« J’ai
beaucoup médité sur votre idée qu’un boom soit entièrement lié à la
croissance économique, et que la succession de booms poursuive la destruction
du capital et notre appauvrissement ». LH
La
citation ci-dessus est tirée d’un email qui a été le plus beau cadeau de Noël
dont j’aurais pu rêver, à une époque où les gens et les médias en général
acceptent sans y penser la fable de Wall Street selon laquelle l’économie
serait désormais en phase de reprise, grâce notamment aux efforts de la
Réserve fédérale… qui a une fois de plus sauvé le capitalisme face à
lui-même !
Je
n’essaie pas de nier que les actions aient enregistré des records, et que
l’emploi, le PIB, le profit, le crédit et la consommation s’élargissent – aux
Etats-Unis – du moins d’un point de vue nominal. C’est exactement la raison
pour laquelle les banques centrales du monde sont forcées de poursuivre leurs
efforts ou de faire face à la déflation et au défaut de leur gouvernement.
Que
se passe-t-il donc ?
Pourquoi
est-ce que moi-même et tous ceux qui partagent mon point de vue insistons sur
le fait que ce que disent les médias au sujet de la croissance n’est absolument
pas vrai ? D’une part, Wall Street tire des intérêts de la promotion de
la fable de la croissance pour des raisons financières évidentes, alors que
les banquiers centraux et les hommes politiques en tirent des intérêts
propres – les deux groupes veulent être renommés et réélus, et plus ils font
entrer d’argent dans les caisses du quartier financier, plus ils ont de
chances d’y parvenir.
J’adhérais
autrefois à cette histoire de par mon ignorance, ayant moi-même cru au mythe
que je puisse travailler sur un marché libre compétitif protégé par des
politiques gouvernementales de laissez-faire. Je ne pense pas m’être rendu
compte avant ma cinquième année en tant que courtier que les banques
centrales étaient en fait « centralisées », qu’elles existent pour
centraliser et socialiser l’industrie, et non pour nous apporter une devise
mythologique parfaitement pensée. Bien qu’on les appelle banques centrales,
il ne m’est jamais venu à l’esprit qu’elles puissent être autre chose que les
symboles d’un capitalisme de marché libre, parce qu’elles sont évidemment
nécessaires pour soutenir les marchés. N’est-ce pas ?
Mais
certaines choses ont commencé à se produire à la fin des années 1990 qui ne
pouvaient pas être expliques par l’économie telle que je l’avais apprise, et
j’ai commencé à lire au sujet de la question monétaire. Jusqu’alors, je
pensais que les gens comme Casey étaient des fêlés. Je n’avais même pas
encore entendu parler de Mises. Soros était encore
un modèle. Comme bon nombre d’autres anarchistes libertaires, j’ai grandi en
pensant que Reagan et Thatcher avaient favorisé le laissez-faire. J’avais
tant à apprendre. Et puis j’ai découvert ce qui n’allait pas avec les
déclarations officielles.
Mais
voulez-vous savoir ce qui m’a le plus brisé le cœur ?
Je
ne pouvais pas sauver les gens d’eux-mêmes – de leur détermination à
s’infliger de la peine au travers de mauvais investissements – même après
avoir perçu la situation pour ce qu’elle était vraiment. La raison pour
laquelle la fable de la croissance est si facile à vendre est qu’elle est
exactement ce que les gens voulaient entendre. Quoi de plus facile pour ceux
qui enfoncent la tête de la sable ?
Ce
qui est plus difficile, c’est de dire aux gens ce qu’ils devraient réellement
faire, parce qu’ils n’ont pas envie de l’entendre.
Entre
autres choses, les politiques des banques centrales encouragent les
comportements imprudents en récompensant les preneurs de risques tout en
punissant les plus prudents en période de boom. Voilà qui encourage la prise
de risques en récompensant les paris les plus dangereux. J’étais à l’époque
encore assez naïf pour croire qu’il y avait une demande en conseillers
prudents.
Et
je suis désolé de le dire, la prudence traverse un marché baissier à chaque
fois que la Fed génère un nouveau boom.
