Le marché boursier est en plein
essor ce matin, après qu’il a été annoncé que seuls 5,7 millions d’habitants
de la Floride devront vivre sans air conditionné, douche chaude et capuccino
Keurig le matin du lundi 11 septembre 2017. Je suis conscient du fait que les
fils d’actualité restent généralement très calmes le lendemain du passage d’un
ouragan, pendant que les citoyens étourdis et confus sortent dans les rues
pour évaluer les dommages. Pour l’heure, seules très peu d’informations sont
disponibles en ligne. Key West existe-t-elle encore ? Difficile d’en
être sûr. Nous en saurons plus ce soir.
Le double uppercut porté par les
ouragans Harvey et Irma ont offert à ceux qui sont en charge des affaires de
la nation l’opportunité narquoise de se débarrasser de cet ennuyeux plafond
de la dette. Il s’agit là de la loi qui impose une limite à la dette que peut
acheter la Réserve fédérale au gouvernement national. Vous vous demandez
peut-être ce que signifie « acheter de la dette ». Pourquoi diable
quelqu’un voudrait-il acheter la dette de quelqu’un d’autre ?
Voyez-vous, il s’agit ici de dette sécurisée, c’est-à-dire d’obligations
émises par le Trésor des Etats-Unis, qui sont porteuses d’intérêts et sont
donc intéressantes – du moins elles l’étaient à l’époque, quand les taux d’intérêt
étaient encore positifs après déduction du pourcentage d’inflation. C’est là
que la situation devient intéressante.
La loi relative au plafond de la
dette établit des limites quant à la dette obligataire que peut émettre le
gouvernement (combien il peut emprunter), afin qu’il ne puisse pas dépenser
trop d’argent qu’il n’a pas. C’est pourtant exactement ce qui s’est passé
malgré la limite imposée à la dette, parce que le « plafond » a été
rehaussé une bonne centaine de fois tout au long du XXe et au début du XXIe
siècle, de manière à ce que la dette accumulée se trouve aujourd’hui autour
de 20 trillions de dollars.
Les individus rationnels
réalisent qu’une somme de 20 trillions de dollars représente une obligation
surnaturelle, et comprennent qu’elle ne pourra jamais être remboursée.
Pourquoi donc ne pas abandonner ce prétendu, pour que puisse se poursuivre le
racket des emprunts gouvernementaux pendant autant de temps qu’il faudra, et que
continue d’apparaître de la nouvelle monnaie sur les écrans de la Réserve
fédérale ?
Les individus rationnels réalisent
également qu’à un moment donné, quelque chose devra flancher. Comme par
exemple la valeur du dollar en lequel est émise toute cette dette. Si la
valeur du dollar décline, alors la véritable valeur des obligations émises en
dollars plonge également, ce qui pousse les divers propriétaires d’obligations
– particuliers, fonds de pension, compagnies d’assurance, fonds souverains –
à se débarrasser de leurs obligations le plus rapidement possible. Notamment
si la Fed et ses banques servantes continuent de réciter leurs incantations
pour maintenir les taux d’intérêt de ces obligations artificiellement bas.
La Réserve fédérale
rachèterait-elle toutes les obligations que les autres déchargeraient sur le
marché ? Elle tenterait certainement de le faire. La Banque du Japon en
a fait ainsi avec les obligations de son propre gouvernement, sans
conséquence néfaste apparente, bien que je me demande ce qui se passe une
fois qu’un serpent qui se mange la queue en arrive à sa tête. Que reste-t-il
après ? Un retour à l’ère médiévale. Littéralement. Plus de moteurs, de
lumière électrique, de chauffage central…
Aux Etats-Unis, nous faisons
face à une valeur de la monnaie et un coût de l’emprunt complètement détachés
de la réalité – cette réalité étant le coût et la valeur véritables des biens
et services échangés contre de la monnaie. Voilà tout. Une crise de la devise
et une interruption des échanges au niveau le plus macro imaginable. Ainsi
que, sans aucun doute, des perturbations majeures au niveau des services
gouvernementaux, donc les services de sécurité sociale et Medicare. Des mules
viendront ensuite remplacer les Ford F-150. Et le New York Times trouvera de nouveau des sujets sur
lesquels écrire autres que la Russie et les transsexuels.
La valeur de la monnaie et le
coût de l’emprunt sont ce qu’il y a de plus fondamental pour une économie dite
avancée. Bien des lois qui gouvernent la société peuvent être manipulées,
mais quand la situation s’emballe, l’anarchie commence à se profiler à l’horizon.
Mais contentons-nous pour le moment de voir comment la glue sociale qui tient
ensemble ces régions de la Floride qui, maintenant plongées dans le noir, commencent
déjà à ressembler à des attractions médiévales.