Les dirigeants
Européens disent aujourd’hui vouloir conjuguer croissance et
austérité. Tout cela peut sembler bien beau mais, en
réalité, ils n’ont aucune idée de comment y
parvenir.
En 2008,
j’écrivais que l’attitude typique des gouvernements
médiocres aux problèmes économiques serait de combiner “austérité”
et “stimulus.”
Ce sont là exactement les termes qu’ils utilisent
aujourd’hui. Ils ne sont même pas capables d’inventer de
nouveaux termes et utilisent toujours les mêmes,
génération après génération.
Je ne pensais
pas qu’ils puissent faire mot pour mot ce que j’avais
prédit.
Les
gouvernements rebondissent
entre stratégies d’austérité et de stimulus, et
commencent finalement à découvrir qu’elles sont toutes deux
vouées à l'échec.
Stimulus
signifie généralement augmentation des dépenses
gouvernementales. Tôt ou tard, les gens finissent par découvrir
qu’il tend à favoriser le gaspillage et les capitalistes de
copinage et à entraîner l’explosion de la dette du
gouvernement, après quoi le système politique se tourne
à nouveau vers des mesures d’austérité.
Austérité
est synonyme d’une augmentation des taxes et d’une diminution des
dépenses. Plus les taxes augmentent, plus on réalise que
personne ne veut d’une réduction des dépenses, tout
particulièrement si l’économie s’effondre en raison
de taxes trop élevées. Les seules réductions de
dépenses qui voient le jour tendent à aller au détriment
des secteurs les plus bénéfiques à la
société, alors que le gaspillage et les pots-de-vin des
capitalistes de copinage continuent sans répit. L’affaissement
de l’économie entraîne une baisse des recettes fiscales et
le déficit gouvernemental continue de se
creuser.
Le public
finit après un certain temps par se plaindre du fait que les services
les plus importants souffrent de réductions de dépenses, dans
le même temps que le nombre de bureaucrates augmente de plus belle. Les
capitalistes de copinage – aujourd’hui, les industries bancaire
et militaire – reçoivent toujours des pluies de financements
injustifiées. Les taxes, déjà bien trop
élevées, continuent d’augmenter – comme si notre
problème provenait d’une trop faible taxation !
L’économie s’effrite et le public fait entendre sa voix.
En réponse, le gouvernement s’empresse de déclarer
qu’il est impossible de réduire les dépenses, ne
serait-ce qu’un petit peu, et se lance à nouveau dans une politique
de stimulus.
Et
qu’est donc le résultat de tout cela ? Plus de
dépenses (dues au stimulus), et plus de taxes (dues à
l’austérité), ce qui finit par laisser place à un
climat économique moribond et entraîner des défauts
souverains, comme nous avons pu le voir récemment.
Quelle pourrait
bien être la solution à tout cela ? Que signifie conjuguer
austérité et croissance ?
Je
suggère une stratégie différente : une diminution
des taxes (pour venir en aide à l’économie),
accompagnée d’une réduction des dépenses (pour
faire face au problème du déficit).
Une diminution
des taxes devrait dans un premier temps prendre la forme d’une
réforme de l’impôt, qui se révèlerait
probablement fiscalement neutre en termes de recettes fiscales en pourcentage
du PIB. En d’autres termes, il s’agirait d’une solution de
type flat-tax telle qu’en ont mis en place de nombreux gouvernements au cours de ces dix
dernières années et dont les résultats se sont toujours
avérés positifs.
Peut-être
le gouvernement ou son électorat désirerait-il même aller
plus loin que cela et décide de réduire à la fois les
recettes fiscales et les dépenses gouvernementales en pourcent du PIB.
En revanche, une stratégie de fiscalité neutre peut, à
elle seule, déjà permettre d’accomplir beaucoup.
La
réduction des dépenses gouvernementales devrait se concentrer
sur le maintien des services gouvernementaux les plus demandés, mais
de manière plus efficace et moins coûteuse. Le nombre
d’employés du gouvernement devrait être réduit
jusqu’à ce qu’il suffise au maintien de ces services et
leur compensation devrait être à la fois réaliste et
pérenne. Certains services de santé (comme Medicare) devraient
être restructurés afin d’apporter un service
équivalent à moindre coût.
