Le rocher représente la
réalité. La mousse est l’illusion qui veut que le racket soit une alternative
acceptable à l’économie. L’essence du racket est le recours à la malhonnêteté
qui vise à obtenir de l’argent, qui requiert souvent (mais pas toujours)
l’utilisation de contrainte. Certains rackets peuvent avoir lieu sans que la
victime s’en rende compte.
Est-il juste de supposer que
la gestion monétaire est au cœur de l’économie avancée et complexe qui s’est
développée au début du XXe siècle ? Je le pense bien. La monnaie est ce
qui permet les échanges et l’investissement sur des activités productives qui
supportent le commerce. Afin que la monnaie puisse signifier quelque chose,
pour qu’elle puisse permettre à finaliser les transactions, les gens doivent
être convaincus qu’elle représente légitimement sa valeur nominale. Autrement,
la monnaie ne serait rien de plus qu’appelée ‘monnaie’ – un moyen d’échange
suspecté de ne pas avoir de valeur. Une économie qui a recours à une
‘monnaie’ – notamment les économies de racket – est en difficulté. Et c’est
là qu’en est la nôtre en ce mois de décembre 2013.
Nos problèmes ont atteint leur
vitesse de libération à l’automne 2008, alors qu’une branche particulière de
racket appartenant à l’armada de racket qu’est Wall Street est devenue hors
de contrôle. Je parle bien entendu de l’entreprise de vente de prêts
immobiliers et de ‘nouveaux produits dérivés innovateurs’ à des dupes qui ne
savaient pas qu’ils s’étaient laisser prendre dans un piège qui ultimement a
beaucoup profité aux vendeurs de papier sans valeur. Pour reprendre les mots
du sénateur Carl Levin (D-Mich), ‘les affreux
contrats propagés par les semblables de la crypto-banque Goldman Sachs – les
obligations garanties par la dette – ont pris au pièges des gestionnaires de
fonds trop crédules et d’autres individus trop assoiffés de rendements’.
Il se trouve que les banques
qui distribuaient ce genre de contrats ont fini par s’étouffer dessus quand
‘la musique s’est arrêtée’ – quand les
swaps de produits dérivés qui se trouvaient au cœur de cette duperie ont
commencé à échouer et qu’il est devenu clair que les ‘produits’ de ce type
étaient en passe de faire sauter tout le système bancaire. Au passage, les
guillemets que j’utilise délibérément sont nécessaires pour démontrer que
dans une telle matrice de rackets, les choses ne sont pas ce qu’elles
semblent être mais ce qu’elles prétendent être.
L’effondrement de Bear Sterns suivi de
l’implosion de Lehman Brothers
et de la mort effleurée d’AIG ont permis aux ‘civils’ en dehors de Wall
Street de réaliser que les banques étaient liées à un tissu de fraudes et
d’insolvabilités et devaient être ‘sauvées’ pour que les Etats-Unis puissent
conserver leur ‘niveau de vie’. Le remède choisi s’est trouvé être de
nombreuses couches supplémentaires de fraude qui sont désormais devenues des
rackets institutionnalisés. Celui que nous connaissons le mieux est le
‘quantitative easing’, mais n’oublions pas la
politique des taux d’intérêts proches de zéro. Le racket le moins connu, qui
remonte à 2009, a été la réforme comptable appliquée par le Financial Accounting Standards Board, qui
a autorisé les banques à inventer les chiffres qu’elles se sentaient prêtes à
reporter concernant la valeur de leurs actifs.
Ces opérations malhonnêtes et
régularisées peuvent être appelées des prises d’otages centrées autour de la
contrainte. Cette contrainte prend la forme de menaces comme le QE, dont
profitent les banques sous forme de prêts ‘carry-trade’
et de premiums, qui enverront l’économie tout droit vers l’âge de pierre. Ce
qui est souvent laissé de côté est la destruction rampante des citoyens (ou
de la ‘classe moyenne’) qui ont déjà oublié ce qu’est le ‘niveau de vie’ que
Wall Street se dit défendre. Les politiciens sont bien entendu impliqués dans
ces rackets, puisqu’ils ont employé des servants chargés d’exécuter et de
protéger les opérations de pillage de Wall Street.
Le hic semble être la
dissonance cognitive entre l’euphorie symptomatique des indices du marché des
actions et la conviction de certains sceptiques que les rackets sont
désormais si peu scrupuleux que nous ne pouvons même plus espérer les voir
prendre une trajectoire qui puisse les mener vers une magnitude inférieure à
celle de 2008.
Les soins de santé représentent
aussi un racket, parce que les gens malades sont difficilement en position de
marchander, mais ce n’est qu’un sous-système de la matrice de rackets qui ont
fait des Etats-Unis une société si malhonnête. ObamaCare
ne fera qu’aggraver la situation, et ce très rapidement, puisque ses règles
ont été rédigées par les lobbyistes des industries qui en bénéficient.
Le plus grand mystère dans
tout ça reste de savoir qui sont les personnes qui
possèdent un pouvoir institutionnel et qui soient prêtes à dénoncer cette
perfidie. Qu’est-ce qui a bien pu faire des Etats-Unis une nation de lâches
qui ne peut produire rien de plus qu’une poignée de comédiens assez courageux
pour dire la vérité sous forme de blagues. Tout ça n’a rien de drôle.