Mais il y a un « truc »
Le
fait est qu’un boom a tous les airs d’une croissance. Mais par définition, il
est tout le contraire.
Les
cycles de booms et de contractions ne sont pas inhérents au capitalisme de
marché libre. Et le chômage non plus. Ce sont là des mythes marxistes,
auxquels tout le monde croit aujourd’hui si ce n’est l’école autrichienne
d’économie. Ces cycles sont générés par la manipulation des taux d’intérêt.
Les interventions des gouvernements sont à l’origine des récessions.
Quelle
surprise !
Mais les booms ont du bon, non ?
Certains
pensent que les booms apportent tant de bonnes choses que les contractions en
valent la peine. Après tout, sans le boom sur l’investissement,
disposerions-nous aujourd’hui de toutes ces technologies ?
C’est
une façon de penser rationnelle si vous ne comprenez pas tout à fait ce que
j’essaie de vous dire. A dire vrai, tout ce qui a du bon, tout ce qui a le
plus de valeur pour la société, est la conséquence des forces productrices du
capitalisme de marché libre. Le boom n’a rien à voir avec une croissance sous
stéroïdes. Il n’est pas non plus produit par une exubérance irrationnelle,
pas selon la théorie des cycles de l’école autrichienne.
Comme
le dit la personne qui m’a envoyé l’email ci-dessus, il est
« entièrement délié de la croissance économique ».
Selon
la pensée de Mises, la définition d’un boom est un processus encouragé par la
politique de suppression des taux d’intérêt qui affecte la diversion du
capital depuis ceux qui le produisent vers ses gaspilleurs ultimes, ou les
consommateurs.
Il
est définit comme une période de mal-investissements, et non de formation de
capital de longue durée.
Il
est hostile au processus sous-jacent de croissance. Il est son antithèse. Il
est la conséquence d’une politique qui cherche à supprimer le mécanisme de
découverte des prix du marché libre nécessaire à une croissance durable.
La
politique qui en est la cause gonfle des ressources rares, gaspille du
capital et taxe la croissance. Elle subventionne la consommation aux dépens
de la croissance potentielle en décourageant l’épargne réelle.
Elle
est financée par la contraction… par l’imposition de cycles qui viennent
remplacer une demande plus durable. Mais la contraction n’est rien de plus
qu’un marché qui tente de se tourner à nouveau vers des prix réels.
Le
boom est un excès de consommation d’une part, et une redistribution de
richesses de l’autre.
La
raison pour laquelle nous n’y voyons que du feu est liée au fait qu’un boom
repose sur la fraude et la tromperie. Il est lié au système bancaire de
réserve fractionnaire et a recours à la tromperie en faisant croire aux
entrepreneurs que davantage d’actifs sont disponibles à l’investissement
pendant les premiers stages de la structure de capital
qu’il n’en existe réellement.
L’essence
du problème est le mécanisme de taux d’intérêt.
Puisque
les changements de prix sont généralement sensés contenir des informations
que les entrepreneurs peuvent utiliser dans le déploiement quotidien et
l’organisation de leurs ressources (et de leur capital), il en va de même
pour les fluctuations de taux d’intérêt.
Le prix du temps
La
différence est que le prix de la monnaie reflète le taux de change de la valeur
actuelle des biens, alors que le taux d’intérêt résulte d’un échange entre la
valeur actuelle et la valeur future d’un produit monétaire.
L’intérêt
est le prix du crédit, et est déterminé par l’interaction entre l’apport
d’épargne (sur le marché du prêt) et la demande en épargne (emprunt ou
investissement). Il gouverne la demande et l’offre de la même manière qu’un
prix gouverne l’offre et la demande pour n’importe quel produit – un prix qui
fluctue librement permet de maintenir l’équilibre entre l’offre et la
demande.
Non
seulement l’intérêt équilibre cette relation, il gouverne aussi l’arbitrage
entre la consommation et l’investissement, qui à son tour affecte l’offre et
la demande en crédit. La fonction principale de cette régulation par le
marché libre est la coordination des ressources et des facteurs de rareté
tout au long du processus de production. Plus il y a d’épargne, plus il est
possible d’investir en cours de recherche et développement, d’exploration, de
développement de projets, et ainsi de suite.
