Cela fait maintenant un mois que le monde semble
s’être arrêté – si ce n’est
peut-être pour ce qui concerne la liaison qu’entretiennent
désormais Kim Kardashian et Kanye West et
qui, selon les dires de certains, serait de très bon augure pour
l’économie (et irait même jusqu’à favoriser
une diminution du taux de chômage), le gasoil à 4 dollars le
gallon et la désignation de Jésus Christ au poste de directeur
personnel de campagne de Mitt Romney. En
réalité, les choses qui se trament actuellement sous la surface
sont à donner le mal de mer sur la terre ferme.
En Europe, le fiasco financier s’est aggravé
à tel point que le public n’est plus aujourd’hui en mesure
d’en comprendre l’intégralité de l’intrigue.
Le fait est que rien ne se soit encore arrangé pour la Grèce,
et que plus rien ne semble pouvoir empêcher l’Europe toute
entière de faire naufrage. La question qui se pose aujourd’hui
est de savoir combien de mois il faudra encore attendre avant que
l’apparente normalité financière ne débouche sur
l’éclatement de guerres civiles dans les rues de pays
supposés civilisés.
Les finances de l’Espagne, comme nous avons pu le
voir cette semaine, sont actuellement dans une situation telle qu’elles
semblent tout droit sorties de l’imagination de M.C. Escher.
Le plan ayant été mis en place afin de
coaguler l’hémorragie Espagnole fonctionne de la manière
suivante : les banques Espagnoles les plus importantes empruntent des
milliards d’euros à la BCE, puis prêtent cet argent
à leur gouvernement afin de lui permettre de financer un plan de
sauvetage pour les banques du pays, qui utilisent l’argent obtenu de
ces plans de sauvetages afin d’acheter des obligations à leur
gouvernement, ce qui revient finalement à lui prêter de
l’argent. La réponse du monde à la découverte de
cette idiotie n’a été autre qu’un simple
bâillement aux corneilles.
Nous aurions pour le moins pu espérer que quelques
Allemands s’en étouffent sur leur bratwurst…
L’idée que de telles combines puissent
être répétées encore et encore doit faire
doucement sourire plus d’un historien digne de ce nom. Mais en ce
cinquième mois de l’année 2012, rien ne semble encore
avoir pénétré la grande muraille d’illusions qui
sépare encore les affaires monétaires de la
réalité, telle le miroir de la salle d’interrogatoire
d’un commissariat de police derrière lequel les officiers
seraient corrompus jusqu’au dernier.
La leçon que nous pouvons tirer de cette
première partie de l’année 2012 est que peu importe ce
qu’il peut bien se passer, rien n’a plus la moindre importance.
Jon Corzine, principal responsable de la fraude MF
Global, est toujours en cavale, de nombreux mois après avoir
dérobé plus de 1,2 milliard de dollars dans les comptes de ses
clients, dont beaucoup s’avèrent être des agriculteurs
dont l’activité sur le marché des matières
premières est nécessaire à la survie de leur entreprise.
Personne, au Chicago Mercantile Exchange, ou à la Commission des
Contrats à Termes sur le marché des matières
premières, n’a encore été démis de ses
fonctions. Aucun journaliste n’a jusqu’à présent
demandé au président Obama comment de telles choses ont pu se produire,
ou pourquoi Jon Corzine est toujours
mentionné comme étant l’un des contributeurs majeurs de
la présente campagne électorale. Pour changer, il semblerait
que le New York Times soit encore une fois plus intéressé
à poursuivre ses propagandes et à débattre de la
manière dont les Etats-Unis deviendront bientôt une nation
exportatrice de pétrole.
Personne, parmi la communauté des journalistes
Américains, ne porte plus la moindre attention à la situation
Japonaise – non seulement ils semblent avoir oublié les
retombées de la catastrophe de Fukushima, mais également la
fermeture virtuelle par le Japon de son industrie nucléaire, qui ne
fera qu’augmenter sa demande d’importation en pétrole et
en gaz afin de lui permettre de pouvoir continuer de fournir de
l’électricité à ses citoyens. Le Japon pourrait
bientôt devenir le premier pays industrialisé à adopter
un modèle socio-économique néo-médiéval.
L’Afrique et les pays Arabes continuent de se
consumer tels d’immenses feux de bois. Politiquement, rien ne semble
encore en voie de s’arranger, et les maniaques Islamistes prendront
bientôt la tête de l’Egypte et de la Lybie, sans parler de
la Syrie, ou encore du champ de bataille aux trillions de dollars des
Etats-Unis en Afghanistan où, après dix années de conflits,
les Américains ne peuvent toujours contrôler ni leur zone
d’occupation ni les gens qui y vivent. Et n’oublions pas le
Soudan, qui se déchire depuis maintenant une semaine pour ses
réserves de pétrole. A 88 ans, le roi Abdullah d’Arabie
Saoudite ne rajeunit pas. Les nappes de pétrole de son pays ne feront
plus aucune importance lorsque ce dernier se sera transformé en
brasier.
Je me demande quand le public Américain sortira
enfin de sa torpeur qui le pousse à s’imaginer qu’en
dehors de ce qu’il se passe dans la vie des Kardashians,
plus rien n’a d’importance. Aujourd’hui, plus personne de
croit encore que les cohortes politiques des Etats-Unis – tea party, centristes, ouvriers de gauche (ou ce
qu’il en reste) – soient en mesure de combattre pour leurs
idéaux ou encore de manifester dans les rues de la capitale - depuis
les bureaux de la SEC jusqu’au musée de cire, connu pour avoir
autrefois abrité en ses murs le Département de la Justice
– contre nos trop nombreuses institutions dépravées.
Selon moi, la crise aura bientôt terminé sa
phase de consolidation et, comme un bourgeon sur un arbre de
Nouvelle-Angleterre, finira par fleurir et laisser place à quelque
chose de bien plus spectaculaire.
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