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Bastiat et la propriété privée : éclats et limites

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Published : April 19th, 2013
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Category : Editorials

 

 

 

 

Bastiat était un penseur génial. Probablement un des plus grands économistes de tous les temps. Et ce n’est d’ailleurs pas uniquement sur le terrain économique que sa pensée a rayonné. Ses thèses sur la propriété privée ne manquaient pas d’intérêt. Mais également de lacunes.


Tout d’abord, dans un texte intitulé « Discours au cercle de la librairie », il rappela, très justement, que la loi ne saurait réguler la propriété puisque cette dernière lui est antérieure. Cette affirmation n’a rien de farfelue : Louis XVI, lui-même, indiquait que le droit de propriété est un droit naturel que l’homme tient directement de Dieu et que le prince ne saurait violer en vertu de son pouvoir législatif.


Évidemment, à notre époque, les « princes démocrates » n’ont que faire de ce principe. Tout prétexte est bon pour violer le droit de propriété, avec le soutien naïf de l’opinion publique et des médias. En cela, la lecture des textes de Frédéric Bastiat est utile, voire indispensable. Il avait d’ailleurs prédit cet état de fait en 1847 : « Plus la race humaine est faible, ignorante, passionnée, violente, plus la propriété est restreinte et incertaine. ». C’est ce qui se produit malheureusement aujourd’hui.


Toutefois, le texte de Bastiat comporte aussi des lacunes : tout d’abord, il a tendance, comme John Locke, à succomber à un propriétarisme à tous crins, évoquant, lui aussi, la notion de « propriété sur sa personne ». Cette notion traverse toute l’histoire de la pensée libérale, mais elle n’en demeure pas moins erronée et est totalement contradictoire.


En effet, la personne et le corps se confondent et il est difficile d’imaginer que l’on puisse donc être propriétaire de sa personne ou de son corps.


Or, pour reconnaître un droit sur quelque chose, il faut qu’il y ait extériorité et donc qu’il y ait un sujet de droit et un objet de droit. Où est cette dualité en matière de propriété sur la personne ? Il n’est donc pas incompréhensible que le Code civil français ignore la notion de corps, auquel cas ce dernier serait assimilable à un bien meuble ou immeuble, désacralisant, voire « salissant », de la sorte, la personne humaine.


« Le corps n’est pas un tas de viande ou équivalent d’une somme d’argent », disait le professeur Fenouillet. C’est pourtant ce à quoi Bastiat le destine involontairement, malheureusement.


Ensuite, autre erreur, le natif de Bayonne consacre la « propriété littéraire » qu’il assimile à la propriété traditionnelle. Cette défense sera reprise, d’abord par l’anarchiste individualiste, Lysander Spooner, puis deux cents ans plus tard, par Alain Laurent. Alain Cohen-Dumouchel leur répondra sur le site Contrepoints.


Alain Cohen-Dumouchel rappelle que ce n’est pas parce qu’un individu lambda photocopie un ouvrage qu’il viole la propriété littéraire d’un auteur puisqu’en aucun cas, il ne s’attribue les « droits moraux » sur le livre de ce dernier. De même, contrairement à ce qu’indique Bastiat, la propriété littéraire a besoin de l’État pour exister. Ce dernier offre ainsi un monopole à l’auteur et, en quelque sorte, un « droit à la rémunération ».


Pourtant, à l’heure d’Internet, un tel droit de propriété littéraire apparaît complètement désuet, tant il est aujourd’hui facile de lire des passage d’ouvrages, voire des livres entiers sur le Net.


L’ultime critique des défenseurs de la propriété littéraire se fonde sur le fait que, sans elle, les auteurs n’auraient aucune incitation à écrire. Il est vrai que ces derniers doivent trouver de nouvelles manières d’obtenir des rémunérations pour leurs œuvres. Et tel est déjà le cas, auquel cas l’édition aurait déjà complètement disparu.


Or, actuellement, nous pouvons, par exemple, constater que l’édition numérique est en pleine croissance, de même que l’édition scolaire, la bande dessinée, les essais, documents et reportages,…


En clair, le secteur de l’édition, malgré la crise, continue d’enregistrer des chiffres appréciables.


En conclusion, l’œuvre de Frédéric Bastiat est éclatante mais, comme tout autre travail, elle comporte indubitablement des lacunes profondes.

 

 

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Ronny Ktorza, diplômé de l'IEP d'Aix-en-Provence et d'HEC, est avocat depuis janvier 2011
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Même avec des lacunes -personne n'est parfait- l'oeuvre de Bastiat est toujours d'actualité, même plus d'un siècle après.
Je retiens malgré tout : "Le corps n'est pas un tas de viande ou équivalent d'une somme d'argent." Dérives de notre époque : greffes et implants à prix compétitifs (!) dans certains pays asiatiques : qui sont les "donneurs" et dans quelles conditions donnent-ils ????
Et si on se rapproche de nos frontières, mères porteuses et PMA.....
Science sans conscience n'est que ruine de l'âme.
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Même avec des lacunes -personne n'est parfait- l'oeuvre de Bastiat est toujours d'actualité, même plus d'un siècle après. Je retiens malgré tout : "Le corps n'est pas un tas de viande ou équivalent d'une somme d'argent." Dérives de notre époque : greff  Read more
merisier - 4/19/2013 at 7:56 AM GMT
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