Le
dogme économique et financier dominant (le Keynésianisme) nie quant à lui le
lien qui existe entre épargne été investissement, et l’arbitrage entre
consommation et investissement.
Du
point de vue keynésien, l’épargne est une mauvaise chose parce qu’elle
représente un drain, alors que l’investissement est cyclique puisqu’il est
encouragé par l’esprit animal. En raison des échecs du marché, il est
nécessaire que des mesures soient prises pour assurer un flux constant
d’investissement sans que personne n’ait à sacrifier un iota de consommation,
sans quoi nous ferions face à une dépression.
Une politique qui cherche à gonfler les
rendements financiers
Les
Keynésiens tentent de remplacer l’épargne volontaire par une épargne forcée,
et perçoivent à tort le taux d’intérêt comme appartenant à la théorie de
l'intérêt plutôt qu’à la préférence temporelle.
C’est-à-dire
que l’une des manières de parvenir à leurs objectifs est de gonfler la valeur
monétaire des salaires pour laisser croire que leurs politiques améliorent
les rendements, et que du capital est bel et bien formé au vu de l’argent
qu’il est possible de faire en fabriquant des produits quels qu’ils soient.
En dehors de la falsification des revenus, il y a deux autres problèmes
présentés par cette politique.
Travailler dans le seul intérêt de travailler
n’est pas une croissance
Selon
ce point de vue, le type de bien produit n’a aucune importance puisqu’aux
yeux des Keynésiens (et de l’école de Chicago), le capital n’est qu’une masse
homogène. Soit il gonfle, soit il ne gonfle pas.
Ils
ne se soucient pas de savoir si la société a besoin des biens qui sont
produits. Vous pourriez allez casser des carreaux ou déclarer une guerre, de
leur point de vue, vous ne feriez que stimuler davantage la croissance.
Voilà
pourquoi : ils mesurent tout en termes de monnaie ; et la monnaie
fiduciaire du gouvernement peut être imprimée à l’infini. Les biens ne le
peuvent pas. L’arrivée de plus de monnaie pour acquérir davantage de biens ne
peut que nourrir l’illusion.
Non
seulement ils définissent la croissance en termes de monnaie injectée dans
l’économie, ils la comparent à la consommation plutôt qu’à l’investissement
(bien que l’épargne et l’investissement soient à l’origine de la croissance)
et manquent de faire la différence entre la croissance liée à la consommation
financée par l’investissement durable (hausse du capital) et celle qui est
liée à la consommation financée par l’investissement non-durable
(l’inflation) – aux dépens du capital.
Pourquoi la croissance durable requiert
l’épargne
Leur
monde est bidimensionnel : soit le PIB gonfle, soit il ne gonfle pas, et
il est possible de le faire gonfler par l’impression monétaire. Ils peuvent
faire gonfler la valeur des actions et d’autres actifs en créant de la
monnaie. Ils peuvent faire gonfler la valeur monétaire des salaires et
générer une illusion de prospérité. Ils peuvent même créer des emplois, du
moins temporairement. Le deuxième problème, qui vient s’ajouter au premier
(gaspillage de capital pour la production de biens dont la société n’a pas
besoin) est que l’interférence des législateurs dans la création d’un taux
d’intérêt centralisé est la source des erreurs qui mènent au
mal-investissement, et ultimement aux cycles économiques.
La
cause des cycles économiques est le mal-investissement et le manque d’épargne
réelle qui génèrent un déséquilibre entre l’épargne et l’investissement. En
créant de la monnaie et du crédit mal équilibré, les banques du système
fractionnaire impriment essentiellement des duplicatas de reçus (de la
monnaie) qu’elles injectent dans l’épargne existante et sur les marchés du
prêt et du crédit, abaissant ainsi les taux d’intérêt appliqués à ces prêts.
Cette
apport d’épargne forcée
ou falsifiée remplace ou chasse l’épargne réelle ou volontaire, qui est
effectivement découragée par les taux d’intérêt peu élevés. C’est un bénéfice
supplémentaire aux yeux des planificateurs centraux, puisqu’il place le
contrôle de l’investissement entre les mains de leurs amis de Wall Street et
du gouvernement.
