Dans un pays
comme la France, ces niches fiscales sont le corollaire de la pression
fiscale et sociale. Elles ne sont que la face émergée du
problème.
Le constat est
sans ambigüité. La France partage, notamment avec la Belgique le
record de fiscalisation du salarié moyen. Les taux de
prélèvements réels y sont les plus élevés
de l’UE, au-delà de 55% de ce que distribue l’employeur.
Dans ces conditions, il est compréhensible qu’une multitude
d’aménagements aient été mis en œuvre pour
les employeurs et leurs salariés afin de rendre supportable la
pression sociale et fiscale reposant sur le travail. Ces aménagements
sont visibles à tous les niveaux dans la société
française.
Ce sont toutes
ces dispositions légales qui permettent de distribuer des
compléments de rémunération ou des avantages en
franchise de charges et d’impôts. Elles peuvent prendre des
formes très diverses : mise à disposition d’avantages en
nature, cofinancement de la couverture sociale complémentaire,
défiscalisation des heures supplémentaires etc.
Elles rendent
la pression fiscale plus supportable. Toutes ces niches fiscales et sociales,
mutuellement avantageuses pour l’employeur et son salarié, sont
plus économiques que la mise à disposition d’un salaire
par exemple, qui serait amputé par des charges et impôts. Elles
ne sont pas la marque d’une volonté de frauder le
système, mais des moyens octroyés au fil du temps par les
pouvoirs publics pour rendre la pression fiscale et sociale plus supportable.
Dans le
contexte actuel, il est devenu habituel de stigmatiser ces niches, en les
présentant comme des anomalies à résorber ou raboter,
afin d’augmenter les rentrées fiscales ou sociales et de
rétablir les comptes.
Une abondante
littérature s’est développée autour de la notion
de dépense fiscale et sociale. D’un point de vue conceptuel,
cette littérature met sur un faux pied d’égalité
de réelles dépenses publiques, financées par des
prélèvements obligatoires, et des dépenses fiscales et sociales
qui n’ont de dépenses que le nom. Il s’agit en effet de
dispositions légales prévoyant que certains revenus seront
moins fiscalisés ou socialisés que d’autres, voire ne
seront pas taxés. Présenter
aujourd’hui ces arrangements comme l’une des raisons des
dérapages des finances publiques ne contribue pas à
éclairer le débat.
L’accumulation
des déficits et des dettes n’est pas liée à une
relative clémence des pouvoirs publics français, incapables
d’équilibrer leurs comptes depuis 1974 en dépit
d’une hausse de la pression fiscale et sociale très
significative.
Présenter
les niches fiscales et sociales comme la cause des déficits actuels
relève d’une confusion entre causes et conséquences.
L’apparition de ces niches est la conséquence directe de
l’envolée de la pression fiscale. Une bonne partie d’entre
elles permettent de continuer à récompenser des
salariés, parmi les plus productifs de l’Union européenne,
en préservant quelque peu leur pouvoir d’achat. Si les pouvoirs
publics continuent à raboter ou éradiquer ces niches, il
conviendrait en bonne logique de réduire en parallèle le niveau
global de la fiscalité.
Faire
différemment, en supprimant les niches sans réduire par
ailleurs les impôts et charges, conduira nécessairement à
réduire d’autant le pouvoir d’achat des salariés ou
à amputer la compétitivité de leurs employeurs.
C’est ainsi que les pouvoirs publics risquent d’asphyxier
l’économie dans sa globalité et de tomber dans un cercle
vicieux connu car supprimer les niches, c’est en fait augmenter le
niveau de la fiscalité dans son ensemble et cela conduit à
terme à diminuer les rentrées fiscales.
Arrêter
de stigmatiser les niches fiscales, c’est comprendre qu’elles ne
sont que le symptôme d’un mal plus profond en France.
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