Les primes
accordées aux capitalistes de copinage devraient être
réduites ou, mieux encore, éliminées.
Pourquoi un
électeur se plaindrait-il de telles mesures ? Les citoyens
disposeraient d’un meilleur système de taxes et des mêmes
services, et souffriraient de bien moins de gaspillage et de vol de la part
de leur gouvernement. Une telle réforme du système de taxation
serait bénéfique à l’économie et la
réduction du gaspillage par le gouvernement libèrerait des
ressources qui pourraient être redirigées vers le secteur
privé productif, qui à son tour pourrait créer plus
d’emplois.
Politiquement,
il est bien plus simple de réduire les dépenses du gouvernement
lorsque le secteur privé est en pleine expansion ou lorsqu’un
meilleur système de taxation lui en offre le potentiel. Les
entrepreneurs se rendront vite compte que le vent a tourné en leur
faveur.
Cette
stratégie n’a rien de nouveau. C’est la même que
celle que Margaret Thatcher et Ronald Reagan ont tenté de mettre en
place dans les années 1980.
C’est
cette même stratégie qu’ont utilisé les dirigeants
Japonais après la restauration Meiji en 1868. L’ancien code
fiscal fut remplacé par un système minimaliste qui permit au
gouvernement de tirer ses recettes fiscales d’un simple impôt
foncier. Le reste de ses revenus provenait de taxes sur l’alcool.
Les dirigeants
Japonais éliminèrent ensuite les bureaucrates dont ils
n’avaient pas besoin en mettant en place une grande purge.
Ils introduisirent
également une nouvelle devise nationale, le yen, qui fut lié
à l’or et fixé à une valeur égale à
celle du dollar (1/20,67e d’une once d’or).
Qu’en
a-t-il découlé ? La première ère
d’expansion industrielle au Japon. Aujourd’hui encore,
près de 150 ans après que ces réformes aient
été mises en place, le Japon demeure le seul pays ethniquement
non-Européen à être considéré comme
étant une économie développée.
Comment un
gouvernement pourrait-il aujourd’hui mettre en place une telle
stratégie ? Prenons l’exemple de la Grèce :
1)
Faire
défaut et restructurer la dette de son gouvernement. Les erreurs du
passé ont des conséquences et il est aujourd’hui
nécessaire pour ceux qui les ont rendues possibles de comptabiliser les
pertes. L’incapacité de la Grèce à accéder
à un financement de sa dette lui sera bénéfique en
termes d’implémentation de réformes des dépenses.
2)
Placer
les banques insolvables sous administration et restructurer leurs dettes afin
qu’elles puissent redevenir solvables et soient à nouveau
capitalisées. Cela ne devrait rien coûter au gouvernement.
3)
Mettre
en place une réforme du système de taxation en instaurant par
exemple un système de flat-tax avec taux de
base de 18%, et une TVA d’environ 12% (contre 23% aujourd’hui).
Nul besoin de quoi que ce soit d’autre.
4)
Mettre
en place une réforme des dépenses, en préservant les
services les plus utiles et éliminant les dépenses inutiles,
les compensations trop généreuses et toute forme
d’avantage attribué aux capitalistes de copinage.
5)
Maintenir
une devise stable et fiable, ce qui pourrait revenir à conserver
l’euro, tout en refusant l’ingérence des autres nations
Européennes dans ses affaires domestiques. L’euro pourrait un
jour ne plus être stable ou digne de confiance, auquel cas une autre
solution devrait être envisagée.
‘Dans
vos rêves’, me direz-vous. Et alors ? Pour qu’un plan
puisse être mis en place, avec ou sans succès, il faut
déjà en avoir un. Il est clair que ma stratégie soit
meilleure que le rebondissement incessant entre austérité et
stimulus que semblent aujourd’hui adopter les gouvernements.
Aussi
irréaliste que cela puisse paraître, le gouvernement parvient
parfois à accomplir de telles prouesses. Bien souvent, il y parvient
en pleine crise. D’une crise, nous en disposons aujourd’hui en
Grèce. Il semble que le timing soit parfait.
Nathan Lewis
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