Des
taux d’intérêt peu élevés poussent aussi les entrepreneurs et les
capitalistes à croire qu’il est devenu profitable de réarranger l’allocation
de leurs ressources tout au long de la structure de capital.
Ils
suggèrent que les ressources jusqu’alors dévouées à la production de biens à
la consommation peuvent être redéployées sur des stages antérieurs de la
structure de production – plus loin encore du consommateur.
En
d’autres termes, s’il y avait eu un déclin général de la consommation de
télévisions écran plat parce que les gens auraient pensé plus justifié
d’épargner pour pouvoir investir sur le long terme, plus d’employés auraient
offert leurs services à des entreprises de construction ou de plantation
d’arbres… ou peut-être seraient-ils retournés à l’école pour apprendre
l’ingénierie et seraient devenu membres d’équipes de recherche et
développement dévoués à la génération d’un capital plus solide.
Cette
épargne se reflèterait sur un taux d’intérêt plus faible, et un entrepreneur
pourrait engager ces employés dans le cadre du développement d’un projet qui
n’était autrefois pas jugé économique mais l’est devenu avec la baisse des
taux.
Mais
dans le cas où l’épargne est forcée, le consommateur ne s’abstient pas, et
les ressources continuent d’être employées sur les stages de production qui
servent au mieux le consommateur stimulé.
Des
taux intérêt artificiels découragent l’abstention à la consommation.
Il
n’en est pas moins qu’ils encouragent la demande en investissement (en
emprunts).
Et donc un autre déséquilibre ?
En
conséquence, vous avez un déséquilibre entre l’investissement et l’épargne.
C’est-à-dire que vous avez une pénurie d’épargne, ou une pénurie de crédit
garanti par de l’épargne réelle.
Tant
que les banques centrales continueront de supplanter cette pénurie de
l’épargne en dupliquant des reçus et les injectant dans l’épargne existante, elles
placeront le contrôle du capital et des ressources même les plus rares entre les
mains imprudentes de ceux qui sont le plus prônes à la
destruction de capital.
La
hausse du prix des actifs, des salaires, du PIB et la baisse du taux de
chômage sont pour beaucoup une preuve suffisante de croissance.
La contraction
La
farce finit par être révélée lorsque :
- La banque centrale cesse
d’imprimer de la monnaie (et que les taux d’intérêt retournent à la
normale), et/ou que
- Les excédents de monnaie
alimentent le conflit existant pour les actifs les plus rares et
révèlent la fausseté des économies.
En
manipulant les taux d’intérêt, la banque centrale manipule une structure
complexe tridimensionnelle mais rationnellement hétérogène et organisée de
capital de laquelle elle ne sait rien.
En
conséquence, elle génère des cycles économiques… et réduit la croissance à
des cycles de boom et de contraction.
La
raison en est que la Fed (ou le gouvernement) ne peut produire ou stimuler la
croissance.
Seul
l’investissement rationnel et prudent de capital peut soutenir la croissance
économique dans le même temps que la Fed et ses interventions influencent les
signaux utilisés par les entrepreneurs et autres acteurs économiques pour
prendre des décisions rationnelles. Non seulement ces politiques les trompent
quant à la disponibilité d’épargne pour l’investissement aux stages les moins
avancés de la structure, elles les poussent à consommer une partie de leur
capital (en falsifiant les profits).
Tout
ce capital est gaspillé et abusé par des politiques pour gonfler la valeur de
la monnaie et la consommation afin d’aider les élites à être réélues.
Si
ces politiques continuent d’être abusées, il finira par ne plus y avoir de
capital et de croissance.
Malheureusement,
compte tenu de l’état des finances des gouvernements, ces politiques seront
certainement abusées pendant encore longtemps, et nous sommes pour le moment
condamnés à subir les attaques continuelles contre la formation de capital.
Les
booms dureront aussi longtemps que les planificateurs centraux pourront
falsifier les facteurs économiques.
Mais
tout ça n’est que distraction, et non pas une croissance sous stéroïdes.
Ce
qui se joue aujourd’hui est un jeu de reprise malhonnête. N’y croyez pas un
instant.
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