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Ca ne passe pas !

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Published : September 21st, 2011
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Category : Editorials

 

 

 

 

Il y a comme un terrifiant côté jeu de massacre dans la succession actuelle des événements. D’une manière semble-t-il inexorable, les pays européens continuent les uns après les autres de s’approcher de la zone des tempêtes. Pour ne plus en sortir pour longtemps quand ils y sont parvenus.


Bien que refusant toujours de l’admettre, le secteur financier européen recèle des fragilités obstinément masquées et les banques se retrouvent à leur corps défendant à nouveau exposées sur le devant de la scène, sommées de se renforcer en capital, ce qu’elles ne veulent à aucun prix.


Peu importe qu’il soit public ou privé, les vases communiquant entre eux, le désendettement ne passe décidément pas.


A la litanie des réunions au sommet sans résultat – mais toujours présentées sous leur meilleur jour – correspond l’approfondissement d’une crise destinée à immanquablement mal finir. Les volte-faces sont devenues monnaie courante, des tabous tombent mais le déni se crispe dans ses derniers réduits. Les autorités européennes sont réduites à une figuration que l’on ne peut pas appeler intelligente.


Inquiet mais impuissant, le reste de la planète contemple le spectacle d’une Europe dont le système financier se délite sans que rien ne soit fait de convaincant pour s’y opposer. Lui-même, il est confronté à une crise qui n’épargne personne. Ni les Etats-Unis, qui vont devoir convenir qu’ils ne retrouveront pas leur souffle, ni le Japon, qui a depuis longtemps perdu le sien et pour lequel c’est aussi sans espoir, ni même la Chine, qui au contraire s’essoufle pour avoir trop vite monté les marches. Dans le monde occidental, la croissance est anémique, les pays émergents sont destinés à en subir en retour les effets. Qui entraîne ou contamine l’autre ? En fait de dynamique de croissance, c’est une spirale descendante que l’on observe. Les prévisions sont partout à la baisse.


L’acte I de la Grande Perdition était américain à l’origine ; l’acte II a changé de décor et se joue sur le Vieux continent. Avec le risque d’à nouveau déborder partout, comme le FMI vient de s’en alarmer, qui réitère ses appels à la recapitalisation des banques européennes, une préoccupation qui a gagné la Commission.


A la recherche des points d’appui qui leur sont nécessaires, Les marchés s’acharnent sur la bête, avec comme paradoxal résultat de saper les bases de l’édifice instable qu’ils ont au fil des ans bâti, tels de puissants acteurs de l’implosion du système. De quoi sont-ils porteurs si ce n’est d’une angoissante interrogation condamnée à rester sans réponse : sur quoi peut reposer leur richesse, ces actifs financiers qu’ils ont créés de toute pièce, puis amassés, qui soit susceptible de résister à la tempête ?


Certes, des secteurs entiers de leur activité spéculative restent éminemment profitables, puisque aucune entrave n’y a été opposée. Successeurs des folies titrisées, les produits indiciels (les ETF) viennent d’être projetés sur le devant de l’actualité, en raison du bête incident de parcours d’un trader un peu trop aventurier, ce qui devait immanquablement arriver. Les financiers fabriquent du risque, qui un jour ou l’autre leur échappe des mains. Mais l’avenir est pourtant sombre, car la rentabilité des établissements financiers est en berne.


L’eldorado rêvé – les marchés chinois et plus généralement émergents – est plein d’embûches et se révèle chasse gardée. Les nouveaux orpailleurs doivent composer avec les régimes et les oligarchies en place, qui octroient les permis. Les privatisations et réformes structurelles imposées en Europe au nom de la rigueur budgétaire ne représentant que des lots de consolation, tout en étant des promesses délicates à revendiquer.


Au cours de cette comédie dramatique, les actes ne se succèdent pas, ils se superposent. L’acte I se poursuit tandis que l’acte II, bien engagé, remet une couche à la crise du système financier. Impliquant pour l’économie, à eux deux, une longue période récessive faite d’instabilité financière, de soudains et brutaux incidents de parcours n’étant jamais à exclure. De quoi sera fait l’acte III ?






Billet rédigé par François Leclerc

 

 



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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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