d’auto-défense
débouchant sur une blessure ou un décès.
Le tableau
suivant (tiré de l’étude en question) est
également parlant. Il montre que, relativement à
l’ensemble des victimes, les personnes qui recourent à une arme
à feu pour se défendre divisent par presque 2,5 leur risque
d’être blessées lorsqu’il s’agit d’un
vol, et par plus de 2 lorsqu’il s’agit d’une
d’attaque. Pour ce qui est des risques de perte matérielle,
celui-ci est divisé par plus de 4,5.
Ces chiffres
importent, parce qu’ils permettent de garder en tête que le droit
de détenir et de porter des armes bénéficie toujours aux
plus faibles. Les plus forts n’ont pas besoin d’armes contre les
plus faibles : ils ont déjà la force de leur
côté. Ils n’ont pas non plus besoin du droit d’être
armé : criminels, ils le sont de toute façon. De ce fait,
le libre accès aux armes égalise, dans les cas urgents
où l’intervention de professionnels n’est pas possible, la
situtation au bénéfice de eux qui les emploient pour se
défendre.
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